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dimanche 25 septembre 2022

Le plus grand commandement

                                                                     (Math. 22, 35 à 46)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.


 

Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à persévérer dans l’ascèse qui consiste à engendrer l’amour de Dieu et de notre prochain, cette œuvre vitale nous est demandée afin de restaurer en nous la dignité inaliénable de la nature humaine créée à l’image et à la ressemblance de Dieu. Cette œuvre qui engage l’homme tout entier, trouve sa vocation au cœur de l’Eglise qui transmet au croyant le goût de la beauté, de la sagesse spirituelle, de la vérité éternelle qui est le Christ et de la possibilité divino-humaine d’apprendre à aimer.

 

Le Seigneur nous donne le commandement d’aimer Dieu « de tout notre cœur, de toute notre âme et de tout notre esprit et notre prochain comme nous-mêmes », aimer se limiterait à un commandement ? Le commandement renvoie ici à « obéir librement et être volontaire », c’est un acte de foi en Dieu et de confiance en soi, car nous croyons que le commandement divin est porteur de grandes grâces. Etre volontaire comme le centurion qui disait au Seigneur « j’ai des serviteurs sous mes ordres, je dis à l’un fais ceci et il le fait, à l‘autre fais cela et il le fait », le Christ était émerveillé par la foi de cet homme, c’est le centurion qui commande, ce n’est pas sa seule pensée ou un état d’âme, c’est lui tout entier qui agit, de même pour nous, nous devons apprendre à commander et à ordonner le chaos de nos pensées, paroles ou actions pour aimer en communion avec la volonté divine. 

 

Le commandement d’aimer demande d’autant plus de force de conviction, que nous vivons dans un monde qui se désacralise, au profit d’une multitude d’idoles élaborées pour nous séduire et nous asservir de gré ou de force à la volonté dominatrice des fanatismes religieux, scientifiques ou politiques. Les gourous pullulent et dénoncent les religions établies pour mieux instaurer leurs fantasmes psycho ésotérico quelque chose, des scientifiques veulent fabriquer l’homme-androïde du futur qui bien sûr leur serait soumis, des politiques nous promettent des lendemains qui chantent à condition que nous leur laissions les pleins pouvoirs pour nous rendre heureux, il n’est pourtant pas besoin d’être un grand prophète pour ressentir l’intranquillité dans laquelle se noie l’humanité et le monde. 

 

L’humanité comme un funambule en déséquilibre sur le fil de l’existence se balance au-dessus des abîmes et essaye comme elle peut de ne pas rester suspendue dans le vide de la survie au quotidien. Ainsi l’homme, entre guerres réelles et fausses paix, harnaché et tiré à hue et à dia par l’hypocrisie et la volonté pathologique des soit disant puissants de ce monde, finit par osciller comme un pendule entre euphorie et dépression. 

 

L’Eglise est là infiniment patiente, oasis et havre où les caravaniers des routes sans issue peuvent s’arrêter pour accepter l’invitation divine à se restaurer corps, âme et esprit dans leur libre volonté personnelle.

 

« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur », comment aimer ainsi, si mon cœur est rempli par les pensées agitées du monde, par les pensées relatives au passé impossible à modifier, tourmenté par les désirs inassouvis, troublé par des pulsions contraires à la dignité humaine. C’est par un commandement divin que nous sommes appelés à aimer, cette œuvre d’aimer nous devrons l’acquérir par notre labeur spirituel qui exige notre volonté libre pour  réaliser en Dieu l’ascèse évangélique de la conversion intérieure sans laquelle aimer reste impossible. Ce commandement d’aimer de tout son cœur est justement la base dans laquelle s’enracine toute la tradition hésychaste et qui consiste à apprendre à aimer Dieu et son prochain de « tout notre cœur ».

 

En Mathieu 6, 21 nous lisons « ton trésor sera là où est ton cœur profond », c’est pourquoi, saint Théophane le Reclus nous dit que « toute pensée ou sentiment qui ne passe pas par un cœur purifié par la grâce divine, reste sujet au doute ». Pour l’être orthodoxe, nous comprenons alors, que l’amour et le salut sont une seule et même réalité ultime, puisque d’après saint Paul « l’amour est ce qui reste et que le salut est le fruit de l’amour ». La voie du cœur et son fruit spirituel atteignent leur plénitude dans la parole mémorable du Christ « bienheureux les cœurs purs, car ils verront Dieu ».

 

« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ton âme », de même que pour le cœur, il s’agit d’aimer de toute « mon » âme, je ne peux déléguer à personne mon désir d’aimer ou d’être aimé, je dois être celui ou celle qui décide d’aimer malgré les épreuves de mon existence, je dois apprendre à me solliciter en premier et tout entier dans mon désir de Dieu, si mon désir est personnel, il ne doit pas être solitaire ou pire isolé, c’est pourquoi, l’Eglise a vocation d’accueillir ceux et celles qui cherchent Dieu. Nos saints Pères et saintes Mères, nous encouragent à prier et à méditer les « Psaumes », parce qu’ils mettent à nus tous les faux sentiments qui nous habitent et nous donnent les réponses et attitudes justes que ce soit  pour nous libérer de toute emprise pathologique ou pour célébrer la louange de Dieu. 

 

L’âme est créée et vivifiée par le « souffle divin », l’homme peut tuer le corps et corrompre l’âme, mais il ne peut la détruire parce qu’il n’en est pas le créateur, c’est pourquoi, quelque soit notre situation existentielle, l’homme peut toujours prier Dieu pour le salut de son âme. L’âme, tout comme le corps, l’esprit ou le cœur a vocation à aimer Dieu et le prochain, l’amour ne meurt pas, sinon comment pourrions-nous aimer encore à nouveau après chaque nouvelle 

désillusion qui ébranle plus ou moins notre être et notre existence. 

 

« Tu aimeras le Seigneur de tout ton esprit », c’est quoi mon esprit, comment connaître de l’intérieur la réalité de l’esprit qui nous habite, si je ne connais rien de lui, c’est comme si j’étais envahi par une réalité étrangère dont j’ignore tout ou presque. La vocation de l’esprit est d’incarner en nous ce qu’il peut contempler de la présence divine, la nourriture naturelle de l’esprit est l’accomplissement dans l’homme de la sagesse contenue dans l’Eglise, cette sagesse est vécue sur un mode liturgique et transmet à l’homme la connaissance de la volonté divine qui consiste encore et toujours à apprendre à aimer Dieu et l’homme. Saint Mathieu en 26, 41 nous rappelle que « l’esprit de l’homme est par nature bien disposé », mais a besoin d’être gardé et purifié du trouble que peut provoquer en lui l’âme tourmentée et tout son cortège de désirs incessants et passionnés. Les Béatitudes comme voies du salut, nous enseignent que « bienheureux sont les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux », cette pauvreté de l’esprit semble contredire l’affirmation de saint Paul qui dit « que l’esprit connaît tout ce qui est dans l’homme », il n’en est rien, car la connaissance parfaite réside en Dieu et ne peut rien contenir de partiel ni de partial, le pauvre en esprit est donc celui qui se purifie de tout savoir mondain qui l’isole et empêche toute véritable empathie humaine, pour se nourrir du désir de vie éternelle illuminée par la présence divine.  

 

Le Seigneur parle d’aimer de tout son cœur, de toute son âme et de tout son esprit, le corps serait-il inutile voire exclu dans l’œuvre d’aimer ? Le corps ne peut exprimer sa nature spirituelle qui si nous le vivons pour ce qu’il est fondamentalement, à savoir temple de l’Esprit Saint. Le corps est le médiateur de la grâce divine, il est l’humble serviteur de l’esprit et de l’âme de l’homme, il ne demande rien pour lui-même et pourtant il reçoit toutes les bénédictions divines. N’est-ce pas le corps qui par la bouche accueille le Corps et le Sang du Christ et le transmet ainsi à la personne toute entière ? N’est-ce pas le corps qui est marqué par le Saint Esprit dans le signe du saint Chrême et qui transmet cette grâce à la personne toute entière au moment du saint baptême ?  

Si le corps était un corps mort ou un poids qui plombe l’être, comment pourrait-il transmettre la beauté, la douceur et la tendresse de ceux qui désirent aimer Dieu de toute leur âme, cœur et esprit. 

 

A l’opposé, si notre corps est utilisé et sollicité en permanence pour satisfaire toutes nos convoitises, alors nous en faisons un objet et le rendons infirme et incapable de transmettre la grâce divine, étant crée par Dieu, le corps est saint et sacré et si nous le bénissons comme tel, alors le corps participe pleinement dans notre désir d’aimer Dieu et notre prochain.  

 

Saint Jean en 1, 17-18 dit : il est donné à notre esprit de comprendre qu’en vérité la parole du Christ procède du « Père des Lumières », la parole du Seigneur contient donc la lumière de la vie divine et celui ou celle qui lui ouvrira son cœur sera visité par la grâce qui révèlera dans l’être en esprit et en vérité, la « personne créée à l’image et à la ressemblance de Dieu », telle est la divine promesse du Seigneur donnée à l’homme son bien-aimé.

 

Au Père inengendré, au Fils engendré et à l’Esprit qui nous engendre spirituellement, soit la gloire, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon 

 

 

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