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dimanche 25 septembre 2022

Le plus grand commandement

                                                                     (Math. 22, 35 à 46)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.


 

Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à persévérer dans l’ascèse qui consiste à engendrer l’amour de Dieu et de notre prochain, cette œuvre vitale nous est demandée afin de restaurer en nous la dignité inaliénable de la nature humaine créée à l’image et à la ressemblance de Dieu. Cette œuvre qui engage l’homme tout entier, trouve sa vocation au cœur de l’Eglise qui transmet au croyant le goût de la beauté, de la sagesse spirituelle, de la vérité éternelle qui est le Christ et de la possibilité divino-humaine d’apprendre à aimer.

 

Le Seigneur nous donne le commandement d’aimer Dieu « de tout notre cœur, de toute notre âme et de tout notre esprit et notre prochain comme nous-mêmes », aimer se limiterait à un commandement ? Le commandement renvoie ici à « obéir librement et être volontaire », c’est un acte de foi en Dieu et de confiance en soi, car nous croyons que le commandement divin est porteur de grandes grâces. Etre volontaire comme le centurion qui disait au Seigneur « j’ai des serviteurs sous mes ordres, je dis à l’un fais ceci et il le fait, à l‘autre fais cela et il le fait », le Christ était émerveillé par la foi de cet homme, c’est le centurion qui commande, ce n’est pas sa seule pensée ou un état d’âme, c’est lui tout entier qui agit, de même pour nous, nous devons apprendre à commander et à ordonner le chaos de nos pensées, paroles ou actions pour aimer en communion avec la volonté divine. 

 

Le commandement d’aimer demande d’autant plus de force de conviction, que nous vivons dans un monde qui se désacralise, au profit d’une multitude d’idoles élaborées pour nous séduire et nous asservir de gré ou de force à la volonté dominatrice des fanatismes religieux, scientifiques ou politiques. Les gourous pullulent et dénoncent les religions établies pour mieux instaurer leurs fantasmes psycho ésotérico quelque chose, des scientifiques veulent fabriquer l’homme-androïde du futur qui bien sûr leur serait soumis, des politiques nous promettent des lendemains qui chantent à condition que nous leur laissions les pleins pouvoirs pour nous rendre heureux, il n’est pourtant pas besoin d’être un grand prophète pour ressentir l’intranquillité dans laquelle se noie l’humanité et le monde. 

 

L’humanité comme un funambule en déséquilibre sur le fil de l’existence se balance au-dessus des abîmes et essaye comme elle peut de ne pas rester suspendue dans le vide de la survie au quotidien. Ainsi l’homme, entre guerres réelles et fausses paix, harnaché et tiré à hue et à dia par l’hypocrisie et la volonté pathologique des soit disant puissants de ce monde, finit par osciller comme un pendule entre euphorie et dépression. 

 

L’Eglise est là infiniment patiente, oasis et havre où les caravaniers des routes sans issue peuvent s’arrêter pour accepter l’invitation divine à se restaurer corps, âme et esprit dans leur libre volonté personnelle.

 

« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur », comment aimer ainsi, si mon cœur est rempli par les pensées agitées du monde, par les pensées relatives au passé impossible à modifier, tourmenté par les désirs inassouvis, troublé par des pulsions contraires à la dignité humaine. C’est par un commandement divin que nous sommes appelés à aimer, cette œuvre d’aimer nous devrons l’acquérir par notre labeur spirituel qui exige notre volonté libre pour  réaliser en Dieu l’ascèse évangélique de la conversion intérieure sans laquelle aimer reste impossible. Ce commandement d’aimer de tout son cœur est justement la base dans laquelle s’enracine toute la tradition hésychaste et qui consiste à apprendre à aimer Dieu et son prochain de « tout notre cœur ».

 

En Mathieu 6, 21 nous lisons « ton trésor sera là où est ton cœur profond », c’est pourquoi, saint Théophane le Reclus nous dit que « toute pensée ou sentiment qui ne passe pas par un cœur purifié par la grâce divine, reste sujet au doute ». Pour l’être orthodoxe, nous comprenons alors, que l’amour et le salut sont une seule et même réalité ultime, puisque d’après saint Paul « l’amour est ce qui reste et que le salut est le fruit de l’amour ». La voie du cœur et son fruit spirituel atteignent leur plénitude dans la parole mémorable du Christ « bienheureux les cœurs purs, car ils verront Dieu ».

 

« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ton âme », de même que pour le cœur, il s’agit d’aimer de toute « mon » âme, je ne peux déléguer à personne mon désir d’aimer ou d’être aimé, je dois être celui ou celle qui décide d’aimer malgré les épreuves de mon existence, je dois apprendre à me solliciter en premier et tout entier dans mon désir de Dieu, si mon désir est personnel, il ne doit pas être solitaire ou pire isolé, c’est pourquoi, l’Eglise a vocation d’accueillir ceux et celles qui cherchent Dieu. Nos saints Pères et saintes Mères, nous encouragent à prier et à méditer les « Psaumes », parce qu’ils mettent à nus tous les faux sentiments qui nous habitent et nous donnent les réponses et attitudes justes que ce soit  pour nous libérer de toute emprise pathologique ou pour célébrer la louange de Dieu. 

 

L’âme est créée et vivifiée par le « souffle divin », l’homme peut tuer le corps et corrompre l’âme, mais il ne peut la détruire parce qu’il n’en est pas le créateur, c’est pourquoi, quelque soit notre situation existentielle, l’homme peut toujours prier Dieu pour le salut de son âme. L’âme, tout comme le corps, l’esprit ou le cœur a vocation à aimer Dieu et le prochain, l’amour ne meurt pas, sinon comment pourrions-nous aimer encore à nouveau après chaque nouvelle 

désillusion qui ébranle plus ou moins notre être et notre existence. 

 

« Tu aimeras le Seigneur de tout ton esprit », c’est quoi mon esprit, comment connaître de l’intérieur la réalité de l’esprit qui nous habite, si je ne connais rien de lui, c’est comme si j’étais envahi par une réalité étrangère dont j’ignore tout ou presque. La vocation de l’esprit est d’incarner en nous ce qu’il peut contempler de la présence divine, la nourriture naturelle de l’esprit est l’accomplissement dans l’homme de la sagesse contenue dans l’Eglise, cette sagesse est vécue sur un mode liturgique et transmet à l’homme la connaissance de la volonté divine qui consiste encore et toujours à apprendre à aimer Dieu et l’homme. Saint Mathieu en 26, 41 nous rappelle que « l’esprit de l’homme est par nature bien disposé », mais a besoin d’être gardé et purifié du trouble que peut provoquer en lui l’âme tourmentée et tout son cortège de désirs incessants et passionnés. Les Béatitudes comme voies du salut, nous enseignent que « bienheureux sont les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux », cette pauvreté de l’esprit semble contredire l’affirmation de saint Paul qui dit « que l’esprit connaît tout ce qui est dans l’homme », il n’en est rien, car la connaissance parfaite réside en Dieu et ne peut rien contenir de partiel ni de partial, le pauvre en esprit est donc celui qui se purifie de tout savoir mondain qui l’isole et empêche toute véritable empathie humaine, pour se nourrir du désir de vie éternelle illuminée par la présence divine.  

 

Le Seigneur parle d’aimer de tout son cœur, de toute son âme et de tout son esprit, le corps serait-il inutile voire exclu dans l’œuvre d’aimer ? Le corps ne peut exprimer sa nature spirituelle qui si nous le vivons pour ce qu’il est fondamentalement, à savoir temple de l’Esprit Saint. Le corps est le médiateur de la grâce divine, il est l’humble serviteur de l’esprit et de l’âme de l’homme, il ne demande rien pour lui-même et pourtant il reçoit toutes les bénédictions divines. N’est-ce pas le corps qui par la bouche accueille le Corps et le Sang du Christ et le transmet ainsi à la personne toute entière ? N’est-ce pas le corps qui est marqué par le Saint Esprit dans le signe du saint Chrême et qui transmet cette grâce à la personne toute entière au moment du saint baptême ?  

Si le corps était un corps mort ou un poids qui plombe l’être, comment pourrait-il transmettre la beauté, la douceur et la tendresse de ceux qui désirent aimer Dieu de toute leur âme, cœur et esprit. 

 

A l’opposé, si notre corps est utilisé et sollicité en permanence pour satisfaire toutes nos convoitises, alors nous en faisons un objet et le rendons infirme et incapable de transmettre la grâce divine, étant crée par Dieu, le corps est saint et sacré et si nous le bénissons comme tel, alors le corps participe pleinement dans notre désir d’aimer Dieu et notre prochain.  

 

Saint Jean en 1, 17-18 dit : il est donné à notre esprit de comprendre qu’en vérité la parole du Christ procède du « Père des Lumières », la parole du Seigneur contient donc la lumière de la vie divine et celui ou celle qui lui ouvrira son cœur sera visité par la grâce qui révèlera dans l’être en esprit et en vérité, la « personne créée à l’image et à la ressemblance de Dieu », telle est la divine promesse du Seigneur donnée à l’homme son bien-aimé.

 

Au Père inengendré, au Fils engendré et à l’Esprit qui nous engendre spirituellement, soit la gloire, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon 

 

 

dimanche 18 septembre 2022

Banquet et robe nuptiale.

                                                                                                                             

(Matthieu 22, 2 à 14)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen.



 

Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à venir vers elle, afin de recevoir le don de notre robe nuptiale, pour participer aux noces spirituelles et au banquet mystique, autour de l’Autel qui est la table royale où trône la Divine Trinité, pour célébrer ensemble la Divine Liturgie. La robe nuptiale symbolise ici, toutes les conditions personnelles, ecclésiales et spirituelles à mettre en œuvre pour rencontrer le Roi des rois, Son Fils Jésus, le Saint-Esprit…et notre prochain. 

 

Nous avons déjà entendu parlé, des vêtements spirituels que doivent revêtir ceux qui désirent vivre selon l’Evangile, ces habits bénis que sont les Dons de l’Esprit de Dieu énumérés par saint Paul et qui sont « l’amour, la paix, la joie » ainsi que les autres dons que Dieu donne à qui les Lui demande. Ces dons nous sont proposés en vue de créer avec Dieu la robe nuptiale vivifiante qui nous est personnellement destinée, la qualité de notre robe nuptiale sera aussi une icône, un témoin fidèle de toutes nos œuvres existentielles.    

 

Mais dirons-nous peut-être, de quoi est donc faite cette fameuse robe nuptiale si désirable et si nécessaire pour être reçu comme un convive à la table divine ? Elle est tissée de lumière et de vie… la robe nuptiale est faite de la lumière incréée, de cette lumière plus que lumineuse qui irradiait de la splendeur du Dieu vivant, au sommet du Mont Thabor, où le Seigneur Christ s’est transfiguré devant Jean, Pierre, Jacques, et devant les prophètes Moïse et Elie. Cette belle robe nuptiale lumineuse, ne peut être tissée par nos seules œuvres humaines, bien qu’elle soit faite avec nous et pour nous, elle est le premier vêtement spirituel originel fait pour l’homme sorti des mains créatrices de notre Père du Ciel, ces mains saintes, pures et divines que sont le « Verbe et l’Esprit ». Mais l’ultime et véritable robe nuptiale donnée par la grâce de Dieu, sera le « corps de gloire », c’est à dire notre « corps transfiguré et déifié » semblable par grâce à celui de notre Seigneur, le Saint Ressuscité. 

 

Le Seigneur dit : « le Royaume des Cieux est semblable à un roi qui fît un festin de noces pour son fils. Il envoya ses serviteurs convier les invités à la noce, mais ils ne voulurent pas venir ». Nous connaissons tous, les serviteurs de Dieu qui nous ont été envoyé à travers le temps et l’espace dans l’histoire de l’humanité, les Patriarches, les Prophètes, les Apôtres, les Anges, et de nos jours, l’Eglise dans laquelle les prêtres ne se lassent pas d’inviter les hommes, à venir tous se rassasier des nourritures spirituelles et en premier, du « Corps et du Sang de notre Seigneur ». 

 

Saint Paul dit à son disciple Tite : « toi, enseigne à temps et à contre temps, tout ce que je t’ai enseigné », de même, les prêtres ne cessent de nous rappeler l’enseignement évangélique et de nous prier de venir avec assiduité à l’Eglise, au banquet royal divino-humain, car c’est là et seulement là, que nous pouvons espérer recevoir toutes les grâces et bénédictions utiles pour façonner peu à peu notre robe nuptiale et nous préparer à festoyer spirituellement dans l’éternité du très saint Royaume de Dieu. 

 

L’Evangile nous dit encore : « de nouveau, il envoya d’autres serviteurs…tout est prêt, venez aux noces ! Mais ils ne voulurent pas venir ». Cette parole, renvoie chacun et chacune d’entre nous à lui-même, certes nous sommes venus aujourd’hui et nous avons dit « amen » à l’invitation divine. Mais notre présence, dans l’Eglise-Royaume, de quoi est-elle en « esprit et en vérité le signe » et quel en est le sens réel et le fruit dans notre vie? Le saint Evangile nous est donné comme une source de méditation pour vivifier notre existence, et non comme un discours basé sur l’infantilisation et des interdits qui relèvent d’une psychologie de pacotille. 

Nous pouvons être là, dans l’Eglise, et pourtant toutes sortes de résistances intérieures peuvent se réveiller et nous travailler, les pensées alors ne nous lâchent pas, la concentration semble impossible, la liturgie paraît interminable. L’Evangile de ce jour témoigne de toutes ces choses dans notre âme qui peuvent nous parasiter, mais cette épreuve de l’âme peut devenir pour nous libératrice, si nous acceptons de l’accueillir et d’agir avec l’intelligence du cœur.    

 

L’Evangile poursuit : « mais ils ne tinrent pas compte de cette invitation et s’en allèrent, qui à son champ, qui à son commerce, et les autres s’emparèrent des serviteurs, les maltraitèrent et même les tuèrent ». L’Evangile nous montre ainsi des invités dont l’âme est instable, ils oscillent entre ignorance, indifférence et folie meurtrière, individus désorientés par les pensées insensées de leurs cœurs, possédés par leurs possessions, ballotés au gré de leurs états d’âme, orphelins de leur précieuse humanité, perdus en eux-mêmes au point d’être devenus comme insensibles à la rencontre possible avec le Roi et son Fils. 

 

Alors, le roi dit à ses serviteurs : « le festin est prêt, mais les invités n’en étaient pas dignes ; allez dans les carrefours et conviez aux noces tous ceux que vous pourrez trouver » ! Pourquoi donc, les invités se sont-ils eux-mêmes rendus indignes du festin ? Le Seigneur nous éclaire : « parce qu’ils calculent chacun pour soi et en soi, si au fond çà vaut vraiment la peine de se déplacer à l’Eglise, pourquoi sont-ils ainsi? Pour toutes sortes de raisons, par désintérêt, manque de foi, d’espérance et d’amour envers Dieu, leur prochain et la sainte Eglise du Christ. La conversion de leur cœur a beaucoup de mal à se réaliser, l’esprit résiste à la grâce, la vie religieuse se limite au minimum et ne permet pas un enracinement réel dans la vie spirituelle et dans l’Eglise. C’est pourquoi, l’humanité se revêt de ténèbres qui engendrent dans les âmes incrédules et non converties, les malheurs éprouvants de ce monde qui ont pour nom générique la « dépression » avec son cortège d’illusions pathologiques. 

 

Alors dit l’Ecriture : « les serviteurs du roi s’en allèrent par les chemins, ramassèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, les mauvais comme les bons, et la salle des noces fût remplie de convives ». Cette multitude d’individus appelés au festin céleste, est celle qui était encore en dehors de l’Eglise, elle ignore tout ou presque de ce roi qui les invite, mais cette sorte d’innocence par ignorance ne peut suffire à justifier leur refus de connaître qui est en vérité ce roi. 

 

C’est pourquoi, nous ne pouvons pas venir dans l’Eglise par habitude et sans conversion véritable de notre cœur, sans désir de Dieu librement choisi, sinon nous nous privons nous-mêmes de l’héritage divin. « Etre orthodoxe, c’est le devenir, » c’est tout faire pour ressembler au Christ notre Dieu, le Christ est allé à la Synagogue, nous sommes donc invités à l’imiter et à aller à l’Eglise. La vie selon Dieu ne se résume pas à des pensées sur Dieu, mais à agir de manière digne d’un chrétien orthodoxe, sinon nous risquons de nous voir mettre à la porte et de nous entendre dire par le Seigneur la parole qu’Il a dite aux vierges folles : « Je ne vous ai jamais connu ». Nous pouvons venir à l’Eglise quelques soient nos états d’âmes, car nous savons que « le Seigneur témoigne lui-même qu’Il est venu pour les malades et non pour les biens portants », mais le roi ne peut nous donner audience ni nous guérir en notre absence.  

 

Ensuite dit l’Evangile : « le roi entra pour voir les convives, et il aperçut un homme qui ne portait pas l’habit nuptial. Il lui dit : « mon ami, comment es-tu entré ici sans avoir l’habit nuptial ? Mais l’homme resta muetqui est l’homme muet, c’est celui qui ne parle ni avec Dieu ni avec l’homme, c’est celui, dont la présence au banquet n’est motivé que par le voyeurisme et l’intérêt pour les nourritures matérielles du banquet. Il n’entre pas en lui-même et n’entend pas le roi lui dire « mon ami », parole qui aurait pu le sauver de sa solitude tragique et provoquer une ouverture dans son esprit, alors le roi dit aux serviteurs : Jetez-le, pieds et poings liés, dans les ténèbres extérieures ». Gardons-nous de porter un jugement sur l’attitude du roi ou sur l’homme muet, rentrons en nous-mêmes et voyons d’abord dans quel état est notre propre robe nuptiale.

Ainsi, il est absolument illusoire de penser qu’il suffit d’être là dans l’Eglise pour être sauvé, de faire acte de présence sans s’engager vraiment dans la conversion du cœur et dans la vie spirituelle. L’Eglise est l’œuvre de tous, c’est notre plus beau chantier commun, c’est le trésor des trésors que nous devons transmettre à nos enfants, et à tout homme et toute femme de bonne volonté. La robe nuptiale se tisse dès le plus jeune âge, sur le métier liturgique et sur la conversion de notre esprit, dans le désir simple et réel qui consiste à suivre et à vivre avec Celui qui nous dit : « Je Suis le Chemin, la Vérité et la Vie ».

 

La prière liturgique est pour nous le temps privilégié et favorable, pour demander à la Divine Trinité tous les biens précieux et nécessaires pour notre salut, ces biens qui sont tous contenus dans l’expression générique de « robe nuptiale ». C’est pourquoi, les saints et les anges nous recouvrent de leur robe glorieuse et de leur sainte prière, afin que notre Dieu, Ami de l’homme, nous comble de bénédictions pour notre salut. 

 

L’Eglise tout en étant la plus belle icône du Royaume de Dieu ne s’impose pas, elle respecte la « liberté glorieuse des enfants de Dieu », elle attend donc comme une mère spirituelle très sage, humble et patiente, que viennent les véritables invités du Seigneur. L’Eglise a comme vocation de transformer les « appelés » que nous sommes tous en « élus et amis de Dieu », et cette sainte vocation divino-humaine et ascétique se réalise de manière privilégiée, au cours du banquet mystique qui est la célébration ensemble de la Divine Liturgie. 

 

Saint Jean nous enseigne dans son Prologue : « que tout a été fait par le Verbe, que celui-ci est la vie et que la vie est la lumière des hommes », la robe nuptiale qui est faite de cette lumière du Verbe éternel, s’engendre donc pour nous chrétiens orthodoxes à partir de la vie divine en Christ et dans son Eglise et nulle part ailleurs. Si donc, nous voulons que Dieu lui-même nous revête de Sa lumière, venons communier au Corps et au Sang du Christ, car « l’Eucharistie est la matrice spirituelle » de cette robe nuptiale. Ne soyons pas « muets » comme cet homme qui n’avait pas la robe nuptiale, mais parlons à Dieu, parlons avec Dieu, parlons entre nous, par la louange à travers la Divine Liturgie et ce faisant, nous donnons à Dieu l’occasion de répondre à notre prière liturgique et à notre prière personnelle. 

 

Au Père et Roi qui bénit les noces spirituelles de Son Fils avec l’humanité, à l’Esprit Saint qui nous invite sans cesse au festin divino-humain, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen. 

 

+ Syméon

 

dimanche 11 septembre 2022

Sel de la terre et lumière du monde

(Math. 5, 14 à 19)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

Aujourd’hui, l’Eglise nous remémore cette parole éblouissante du Seigneur « vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde », saint Jean nous dit que « qu’en lui, le Verbe divin, était la vie et que la vie était la lumière deshommes », là le Seigneur de gloire glorifie l’homme en lui disant « tu es la lumière du monde », divine humilité du Christ qui montre à quelle hauteur il situe la personne humaine. 

 

Que penser, que dire, que faire devant une telle parole, peut-être juste commencer à y croire vraiment et ne plus s’embourber dans les pensées stériles habituelles du style « je ne suis rien, je ne vaux rien, je ne suis pas digne et autres mises à mort de notre âme ». Ce qui est demandé, c’est de ne plus laisser notre sel de l’esprit s’affadir et de témoigner par notre lumière devant les hommes, pourquoi ? Afin que « les hommes voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui est aux cieux ». 

 

En Genèse 19, 26 il est écrit « elle devint une statue de sel », une telle statue n’est qu’une idole sans vie et momifiée, alors que le sel dont parle le Seigneur est celui de la sagesse créatrice qui est une grâce divine qui permet de se façonner avec Dieu, une vie et une existence qui vaille la peine d’être vécue. Saint Marc, 9, 50 commente le sel dont parle le Seigneur en disant « ayez du sel en vous-mêmes pour vivre en paix, les uns avec les autres », nous pouvons en conclure que la paix est la véritable saveur du sel spirituel. Mais de quelle paix s’agit-il ? De celle dont le Christ nous dit « Je vous donnerais la paix qui surpasse toute intelligence », c’est pourquoi saint Paul enseigne à la suite de saint Marc que « votre parole soit toujours aimante, et de plus assaisonnée de ce précieux sel qui est l’art de répondre à chacun avec intelligence ». 

 

« Vous êtes la lumière du monde », là aussi comme pour le sel, nous pouvons méditer sur Genèse 1, 4 « Dieu sépare la lumière d’avec les ténèbres », la lumière est singulière et unique, alors que les ténèbres sont aussi nombreuses que nos pensées non purifiées par l’Esprit Saint, toutes ces pensées humaines trop humaines qui ne cessent d’essayer de nous limiter à la sphère psycho- somatique et matérielle. 

 

Si donc nous voulons nous séparer des ténèbres, il sera nécessaire de prier Celui qui est non seulement la Lumière absolue, mais aussi le créateur et donateur de la lumière spirituelle qui peut illuminer les ténèbres les plus ténébreuses ce dont témoigne saint Jean 1,5 « la lumière luit dans les ténèbres ». Peut-être quelqu’un dira que tout cela est bien beau, mais comment sortir réellement de nos ténèbres, la création divine est bien faite et ce sont les « tournesols » qui vont nous donner la solution, nous pourrions peut-être comme eux nous tourner vers notre beau soleil spirituel le Christ, qui rayonne au sein de la vie liturgique de notre Eglise. 

 

En saint Jean 8,12 le Christ dit « Je suis la lumière du monde » et ailleurs « marchez, tant que vous avez la lumière », tant que vous existez dans ce monde, ne le quittez pas en état de ténèbres que n’éclaire plus aucune espérance d’une vie possible après la mort. Nous pouvons ici comprendre, c’est à dire « prendre avec nous », cette parole divine comme le signe qui montre que la voie des béatitudes est celle qui révèle dans l’homme la lumière qui l’habite et peut faire de lui et avec lui un bienheureux selon la grâce divine, le bienheureux est vraiment « sel de la terre et lumière du monde ».

 

Le malheureux individualiste autant révolté contre Dieu que contre l’homme, plongé dans les ténèbres du manque de discernement spirituel, aveuglé pas les pseudo lueurs d’un monde replié sur lui-même, se meurt de solitude aride et réfractaire à toute spiritualité religieuse.

C’est pourquoi, saint Paul en 2 Cor 6, 14 dit « quoi de commun entre la lumière et les ténèbres » ? La lumière et les ténèbres étaient incompatibles jusqu’à l’incarnation parmi nous du Christ qui est la « véritable lumière qui peut éclairer tout homme dans ce monde », à condition que l’homme de ténèbres désire accueillir la vie lumineuse divino-humaine. Si donc, nous voulons émerger hors de nos ténèbres intérieures et nous engendrer à la lumière de la vie, nous pouvons nous tourner résolument vers Dieu, selon la parole de saint Jean en 1, 5 « Dieu est Lumière, il n’y a aucune ténèbres en Lui », car nous savons que si un « aveugle guide d’autres aveugles, ils finissent tous par tomber dans l’abîme ». 

 

La lumière dont il est témoigné ici est celle de l’esprit d’intelligence, dont nous parle saint Paul, en 1 Cor 2, 11 « car qui connaît les choses dans l’homme, si ce n’est l’esprit de l’homme qui est en lui...et qui connaît les choses de Dieu, si ce n’est l’Esprit de Dieu ». L’apôtre Paul souligne ici avec réalisme ce double mouvement unissant Dieu et l’homme, celui de se connaître par l’esprit qui sonde les profondeurs de l’être et donne la connaissance divino-humaine par la grâce de Dieu.

 

« Vous êtes la lumière du monde », si donc je désire m’éclairer par cette lumière, il me faut aller la chercher à la source intarissable qui est le Christ qui nous dit lui-même « Je suis la Voie, la Vérité et la Vie », et donc croire que même dans nos ténèbres, le salut de Dieu est possible. Dieu est vivant et lumière, l’Eglise est notre Mère lumineuse, spirituelle et religieuse auprès de laquelle nous pouvons expérimenter la vie en Dieu proposée à tout baptisé au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Dans l’Eglise corps du Christ se trouve toute l’œuvre divino-humaine du Seigneur, c’est pourquoi, Dieu l’a déposée au cœur du monde comme un phare lumineux, avec comme vocation d’illuminer les ténèbres de ce monde et éveiller l’humanité endormie. 

 

La méditation du mystère de l’Eglise comme lumière divine est vitale pour nous orthodoxes, car elle aussi notre propre mystère et la lumière enfouie au fond de notre être, l’Eglise de Dieu est une icône de l’économie divine dans le monde et un miroir lumineux où chacun et chacune peut recevoir la grâce de voir le Dieu vivant face à face sans mourir.

 

« Vous êtes la lumière du monde », l’Eglise, lumière divine incarnée, n’est-elle pas « le Corps du Christ dont IL est la tête ? » Elle nous transmet toute la lumière spirituelle que nous pouvons espérer, dont nous pouvons nous nourrir et nous désaltérer pour pratiquer l’ascèse qui convient à notre désir de vie orthodoxe. 

 

« Vous êtes la lumière du monde », c’est là tout simplement notre vocation depuis notre création originelle, sinon comment pourrions-nous en vivre, cette lumière que nous sommes et qui nous habite, doit commencer par se révéler ici dans notre réalité terrestre, non, il ne s’agit pas de faire des choses extraordinaires ou de jouer les originaux, mais d’apprendre à mettre jour après jour de manière modeste mais régulière en œuvre l’enseignement évangélique, de venir à l’Eglise régulièrement pour concélébrer ensemble dans la lumière liturgique les mystères du Christ, dont la finalité ultime est le salut éternel de l’homme.  

 

« Vous êtes la lumière du monde », du monde pas du « Royaume de Dieu », la lumière plénière sera là lorsque selon la promesse divine « Dieu sera tout en tous », avec espérance, écoutons et pratiquons la sagesse de l’Eglise et bénissons Dieu pour toutes ses grâces.

 

Au Père source de la lumière, au Fils incarnation de la lumière et à l’Esprit illuminateur, soit la gloire et la louange, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

 

dimanche 4 septembre 2022

Le jeune homme riche

 


(Math. 19, 16 à 26)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 

Aujourd’hui, l’Eglise nous transmet cette parole vivifiante du Seigneur « si tu veux la vie, observe les commandements divins », puisque ces commandements nous sont donnés par Dieu, rencontrer Dieu à travers eux devrait devenir notre priorité existentielle, selon cette autre parole du Christ « vends tout ce que tu possèdes et suis-moi », entendant cela, le jeune homme riche s’en alla attristé, car il avait de grands biens, cette attitude est à l’opposé de celle qui est utile pour suivre le Christ, à savoir « le renoncement », renoncer n’ayant rien à voir avec se renier ou se dépouiller de manière irréfléchie, mais à instaurer une relation d’humanité à travers les biens, tant matériels que spirituels. 

 

L’attitude du jeune homme riche est un témoignage qui confirme la parole du Seigneur disant « que sert-il à un homme de posséder le monde entier, s’il y perd son âme », même si, ce jeune homme dit lui-même que depuis son enfance, il met en œuvre la loi mosaïque, qu’il est un Juif pieux et pratiquant, oui, nous pouvons nous aussi comme lui, nous illusionner totalement si nous pensons que la seule pratique extérieure des rites et des savoirs purement intellectuels suffisent pour vivre selon l’évangile de vie et être sauvé. 

 

L’Evangile de ce jour, souligne qu’en vérité ce n’est pas la seule « quantité des biens » qui nous freine ou nous empêche de suivre le Christ, mais la qualité de notre relation au Christ et à nous-mêmes, on peut être attaché très fortement et parfois plus à peu qu’à beaucoup de biens. La majorité des humains ne roule pas sur l’or, comme dit le dicton populaire, et pour autant ne suivent pas le Christ, ni la grande richesse, ni la petite richesse, ni même la pauvreté matérielle, ne sont un obstacle pour celui ou celle qui désire et qui décide de suivre avec ténacité notre Seigneur. En réalité, le mur de séparation entre Dieu et l’homme, n’est autre que l’homme lui-même, selon le désir profond et le sens qu’il veut donner à son existence, si par exemple, une voie religieuse claire est choisie, il sera possible de se donner les moyens matériels et spirituels de la réaliser. 

 

L’Eglise a reçu de Dieu cette vocation à donner au croyant l’aide spirituelle sans laquelle, il est impossible de cheminer avec le Christ, cette aide fondamentale est basée en premier sur la célébration liturgique qui donne la communion au très saint Corps et Sang du Seigneur. Cette communion essentielle et substantielle est accompagnée par l’enseignement évangélique nécessaire à la compréhension des saints mystères que célèbre l’Eglise orthodoxe, compréhension qui demande l’union de la lettre et de l’esprit. Saint Paul dans 2 Cor, 3-6 rappelle que la « lettre tue, mais l’esprit vivifie », il ne dit pas que la lettre est meurtrière par nature, mais elle peut le devenir à chaque fois que l’homme se radicalise dans une attitude non purifiée par la lumière de l’esprit. 

Pour proposer au jeune homme riche des outils de discernement, le Seigneur lui ouvre un chemin spirituel possible en nommant les causes principales à la source des conflits intérieurs et extérieurs, que dit-il ? « tu ne tueras pas, tu ne commettras pas d’adultère, tu ne voleras pas, tu ne porteras pas de témoignages mensongers, aime ton père et ta mère et ton prochain comme toi-même ». 

 

« Tu ne tueras pas » est le premier commandement cité, tuer est la négation de la vie, c’est une aberration et une perversion de la nature humaine, c’est une réalité irréversible qui ne peut trouver de pardon qu’en Dieu le créateur de la vie, par une conversion intérieure profonde à l’image du fils prodigue, car ce que l’homme a tué comment pourrait-il le restaurer ? Ce drame presque absolu au sein de l’humaine condition, trouve un écho dans le meurtre d’Abel par son frère Caïn, tragédie indicible qui marque comme au fer rouge l’âme et s’incarne au cœur même de la mémoire collective et inconsciente de l’humanité, car l’homme oublie que Dieu ne demande « ni holocauste ni sacrifice humain ».

 

Unir la lettre avec l’esprit, c’est apprendre à unir l’intelligence avec le cœur, et construire ainsi l’harmonie de l’être vivant selon la sagesse divino-humaine, cette quête de l’équilibre est inaccessible à la seule pensée ou aux paroles non suivies d’actes spirituels. L’apôtre Jacques en son épître 5, 6 écrit « vous avez tué le Juste, qui ne vous a pas résisté », ce juste est le Christ, victime innocente de la désunion quasi totale entre la lettre et l’esprit, de la rupture entre le cœur et l’intelligence, qui amplifie les ténèbres de l’homme sans foi ni loi.  

 

Arrêtons-nous un peu sur le dernier commandement que le Christ recommande au jeune homme riche « tu aimeras ton prochain comme toi-même », cette parole est le début, le milieu et la fin de toute l’ascèse orthodoxe, seule la culture de l’amour divino-humain du Seigneur, peut empêcher de tuer, voler, mentir, il ne  s’agit pas ici d’un amour philosophique, pétri par l’argile périssable des sentiments émotifs, des belles paroles superficielles et sans avenir, dont nous savons qu’il ne peuvent pas survivre dans la réalité de la vie concrète. 

 

L’amour dont le Seigneur parle trouve son expression qualitative dans le chant du Cantique des cantiques, chant des fiançailles entre l’âme et Dieu, entre l’homme et la femme, écoutons-le qui chante « où es-tu ma bien-aimée, ma colombe, mon unique beauté » ou encore « où es-tu mon bien-aimé, mets-moi comme un sceau sur ton cœur, mets-moi comme un sceau sur ton bras, car l’amour est plus fort que la mort ».

 

En vérité, un tel amour est celui que nos saints pères et saintes mères ont vécu dans leur relation aimante avec Dieu, un tel amour est proposé à tout homme ou femme dans l’Eglise qui est par vocation d’essence nuptiale. N’est-ce pas cet amour divino-humain qui seul est en mesure d’éradiquer le mur de séparation de l’homme avec Dieu, de l’homme avec la femme, de l’homme avec l’homme, de l’homme avec la création divine. 

Dieu proposerait-il un amour qui serait incompatible et hors de portée de la nature humaine, lui qui nous dit « aimez-vous les uns les autres comme Je vous ai aimé » ?  Nous voici à la croisée du chemin de l’existence, qui choisirons-nous de suivre, le Christ amour absolu qui peut et veut vivifier notre vie entière ou les chemins hasardeux de l’errance entre la multitude des tentations incapables de nourrir notre désir d’une vie qui vaille la peine d’être vécue.

 

Nous n’ignorons pas que le Seigneur nous dit « sans Moi, vous ne pouvez rien faire », certainement l’acquisition de l’état de christ aimant, saint, humble et sage, est hors de portée par nos seules forces humaines, mais nous croyons qu’il est tout à fait possible d’y travailler et de trouver pour une telle ascèse toutes les grâces et aides utiles au sein de l’Eglise orthodoxe. 

 

Au Père, source de l’Amour, au Fils amour incarné et à l’Esprit d’amour, soit la gloire, dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon