Les Saints Pères.
(Matthieu 1, 1 à 25)
Au Nom du
Père, du Fils, du Saint Esprit, amen.
Aujourd’hui, l’Eglise
Orthodoxe nous rend témoins de cette œuvre inouïe pour la raison humaine
ordinaire, qui consiste à voir que le Dieu Vivant et inaccessible vient s’inscrire
sur le livre des générations humaines. Dans le livre de l’Apocalypse, il est
écrit réjouissez-vous de ce que vos noms soient inscrits dans le livre de Vie,
ainsi l’Esprit de toute sainteté nous prophétise toute l’économie divine, la
descente du Seigneur auprès de l’humanité, c’est à dire la Nativité, et
l’ascension de l’homme, auprès de la Divine Trinité, c’est à dire la
déification. Le Dieu Vivant s’incarne au sein de l’humaine condition dans le
temps et l’espace de notre monde, par la médiation de tous les Ancêtres que
l’Evangile nous présente aujourd’hui, et en particulier par celle qui couronne
cette lignée généalogique, Marie qui deviendra la Mère de Dieu..
Mais comment la seule raison
humaine ordinaire pourrait-elle comprendre, le mystère spirituel saint et si désirable,
qui consiste à engendrer l’homme dans le Royaume de Dieu, selon la parole du
Seigneur qui nous dit: « celui
qui croit en moi, fera les mêmes choses que moi et même de plus grandes ».
Eh bien, la naissance de l’homme dans le Royaume pour la vie éternelle est
cette réalité sublime et unique dont parle notre Seigneur, et cette œuvre
divino-humaine nécessite au préalable la Nativité, l’Incarnation de Dieu. Ce
Dieu éternel et Tout-Puissant, naîtra demain parmi nous comme un tout petit
enfant semblable à tout autre nouveau-né, sera adoré par les sages rois mages,
les humbles bergers et la multitude des saints anges, sous le regard émerveillé
et vigilant de sa mère selon la chair, sous le silence et le regard songeur de
celui qui lui servira de père dans l’humanité, Joseph le bienheureux. Mais
déjà, Hérode le suppôt de Satan avec les grands-prêtres et les scribes, rôde
comme un lion rugissant, autour de l’Enfant prophétisé, afin de mettre fin à
ses jours.
Nous voyons Joseph plongé
dans une profonde méditation, comme frappé de sidération et rempli d’incompréhension
devant Marie enceinte, et ne sachant que faire devant un tel mystère, il se
propose de la renvoyer chez elle en toute discrétion. Mais voici que l’ange du
Seigneur lui apparaît en songe et lui ordonne de prendre Marie auprès de lui, et
lui apprend que Marie est enceinte par la grâce de l’Esprit de Dieu et que
l’Enfant qui naîtra d’elle est le Messie d’Israël annoncé par les prophètes,
qui peut imaginer l’état intérieur dans lequel se trouvait Joseph ? La vie
évangélique est donnée pour être incarnée par l’homme et devenir chair de sa
chair, c’est pourquoi nous pouvons comprendre, que nous devons contempler
« l’Eglise–Crèche », comme
une mère spirituelle qui doit enfanter en son sein, l’homme spirituel en vue du
Royaume de Dieu. Ne sommes-nous pas nous aussi songeurs lorsque nous
contemplons ce que Dieu accomplit en nous, avec nous et pour nous ? Dieu
descend vers l’homme, l’homme monte vers Dieu ! Marie est la plus belle icône de l’Eglise et
par conséquent nous sommes aussi Joseph, appelés à épouser spirituellement
l’Eglise corps du Christ, et la garder précieusement dans notre cœur comme un
Don de Dieu. Mais si Marie est celle qui a engendré le Christ unique, l’Eglise
aura pour vocation de nous engendrer à notre tour comme des christs, et cela malgré
tous les Joseph stupéfaits, songeurs voire incrédules qui nous habitent.
Que de fois entendons-nous
des paroles de lamentations, non sur nos péchés, mais sur le fait que nous
n’avons pas de père ou mère spirituels qui pourraient nous conduire par la main
en toute sûreté ; pourtant aucun spirituel n’est plus saint ni plus sage
que l’Eglise du Seigneur, l’Eglise est la mère spirituelle véritable. L’Eglise
est le très précieux lien qui unit toute la généalogie religieuse, spirituelle
et mystique, qui depuis Adam, Eve et nos Ancêtres, nous emmène à la rencontre
du Messie, qui lui-même nous emmène à la rencontre de la Divine Trinité. Nous
pouvons observer que l’ange parle à Joseph en songe, mais il faut que celui-ci
se réveille et accepte pour un temps de ne pas comprendre le mystère qui habite
Marie, pour enfin pouvoir accomplir la volonté divine. Il en est de même pour
nous, tant que nous sommes endormis, nous faisons volontiers des rêves, et
parfois aussi des cauchemars mais plus rarement des « songes visionnaires » au sens évangélique du terme. La seule
manière de nous éveiller et de veiller en Dieu et avec Dieu en nous, pour
accueillir l’Enfant Divin, c’est de cultiver la sagesse des mages, l’humilité
des bergers, la sainteté des anges, de vivre par la foi, l’espérance et l’amour
les promesses divines, que nous transmet l’Evangile de Vie.
Nous ne sommes pas seulement dans
l’Eglise, nous sommes l’Eglise, et seule l’Eglise a reçue de Dieu la vocation
de donner Dieu à l’humanité et au monde, et cela s’appelle la Nativité. Que
nous soyons appelés à être pasteurs, mages ou anges terrestres, nous avons pour
vocation d’incarner et de réaliser les prophéties annoncées, nous nous
inscrivons dans la lignée ancestrale qui certes remonte à Abraham, et au-delà à
Adam et à Eve, mais notre véritable origine remonte à la Divine Trinité
elle-même.
Certes nous pouvons être
troublés devant le mystère de l’Eglise, comme l’était Joseph devant Marie
enceinte, et d’ailleurs les anges, y compris les chérubins et les séraphins
eux-mêmes, ne connaissent pas ce qu’est l’Eglise en esprit et en vérité, ils en
sont les serviteurs obéissants et humbles, et ont choisi d’aimer Dieu et son
Eglise sans en comprendre la véritable dimension divino-humaine. Dans l’Eglise,
le monde angélique reçoit avec nous les croyants, l’enseignement de l’Esprit
Saint autant que cela leur est utile pour accomplir leur vocation, certes les
anges de Dieu sont d’une immense pureté et sainteté, mais pourtant le mystère
de l’économie du salut de l’humanité leur est inconnu. Leur sagesse et leur
connaissance consistent en une obéissance totale à la Divine Trinité, qui les
envoie en mission, par exemple au-dessus de la Crèche, ils sont au service de
Dieu pour le salut de l’humanité, et concélèbrent avec l’Eglise les mystères de
Notre Seigneur Jésus-Christ. Ne
chantons-nous pas : « toi plus
vénérable que les chérubins et incomparablement plus glorieuse que les
séraphins », Marie n’est-elle pas l’une d’entre nous ? Voici donc
le trône-église élevé au-dessus de tous les mondes angéliques, sur lequel la Divine
Trinité désire faire asseoir, l’homme son bien-aimé !
Le Seigneur est venu
librement s’incarner en Marie pour être enfanté à notre monde et à notre
humanité, pour devenir l’un d’entre nous et l’un avec nous ; de même, nous
devons nous inscrire librement dans la lignée spirituelle des Ancêtres et des Saints
qui nous précèdent dans le Royaume de Dieu pour y devenir l’un d’entre eux et
l’un avec eux. Alors, peut battre ensemble comme un seul cœur, la nature
humaine et la nature angélique, la lignée ancestrale depuis l’aube de
l’humanité avec toutes les créatures, et dans ce frémissement vivifiant où
s’unissent l’humilité de Dieu avec l’espérance de l’humanité, peut s’accomplir
ici-bas ce qu’ont annoncé les Prophètes au peuple d’Israël : la venue d’Emmanuel, Dieu avec nous.
Exultons de joie dans
l’Eglise du Seigneur, revêtons-nous de lumière comme d’un manteau, que tout ce
qui vit et respire loue le Seigneur, bénissons-nous les uns les autres, car Il
vient le désiré des croyants, Il est là le bien-aimé, celui que l’humanité et
toute la création attend et espère ardemment, et en vérité IL se révèle à celui
ou à celle qui lui ouvre la grotte d’un cœur aimant, humble et doux. Dieu
s’incarne t-il pour lui-même ? Non, il s’incarne pour être aimé dans tout
petit enfant qui naît parmi nous, pour être aimé dans toute personne humaine
que nous rencontrons, pour être aimé dans l’Eglise afin que l’Eglise donne cet
amour divin au monde. L’Ecriture poursuit : « or, cela se produisit pour que fut accompli cet oracle
prophétique du Seigneur : « voici que la Vierge concevra, elle
enfantera un fils, auquel on donnera le nom d’Emmanuel » ce qui
signifie : Dieu avec nous ».
Que signifie Dieu avec
nous ? N’est-il pas déjà en nous et donc avec nous par Son Image ? Eh
bien, Dieu s’incarne pour accomplir avec nous ce que ni Lui ni nous, ne pouvons
réaliser tout seul, de quoi s’agit-il ? De la Ressemblance à Dieu! De
l’union entre l’image et la ressemblance, ce pèlerinage extraordinaire que
propose Dieu et l’Eglise orthodoxe à notre liberté de dire amen ou non à la
Divine Trinité. Quels mots trouver pour dire l’indicible, l’essentiel et
l’ineffable, pour dire « ce que
l’oreille n’a pas entendu, ce que l’œil n’a pas vu, ce qui n’est pas monté au
cœur de l’homme, mais que Dieu pourtant a réservé pour ceux qui l’aiment » !
Si donc Dieu est avec nous, sommes-nous pour autant avec Lui ? Comment
connaîtrais-je de manière absolument certaine que je suis avec Lui ? C’est
saint Jean qui va me donner la réponse, il écrit : « celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, comment aimera t-il
Dieu qu’Il ne voit pas » ! Comprenons-nous maintenant un peu le
sens profond de la Nativité, la nativité se réalise non seulement lorsque Dieu
naît en moi, mais aussi lorsque le Frère et la Sœur naissent en moi, ici, la
Nativité du Seigneur nous dévoile un peu le mystère indicible de la personne
humaine qui a reçue la grâce d’accueillir en elle, « Dieu et l’homme ».
Que signifie à la
ressemblance ? Cela signifie que maintenant que Dieu s’est incarné pour
nous, nous pouvons commencer réellement à préparer notre naissance au Royaume
de Dieu, notre incarnation spirituelle dans le Saint des Saints céleste, notre
nativité non dans une crèche terrestre, mais dans le cœur du Père Céleste
lui-même. Mais comment ? L’Enfant Divin ne se laisse t-il pas élever par
Marie, Joseph et la Synagogue, de même, cultivons l’enfance évangélique et
laissons-nous élever de la terre au ciel par la Divine Trinité, la Divine
Liturgie et l’Eglise dans laquelle Dieu nous dit l’apôtre : « a déposé infiniment plus que ce que nous
pouvions imaginer ou désirer », alors « éveillé de son sommeil,
Joseph fit ce que l’ange du Seigneur lui avait ordonné : il prit chez lui Marie
son épouse ; et sans qu’il l’eût connue, elle enfanta son fils premier-né,
auquel il donna le nom de Jésus ».
Que signifie éveillé de son
sommeil ? Cela signifie entre autres, que Joseph est sorti du strict cadre
de la Loi mosaïque, qu’il s’est affranchi de la seule lettre qui au mieux
endort et au pire tue toute vie spirituelle, n’est-il pas écrit : « l’esprit est vif, mais la chair est faible », Joseph a
choisi d’obéir et d’accompagner la vie que Marie portait en elle, il a pris
chez lui mais aussi en lui, une réalité qui le dépassait, qui est le mystère de
cette conception incompréhensible pour la raison humaine, il a dit amen à
l’ange du Seigneur, c’est à dire aussi à la personne spirituelle qu’il est lui-même
et donc à la vérité divine qui l’habite, puisque créée à l’image et à la
ressemblance de la Divine Trinité.
De même donc, que Joseph
obéit à l’ange du Seigneur, nous sommes invités à obéir à l’Eglise du Seigneur
pour réunir en nous les pasteurs, les mages et les anges. L’Ecriture sainte
n’est pas un livre qui parle de Dieu, cela signifie que l’Evangile est le livre
de l’homme, l’homme est le premier-né par la grâce de Dieu dans l’ordre de l‘humanité
créée. Dieu aurait t’IL inspiré
l’Ecriture sainte pour se connaître lui-même ou pour y apprendre quelque chose
qu’IL ignorerait ? Cela signifie aussi que tout comme Dieu incarné reçoit
un nom, celui de Jésus, pour accomplir son œuvre du salut dans ce monde,
l’homme recevra son nom pour accomplir son œuvre dans le royaume de Dieu, et
quel sera ce nom ? L’Apocalypse nous dit : « que l’homme recevra un nom que nul ne connaît, sinon celui qui
le reçoit et que ce nom sera écrit sur une pierre blanche » !
N’est-il pas dit, que de joie
dans le ciel parmi les anges de Dieu pour un seul pécheur repenti, une seule
âme sauvée, mais ce qui n’est pas écrit parce que la parole humaine est
incapable de l’exprimer en plénitude, c’est « quelle Joie au sein de la Divine Trinité pour un seul homme qui
devient « un saint » ! La sainteté, voici la grâce
bienheureuse qui couronne l’homme aimé de Dieu, grâce qui fait d’un Théodule,
qui signifie serviteur de Dieu, un Théodidacte, ce qui signifie homme enseigné
par Dieu lui-même, oui, la Nativité du Seigneur est le commencement de cette
œuvre divino-humaine.
Au Père qui envoie son fils
dans l’humanité, au Fils qui emmène l’humanité auprès du Père, à l’Esprit Saint
qui sanctifie l’humanité, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen.
+ Syméon
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