(Luc, 16, 19 – 36)
Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen.
Aujourd’hui, l’Evangile met en scène deux personnages que nous pouvons rencontrer en tout temps et en tous lieux, à l’extérieur ou à l’intérieur de nous-même, le riche et le pauvre.
Le premier enseignement qui nous est donné dans cette péricope évangélique, c’est que la naissance au ciel ou la descente aux enfers, n’empêche ni de voir ni d’être vu, ni d’entendre ni d’être entendu, ni de parler ni de répondre, dans ces lieux où pourtant comme vous pouvez l’imaginer le corps n’existe plus, étrange réalité que celle de l’après mort. Un deuxième enseignement et non des moindres pour notre vie spirituelle dans ce monde, c’est que notre histoire existentielle ne disparaît pas avec la mort, puisque et le riche et le pauvre Lazare sont parfaitement connus par Abraham. Un troisième enseignement est qu’il n’est pas du tout impossible, si Dieu le veut, que quelqu’un puisse être envoyé de l’au-delà vers notre monde pour y apporter un message de Dieu. Il y a ici de profonds mystères que nous ne sommes sans doute pas pressés de découvrir et qui pourtant nous concernent déjà en ce monde, et nous attendent nous aussi le moment venu, lors de notre passage vers le monde à venir.
Nous le savons, le corps entre en corruption et en décomposition, car si le grain ne meurt, il ne porte aucun fruit capable de l’engendrer nouveau « corps incorruptible » en vue de la vie éternelle. Ainsi donc se révèle un premier corps déjà plus spirituel qui est celui de l’âme et c’est celle-ci qui est accueillie par Abraham. N’êtes-vous pas étonné d’entendre dans cet Evangile que depuis l’Enfer, il est possible non seulement d’apercevoir le Ciel, mais de voir la vie qui s’y déroule. N’êtes-vous pas émerveillé d’y voir Abraham, le père des Croyants ? Nous savons que c’est lui qui au chêne de Mambré a donné l’hospitalité à la très sainte Divine Trinité qui lui est apparue sous la forme des trois saints Anges, aujourd’hui, Abraham est aux portes célestes pour y accueillir l’humanité.
Que signifient pour nous, pour notre vie personnelle et spirituelle ces deux personnages, sinon qu’il existe des richesses qui font de nous des pauvres qui risquent de se retrouver dans la Géhenne de feu, et une pauvreté qui de la terre en passant par le ciel nous porte jusque dans le Royaume de Dieu. Nous ne nous arrêterons pas auprès d’Abraham, comme le riche dont parle l’Evangile, quelle que soit la sainteté d’Abraham le père des croyants, mais nous désirons recevoir l’hospitalité éternelle auprès du Seigneur de Gloire lui-même. Prions donc la Mère de Dieu, qui est la splendide Porte Céleste de nous y accueillir. Nous pouvons méditer chacun pour soi et à loisir, sur nos richesses utiles ou inutiles, sur la pauvreté selon Dieu, en nous rappelant que le Seigneur nous dit à travers Marthe, de ne pas nous agiter et qu’une seule chose est nécessaire pour hériter le Royaume de Dieu.
Est-ce à dire que Dieu interdit à l’homme de faire la Fête ? Certes non ! Puisque Lui-Même a organisé un immense Banquet pour le retour du Fils prodigue, qui justement est passé de la mort à la Vie, après avoir mangé des caroubes – qui est la nourriture des cochons – pendant des années, pour enfin discerner l’unique nécessaire qui est de retourner dans la Maison du Père Eternel. Alors, quelle Fête Dieu nous propose-t-il de faire avec nous ? Quel Festin royal veut-il nous faire partager ? Ne sommes-nous pas convaincus que la Fête des Fêtes est la Divine Liturgie et que le beau lieu où le Festin divin est préparé, c’est la sainte Eglise Orthodoxe, dans laquelle et en laquelle seule nous est donnée la nourriture pour la Vie Eternelle.
Dans l’Eglise nous ne sommes pas conviés à mourir de faim et de soif à l’amour, la joie ou la paix, mais uniquement aux fausses richesses caricaturales et artificielles qui n’ont de spirituelles que les apparences et qui voudraient nous faire avaler y compris de force, que ce monde illusoire et stérile quant à l’essentiel, serait le plus désirable. Oui, nous savons que le serpent maudit tient volontiers ce genre de discours arrogant, il suffit de lire le livre de la Genèse.
Au riche qui implore Abraham d’envoyer un Ange vers ses cinq frères pour les mettre en garde contre l’Enfer, Abraham répond qu’ils ont Moise et les Prophètes, qu’ils les écoutent, mais alors, que dirons-nous qui avons non seulement l’Evangile, la Mère de Dieu, les Apôtres, les Saints et les Anges, mais le Christ Lui-même, comme guide infaillible. Oui, comment pourrons-nous justifier notre errance spirituelle ? Hélas, si nous écoutons le monde des pensées qui nous assaillent en permanence plutôt que la Sagesse de l’Eglise, alors comment pourrons-nous acquérir le vrai discernement spirituel ?
Le seul vrai riche, c'est-à-dire le Christ-Jésus, est devenu librement le pauvre des pauvres. Le Seigneur de Gloire éternelle est venu s’asseoir comme ce misérable Lazare au porche de l’humanité, c'est-à-dire à la porte de notre cœur. Alors que nous festoyons volontiers les uns avec les autres, que nous sommes enivrés si souvent par nos propres pensées, repus de nous-mêmes, nous ne Le voyons pas assis là dans l’immense solitude de l’être humain abandonné à lui-même, Lui, le Saint des saints à quémander des miettes d’amour de notre part, quelle tragédie pitoyable nous impose sans cesse le vieil homme persécuteur en nous.
Ne laissons pas le Seigneur assis parterre à la porte de nous-même, mais prions Le de venir s’asseoir sur le trône de notre cœur, et prosternons-nous devant lui dans l’adoration et offrons Lui des chants splendides d’amour et de lumière, n’est-ce pas cela que nous désirons célébrer par la Divine Liturgie ?
Disons O mon Dieu, accorde-nous une prière ardente et fervente, afin que nous puissions intercéder pour les riches et pour les pauvres et pour le salut de cette humanité blessée par les terribles conséquences de la Chute originelle.
Disons O mon Dieu, accorde-nous de nous tourner enfin vers Toi seul, afin que nous puissions T’écouter, Te voir et T’entendre avec la douceur que donne Ton amour, la foi que donne la connaissance de ta vérité, l’espérance que donne la contemplation active de Ta présence parmi nous et cela non seulement dans le sein d’Abraham mais dans le corps et l’esprit de l’Eglise Orthodoxe et en particulier dans la célébration de la Sainte Liturgie.
Disons O mon Dieu, mon Ami éternel, mon Seigneur et Maître, O Jésus, fais qu’en nous le mauvais riche diminue et que le véritable pauvre croisse en esprit et en vérité jusqu’à la plénitude parfaite de la divino-humanité.
Ne soyons pas effrayés, car tout ce que l’Esprit de Dieu donne dans la sainte Eglise du Christ, est l’humble et éternelle Bonne Nouvelle proposée à tout homme et toute femme de bonne volonté, pour accomplir son passage depuis l’humanité par la sanctification jusqu’à la déification, en vue de l’union éternelle avec la Divine Trinité dans le Royaume de Dieu.
Au Père qui a engendré le Pauvre des pauvres, le Christ, au Fils qui a librement assumé d’être pauvre, à L’Esprit qui sanctifie la pauvreté véritable, soient la Gloire dans les siècles des siècles, amen.
+ Syméon
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