Calendrier liturgique, Homélies, Galerie Photo, vie saint Milutin tropaire kondakion, blogs

dimanche 11 décembre 2022

Le thésauriseur

                                                                                     (Luc 12, 16 à 21)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen.



Aujourd’hui, au milieu de nous, le Seigneur dit cette parabole : « Il y avait un homme riche dont les terres avaient beaucoup rapporté, et il se demandait en lui-même : que vais-je faire ? Car je n’ai pas d’entrepôt où loger ma récolte ». 

 

Saint Paul dit dans l’épître de ce jour: «  Jadis vous étiez ténèbres, mais aujourd’hui vous êtes lumière dans le Seigneur », l’homme de cette parabole est toujours dans les ténèbres, pourquoi ? Parce que son âme est attachée passionnément à la terre, Il s’ampute ainsi de sa dimension spirituelle et en oublie sa vocation contemplative qui pourrait le relier à Dieu et à sa propre et véritable humanité. Il reproduit à sa manière l’antique adoration du veau d’or dans le désert. Quel est en vérité, le péché engendré par le veau d’or ? C’est l’adoration des idoles sans vie de ce monde, qui s’opposent à la rencontre de l’homme avec Dieu, de l’homme avec l’Eglise, et par extension de l’homme avec lui-même.  

 

Mais tout comme cet homme se glorifie de ses richesses matérielles, d’autres se glorifient de leurs richesses spirituelles, sans même se demander si ce sont d’authentiques richesses selon la grâce divine. Ainsi le premier comme les autres oublient cette parole : « qu’as-tu que tu n’aies reçu, et si  tu l’as reçu, pourquoi faire comme si tu ne l’avais pas reçu », ailleurs le Seigneur ajoute : « Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille, qu’à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu ». 

 

Pourtant, l’inquiétude est là, à bas bruit dans leurs cœurs, provoquant anxiété et mal-être, le premier n’a comme seul souci que celui de « stocker » ses biens dans un entrepôt, pour pouvoir s’en gaver à volonté. Les autres, se croyant spirituels, finissent par transformer leur âme en musée en l’encombrant de jolis bibelots religieux aussi inertes qu’inutiles. C’est contre eux que l’Ecriture sainte témoigne en disant « vanité, rien que vanité, tout est vanité », car leur agitation furieuse ne porte aucun fruit spirituel.

 

Cet homme richissime se dit : « mon âme, tu as de grands biens en réserve pour de nombreuses années ; repose-toi, mange, bois, réjouis-toi » ! Mais saint Paul encore dans l’épître dit : « discernez ce qui plaît au Seigneur, et ne prenez aucune part aux œuvres stériles des ténèbres » ! L’avenir que se projette cet homme, est tout entier restreint à la jouissance matérielle de ses biens, il ne parle pas non plus de les partager, il se plonge corps et âme dans les ténèbres d’une grande solitude dans laquelle, une « vie renouvelée dans ce monde ne l’interpelle pas, pas plus qu’une possible vie » après la mort ne semble effleurer son esprit. 

 

Le Psalmiste inspiré par l’Esprit de Dieu, nous rappelle : « en vain te lèves-tu tôt, et te couches-tu tard, en vain manges-tu le pain des douleurs, alors que le Seigneur comble son bien-aimé, pendant qu’il dort » ! Que signifie « pendant qu’il dort » ? Cela signifie que ce « bien-aimé » est en état de paix intérieure, d’hésychia réellement vécue, sans inquiétude aucune quant à savoir s’il est riche matériellement ou spirituellement, étant libre de préoccupations inutiles, il devient disponible à la grâce divine et peut commencer à expérimenter avec l’apôtre Paul « ce n’est plus moi qui vit, mais Christ qui vit en moi ». 

 

Et nous les pauvres, réunis ici dans la sainte Eglise au Nom de Dieu, mais sommes-nous de vrais pauvres, quand expérimenterons-nous cette parole « ce n’est plus moi qui vit, mais Christ qui vit en moi » ? Si l’homme dans sa pensée, son âme, son corps, n’est rempli que du désir des seules  nourritures terrestres ou pire rempli de lui-même, où donc, le Christ trouvera t-il un peu de place en lui ? Comment un tel homme, peut-il espérer « ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur, mais que Dieu donne à ceux qui l’aiment » ! 

 

Ne sommes-nous pas venus ici, dans l’espérance de vivre l’expérience réelle du « Christ qui vit en moi », grâce au Don indicible « du Corps et Sang du Seigneur ». Nous avons essayé en amont de nous préparer à recevoir la très sainte « Eucharistie » avec une conscience éveillée et un cœur silencieux tout entier donné au Seigneur, pour « goûter combien le Seigneur est bon et doux » par la foi en sa divine présence. Si le Seigneur vient ainsi vivre en nous, c’est pour nous initier à une ascèse qui  permet la récolte du fruit de la vie sainte et spirituelle : « être son bien-aimé », être l’ami de la Divine Trinité, vivre l’amitié divine, n’est-ce pas là ce que nous espérons obtenir non seulement dans le Royaume de Dieu, mais déjà en prémices dans ce monde.

 

Il nous faut apprendre à discerner avec l’intelligence du cœur, quelle richesse nous devons cultiver sans jamais nous lasser, et cette richesse divino-humaine, ce trésor de grâce éternelle, c’est de cultiver « l’amour de Dieu et du prochain ». Acquérir la « grâce d’aimer », qui a dit que c’est facile, est pourtant l’œuvre spirituelle et existentielle de « l’être orthodoxe ». Ouvrage à remettre sans cesse sur le métier de l’humaine condition, car nous ne serons jamais plus grand que « L’Amour, c’est à dire, la Divine Trinité ». Non, les richesses de ce monde ne sont pas du tout maudites mais bien bénies, si elles sont mises au service de l’humanité au nom de Dieu, et non perverties par des pensées insensées, soumises aux peurs et réactions irrationnelles de nos âmes désorientées et de nos désirs impératifs et insatiables. 

 

Mais, la véritable et unique richesse que Dieu lui-même désire, n’est- ce pas tout simplement « l’homme lui-même », aussi unique que Dieu lui-même, notre vocation n’est-elle pas de devenir par grâce ce que Dieu est par nature, à savoir une « personne déifiée » ! La très sainte nativité approche, alors  préparons-nous à apporter à « L’Enfant Divin, non seulement la myrrhe, l’encens et l’or », mais offrons lui notre corps pour qu’il en fasse son temple, notre âme pour qu’il en fasse sa prière, notre esprit pour le contempler et notre cœur pour l’aimer. Voilà les richesses qui ne seront perdues ni en ce monde ni dans le Royaume de Dieu.

 

Mais notre saint Dieu, que dit-il à cet homme sans intelligence spirituelle : « insensé, cette nuit même, tu vas mourir, et ce que tu as amassé, qui l’aura » ? Le Seigneur nous montre ici, que celui qui est riche à l’image de cet homme, est en vérité dans une grande misère et déjà près de la mort, que son âme est malade et déjà agonisante, pourquoi ? Parce que ce qui nourrit un tel « individu », ce sont de fausses nourritures, incapables de le préparer à la vie éternelle, afin que Dieu le sauve. Ainsi se vérifie cette autre parole du Christ : « à celui qui n’a pas, on enlèvera même ce qu’il croyait avoir », à sa mort, cet homme aura tout perdu en se perdant lui-même, seul ce qui est donné par Dieu durera et ce « Don », n’est ce pas Dieu lui-même, Dieu seul ? 

 

C’est pourquoi saint Paul écrit : « éveille toi, toi qui dors, lève toi d’entre les morts, et sur toi luira le Christ ». C’est à dire, sors de tes modes de fonctionnement morbides et mortifères, cesse de te complaire dans tes richesses matérielles ou faussement spirituelles, libère-toi de tes illusions infantiles et va vers l’unique source de la vie, le Seigneur Christ qui t’illuminera de sa beauté et de sa vérité. 

 

Saint Paul ajoute : « cherchez dans l’Esprit votre plénitude », cette plénitude est-elle difficile à trouver ? Certes non, la réponse est simple, trop simple pour les riches ou ceux qui pensent être riches, surtout spirituellement et selon leurs propres critères, la plénitude de l’Esprit s’acquiert en toute simplicité et vérité dans la sainte Eglise du Seigneur. Toute l’œuvre du salut est réalisée à chaque Divine Liturgie, là « pour nous, avec nous, en nous », cette plénitude est toute entière je le répète, dans le « don du Corps et du Sang de notre Seigneur », auquel devrait nous préparer jour après jour notre ascèse évangélique. 

 

 

Le Seigneur termine cette parabole et dit : « ainsi en est-il de celui qui thésaurise pour lui-même, au lieu de s’enrichir en vue de Dieu ». Que signifie s’enrichir en vue de Dieu ? Cela signifie l’acquisition de « L’Esprit-Saint », ce qui d’après saint Séraphim de Sarov est le « but » de la vie chrétienne et le cœur de la voie spirituelle de l’orthodoxie. 

 

Mais si nous voulons avoir le saint et véritable discernement spirituel pour connaître où nous en sommes dans notre vie en Christ, dans l’Eglise et dans le monde, alors regardons où nous en sommes par rapport aux dons de l’Esprit Saint dont parle saint Paul. Que dit-il, les dons de L’Esprit de Dieu sont : « l’amour, la joie, la paix, ladouceur, l’humilité, la maîtrise de soi… », goûtons-nous déjà un peu de ces fruits célestes ? Voilà les richesses qui jamais ne périrons, mais qui comme des lumières spirituelles vivifiantes nous accompagnerons par grâce divine, jusqu’au don parfait qui est l’amour de Dieu. 

 

Prions Dieu de nous garder libres de toute pensée passionnée, concernant nos éventuelles richesses spirituelles et /ou matérielles, écoutons simplement saint Paul, qui nous invite « en tout temps et à tout propos, à rendre grâce à Dieu le Père, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ ».

 

Au Père Créateur de l’Univers, au Fils qui nous fait cohéritiers de tous ses biens divino-humains et au Saint Esprit qui fait fructifier en nous les richesses célestes, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen. 

 

+ Syméon

 

 

 

 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire