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dimanche 9 octobre 2022

La Cananéenne.


(Mat. 15, 21 à 28)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 

Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à travers l’exemple d’une femme païenne à ne pas nous laisser dépouiller de l’héritage spirituel et matériel que Dieu créateur a déposé dans l’être dès l’origine du monde. De quoi s’agit-il ? D’une histoire d’amour et de souffrance qui unit une mère à sa fille possédée par un démon qui rend son existence invivable, mais ne tombons pas dans le piège inhumain d’un jugement du genre, si elle est possédée, elle doit bien y être pour quelque chose, ce sont des païens donc quoi d’étonnant si leur vie est remplie de ténèbres.

 

Dieu aurait-il crée les uns bons et d’autres mauvais ? Qui peut vouloir adorer un tel Dieu ? Que lisons-nous dans le livre de la Genèse 1, 27 « Dieu créa l’homme à son image, homme et  femme IL

les créa » avec toute la sagesse, la beauté, la grâce et la liberté de devenir une personne divino-humaine accomplie par la pratique volontaire d’une ascèse spirituelle et religieuse, qui pour nous est la voie et la vie orthodoxe.  

 

Cette femme cananéenne est créée à l’image divine, appelée à devenir ressemblante à cette image en elle, elle porte en elle la grâce qui habite et accompagne toute l’humanité et qui la conduit aujourd’hui vers Jésus, qu’elle appelle « Seigneur et Fils de David », ces deux Noms désignent dans la théologie hébraïque, le « Messie » c’est à dire l’envoyé de Dieu prophétisé et qui a pour seule et unique vocation le salut de l’homme, car dit encore le Seigneur « Je ne suis pas venu pour juger le monde mais pour le sauver ». 

 

Voici donc, cette femme qui interpelle Jésus le Messie et lui dit « aie pitié de moi, Seigneur Fils de David, ma fille est fort malmenée par un démon », mais Jésus ne lui répond pas un mot, au point que ses disciples le priaient « fais lui grâce, car elle nous poursuit de ses cris », cette femme et mère crie vers le Seigneur par amour et compassion envers sa fille, elle n’est pas préoccupée de son confort personnel, non, elle vit le drame qu’éprouve son enfant, elle ressent la souffrance de sa fille, là où les disciples impatients demandent au Christ d’intervenir pour que cette femme cesse de les harceler par ses cris. 

 

Jésus répond « Je n’ai été envoyé que vers les brebis perdues de la maison d’Israël », mais la femme prosternée devant lui insiste « Seigneur, viens à mon secours », elle vit dans son âme l’épreuve de la possession et de la souffrance de sa fille avec la même acuité que son enfant, Jésus lui répond à nouveau et dit « il ne sied pas de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens », si nous ne voyons comme les disciples que les seules apparences de ce drame, la parole de Jésus nous apparaitra non seulement incompréhensible mais d’une grande dureté de cœur. Notre discernement partiel et partial ne peut sonder la profondeur de l’enjeu de la relation de Dieu et de cette femme, le Seigneur seul connait l’abîme du cœur de cette femme, il sait en esprit et en vérité que par son attitude d’apparente indifférence, il va renforcer le désir de cette mère d’être exaucée.

 

Alors, cette femme répond au Seigneur Jésus « oui, mais justement les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres », et Jésus l’ayant amenée à exprimer sa pensée lui répond en retour « O femme, grande est ta foi, qu’il t’advienne maintenant selon ton désir et dès ce moment sa fille fût guérie ». La guérison que le Seigneur Jésus veut donner à celui ou celle qui la lui demande, n’est pas le fruit d’un acte magique, le don de la guérison demande d’être incarné par la personne en souffrance et cela suppose un dialogue vrai qui tient compte de l’état réel de la personne éprouvée.

 

Peut-être quelques uns penseront, pourquoi toute cette mise en scène, le Christ ne pouvait-il pas guérir cette fille, juste en lui disant, Je le veux soit guérie ? Bien sûr, qu’il le pouvait même sans lui prêter la moindre attention ! Mais le Seigneur privilégie toujours la rencontre personnelle et si possible un dialogue qui permet de faire émerger la pensée, l’espérance et le désir profond de la personne humaine.

 

Ce qui caractérise cette femme païenne, c’est l’amour et la compassion qu’elle ressent pour sa fille possédée et l’humilité audacieuse mais pleine de confiance envers celui qu’elle appelle « Seigneur, Fils de David », ce drame qui éprouve notre humanité et aussi le beau témoignage qui montre que le miracle peut faire irruption dans l’humaine condition, le miracle n’est pas un droit que Dieu me devrait, mais une œuvre spirituelle qui unit Dieu et l’être humain. 

 

L’Evangile de ce jour montre que pour que la grâce vivifiante puisse s’incarner dans notre humble quotidien, elle demande notre participation réelle qui ne consiste pas à vouloir réaliser des exploits ascétiques, mais à apprendre à mettre en œuvre de manière concrète ici et maintenant, la volonté divine qui nous est proposée dans l’Eglise et par l’Ecriture sainte. 

 

C’est pourquoi, le Psalmiste nous met en garde contre les faux dieux qui rôdent comme des voleurs d’âme à la recherche d’une proie naïve et qui sont « des idoles faites d’argent et d’or, œuvres de la main des hommes, idoles qui ont des bouches et ne parlent pas, des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas », menteurs sans scrupules et idoles déconnectées de toute expérience divino-humaine, de toute référence à Dieu, loups ravisseurs déguisés en moutons passés maitres pour envoûter les cœurs brisés. 

 

Voici donc, cette païenne méprisée par certaines castes de prêtres hypocrites qui se voient volontiers comme des modèles à suivre, réprimandée en plus par les disciples du Christ sous prétexte qu’elle leur casse les oreilles, mais malgré toute cette antipathie agressive cette femme reste debout dans l’espérance, car elle sait par une certitude intérieure qu’elle sera finalement accueillie, écoutée et exaucée par celui que l’Eglise confesse comme le véritable et unique Grand-Prêtre, à savoir notre saint médecin des âmes et des corps, le Christ, elle a ressenti au fond de son être que ce Jésus pouvait et voulait sauver sa fille malade. 

 

Jésus par l’image des petits chiens ne méprise pas cette femme ni aucun être, il désire éveiller celui ou celle qui le souhaite à l’existence d’une nourriture bien plus essentielle que des simples miettes, il se donne comme la véritable nourriture qui seule peut donner la vie éternelle. L’Eglise est le lieu où Dieu invite l’homme à sa table mystique afin de le nourrir à travers la sainte Cène par le Corps et le Sang du Seigneur et Sauveur et le préparer ainsi à accueillir dans le Royaume à venir son Dieu selon cette parole, alors « Dieu sera tout en tous ».

 

L’Eglise a vocation d’être à l’image de cette cananéenne, la voix qui prie et crie vers Dieu de libérer l’humanité de toutes les possessions qui oppriment l’homme et l’empêchent d’aller librement vers Dieu son Créateur. Dieu à travers l’épreuve de cette femme et de sa fille, nous invite à venir le rencontrer quelque soit notre situation individuelle, Dieu regarde notre cœur et notre désir et nous propose d’avancer dans la vie avec Lui. En Jean 14, 1, Jésus nous dit « que votre cœur ne se trouble pas » et en Jean 16, 22 « Je vous reverrai et votre cœur se réjouira »,avec moi vous pouvez être plus grand que vos épreuves existentielles, car votre cœur ne sera jamais dans sa profondeur spirituelle soumis à la fatalité. 

 

Au Père de l’humanité, au Fils devenu homme parmi nous et à l’Esprit qui nous divinise, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

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