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dimanche 5 février 2023

Le Pharisien et le Publicain.

 

(Luc, 18, 10 à 14)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen. 



Aujourd’hui, le Seigneur nous enseigne au sein de l’Eglise, l’attitude bénie par l’Esprit de toute grâce pour sanctifier celui ou celle qui « monte » dans la maison de Dieu et des hommes, pour y faire l’offrande de la prière liturgique ou même personnelle, avec l’espérance d’y récolter abondance de fruits spirituels, selon cette parole « demandez et vous recevrez ».

 

Le Seigneur dit « quiconque s’élève sera abaissé, mais celui qui s’abaisse sera élevé », cette parole de feu spirituel est adressée à chacun et chacune d’entre nous qui « montons » dans l’Eglise pour rechercher la  communion personnelle avec Dieu et une relation bénie avec la communauté des croyants.

 

Quel sera donc, celui ou celle qui s’abaisse avec intelligence du cœur, sagesse et simplicité ? N’est-ce pas celui qui se souvient de cette autre parole du Seigneur, « sans Moi, vous ne pouvez rien faire », l’Ecriture sainte et sacrée donnée par la divine providence à l’humanité, ne fait pas acception de personnes, le Pharisien comme le Publicain sont invités à se nourrir de l’étude et de la méditation de la Torah. Ce que le Christ souligne ici, c’est l’appel à faire œuvre spirituelle dont la base pratique et sanctifiante est la prière, la religion est une œuvre commune dont le témoignage est celui d’une rencontre réelle entre Dieu et l’homme.

 

Le nom des Pharisiens, en hébreu sont des Péruchim ce qui signifie « séparés » non pas du reste des hommes fussent-ils des Publicains considérés comme des «  gens de mauvaise vie », mais appelés à se séparer de l’esprit du monde dans ce qu’il a de superficiel par ses idoles et ses apparences trompeuses, pour rechercher sans cesse la communion en esprit et en vérité avec Dieu et avec les hommes sans porter de jugements extérieurs et souvent faux. Ce qui frappe ici dans l’attitude du Pharisien, c’est qu’il est bien monté au Temple, mais en vérité, il ne parle pas à Dieu, il prend Dieu à témoin de son auto satisfaction, il est dans un monologue à travers lequel, il énumère ses qualités religieuses tout en méprisant tous les hommes qui ne sont pas comme lui.  

 

La lignée des Pharisiens se rapprochent volontiers de celle des « Keduchim », ce qui signifie les « saints », ils ne peuvent donc pas envisager de prier avec ceux qui à leurs yeux ne sont que des « pécheurs » indignes du moindre intérêt et même vus comme des êtres inaccomplis et des hérétiques. Comment les Pharisiens qui d’ailleurs peuvent également exister dans l’Eglise, justifient-ils leur attitude de refus de l’autre qui est différent ? Ils invoquent le témoignage de Dieu lui-même en leur faveur par une interprétation erronée et restrictive de la sagesse de l’Ecriture sainte pour imposer leur vision religieuse, vision qui s’oppose à la conversion intérieure et vivante de l’homme, au profit d’une pratique figée dans une tradition humaine qui ne peut évoluer vers un renouveau spirituel.

 

Dans l’Evangile d’aujourd’hui, le Pharisien qui se considère comme « saint » et qui s’autorise à juger le Publicain, trouve la justification de son esprit critique destructeur dans la parole que Dieu lui-même prononce, à savoir « vous serez saints car moi, Yahvé, votre Dieu, je suis saint », (2 Lev. 20, 26), s’identifiant ainsi à la sainteté divine, il ne ressent aucune compassion pour le Publicain. Il ne voit pas qu’il est non pas séparé au sens biblique pour Dieu, mais qu’il s’est isolé non seulement de la communauté humaine mais qu’il a élevé un mur infranchissable entre lui et ce Dieu qu’il prétend prier.

 

Ce pharisaïsme entraîne un formalisme religieux et une pensée insensée sur la vie spirituelle et la rétrécie à la seule lettre de la loi mosaïque qui finit par étouffer la grâce divine déposée dans la richesse infinie de l’esprit. La lettre seule résonne mais ne trouve aucun écho dans le cœur profond, l’esprit s’enténèbre et ne discerne plus la volonté divine, il s’égare et perd le sens de l’intelligence et de la véritable compréhension de l’Ecriture sainte, limitation qui rend quasi impossible l’accès fécond à la véritable profondeur de l’orthodoxie.

 

Le Publicain « monte » pourtant lui aussi au Temple de Jérusalem, le verbe monter est ici à entendre comme le désir qui habite tout homme et toute femme de bonne volonté et qui l’encourage à une élévation personnelle au sens d’une transfiguration existentielle. Cette montée est celle dont parle le Christ en Luc, en 14, 10 « mon ami, monte plus haut », c’est l’expérience de l’amitié divine qu’en vérité le Seigneur propose à ce Publicain en le disant justifié, et en l’appelant à s’approcher du ciel lui qui prie Dieu depuis la dernière place dans la Synagogue. C’est ce désir là que Jésus voit dans le cœur du Publicain, c’est dans ce sens qu’il le bénit et qu’il le proclame justifié, car ce désir est le premier pas humain indispensable sur le  chemin ascétique qui est celui de la conversion qui mène comme le rappelle saint Paul de  « l’homme psychique jusqu’à l’homme spirituel ».

 

Le Seigneur ne valorise pas l’accomplissement des commandements divins pour eux-mêmes, mais pour ce qu’ils portent comme grâces existentielles inestimables et qui sont ontologiques à la liberté, à la beauté et à la dignité de l’homme crée à l’origine par Dieu. Le Seigneur ne valorise pas plus l’attitude de peur qui étreint le Publicain, car « l’amour bannit la crainte », il souligne simplement sa qualité de modestie qui peut lui permettre de s’enrichir avec raison dans sa quête des biens spirituels réels qui lui manquent aujourd’hui, alors que le Pharisien ne peut pas évoluer puisqu’il est persuadé qu’il possède déjà la plénitude religieuse grâce à sa pratique zélée et pourtant inhumaine de tous les commandements divins.

 

Le Seigneur nous montre quelle est la véritable voie religieuse qui peut porter des fruits divins et en rassasier les affamés et assoiffés de Dieu, cette voie est celle qui unit toujours par la célébration liturgique la « lettre avec l’esprit », le croyant est invité à cultiver l’humilité au sens d’humus spirituel qui engraisse la terre intérieure de son intelligence, il est encouragé à oser s’engager dans une relation divino-humaine équilibrée tournée vers Dieu et aussi vers l’homme.

 

Le Pharisien a raison de ne pas s’identifier au Publicain ou à qui que ce soit d’autre, car Dieu n’est pas à court de créativité et il a créée chaque être humain comme une personne unique éternellement, c’est pourquoi, nous pouvons croire et dire avec conviction que notre « Dieu préfère chacun », il n’y a donc pas lieu de se comparer les uns aux autres, de se jalouser les uns les autres, mais réjouissons-nous là où nous sommes égaux pleinement, à savoir par notre « nature humaine commune » à tous les humains, tout comme la nature divine est commune à la Trinité des Personnes.

 

En Genèse, nous lisons que Dieu dit « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance », nous connaissons donc parfaitement à qui nous devrions avoir naturellement le désir profond de ressembler, cette quête est la vocation éternelle qui habite le cœur de l’homme et palpite dans tout son être, mais pour autant, elle ne s’impose jamais, c’est pourquoi saint Paul peut proclamer sa foi en la « liberté glorieuse des enfants de Dieu »,venons Pharisiens, Publicains ou autres « montons et gravissons la montagne de l’humanité, afin que Dieu couronne l’homme son bien-aimé du don de la déification ».

A notre Dieu Ami de l’homme, Père, Fils et Saint Esprit, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen. + Syméon

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