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dimanche 27 mars 2022

Homélie du 27/03/2022 : La Vénération de la Sainte Croix...

 


Vénération de la Sainte Croix

(Marc, 8, 34 à 9, 1)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à suivre le Christ en acceptant librement de renoncer à nous-mêmes et de porter notre croix, la croix est l’expression générique de tout ce qui est contenu dans notre existence y compris les prémisses de notre résurrection à venir. Saint Paul nous enseigne en Éphésiens. 3, 18 « vous recevrez de comprendre avec tous les saints, ce qu’est la largeur, la hauteur, la longueur et la profondeur » et « vous connaitrez l’amour du Christ  qui surpasse toute connaissance, vous entrerez par votre plénitude dans toute la Plénitude de Dieu », c’est dans ces diverses directions spirituelles intérieures et extérieures à l’homme, que nous emmène la puissance sanctifiante et salutaire de la Croix.


La largeur dont parle saint Paul n’est pas celle dont saint Matthieu en 7, 13 nous dit « la porte large mène à la perdition », cette porte large est celle qui engouffre notre existence dans une multitude d’impasses existentielles, elle est la porte qui s’ouvre sur toutes les hérésies contraires à la révélation véritable de notre Seigneur, cette largeur qui semble être une ouverture sans fin est en réalité une prison qui éteint peu à peu l’élan vital reçu à notre création originelle. La largeur ici nommée par Paul, est celle de la « voie divino-humaine, étroite mais royale » qui est notre Seigneur et qui nous mène en vérité si nous la suivons fidèlement jusqu’à nous-mêmes, par la médiation de l’Eglise orthodoxe.


Pour acquérir par la grâce divine notre véritable vocation à la vie divino-humaine, nous devons apprendre à renoncer à rester des individus coupés de leur dimension spirituelle. Si nous nous détournons de Dieu, de l’Eglise et de nous-mêmes, il nous sera impossible de renoncer à tout ce qui en nous et autour de nous, ne cesse de nous harceler pour nous faire abandonner notre vie et notre voie orthodoxe. C’est pourquoi, la prière personnelle est indispensable pour être en communion avec Dieu, car notre foi est encore faible et vacille au gré de notre vécu, nous nous laissons encore séduire par les tentations du monde déchu, alors qu’en vérité notre cœur profond désire la vie divino-humaine, spirituelle et lumineuse.


La hauteur dont parle ici saint Paul, est le signe de l’humilité véritable qui ne s’élève pas dans les vaines pensées, paroles ou actions, cette hauteur n’exalte pas notre égo en nous susurrant que nous sommes arrivés à des états spirituels de « haute qualité », au contraire elle nous dépose au fond de notre être, là où resplendit la lumière divine, là où danse la sagesse divine, cette hauteur intérieure est l’icône de la hauteur céleste du Royaume de Dieu. Pour un chrétien orthodoxe, la source de son être et de sa vie est la Divine Trinité, qui n’est accessible que par la médiation de notre Seigneur de gloire éternelle qui est notre Maitre absolu. C’est Lui qui le premier a renoncé totalement à rester dans l’immuable sérénité au sein de la Divinité, et le signe parfait de ce renoncement est son « Incarnation » parmi nous.


La longueur dont parle saint Paul ici, peut être méditée comme une métaphore de l’éternité que seul l’amour divin peut rendre habitable à l’homme fini, cette longueur n’est pas une amourette imaginaire et éphémère, elle est celle dont parle le Seigneur lorsqu’il nous dit « celui qui tiendra jusqu’au bout sera sauvé », autrement dit, il s’agit de porter notre croix le mieux possible durant notre existence, la croix ne signifie pas seulement ni tout d’abord épreuve douloureuse permanente, le Seigneur n’a t’IL pas porté sa propre Croix au cœur des aléas de son existence sans murmure ou tristesse depuis son Incarnation, par la Passion et jusqu’à la Résurrection.


La Croix est le visage paradoxal de l’Amour de Dieu pour son prochain qui est l’humanité, l’amour peut-il donner plus que sa propre vie, le Christ n’a t-Il pas donné sa vie pour nous ? Mais là où, cette même Croix n’est pas accueillie, l’errance humaine sans Dieu, va perpétuer le visage tourmenté et défiguré de l’humanité déchue. Le renoncement de soi-même n’est pas le reniement de soi-même, mais si je ne renonce pas au vieil homme, l’homme nouveau ne pourra pas être engendré.


La profondeur dont parle saint Paul est celle dont témoigne le Psaume 130, 1 « des profondeurs de l’abîme je t’invoque, ô Éternel », quel est donc cet abîme au fond duquel l’homme invoque son Dieu, c’est la conscience profonde de l’étendue de sa désolation et séparation avec Dieu, solitude non spatio-temporelle mais spirituelle, abîme qui ne pouvait être comblé que par l’amour divin à la recherche de la « brebis perdue », c’est à dire, par l’Incarnation du Dieu Ami de l’homme et du désir de l’homme d’incarner sa vie et son existence dans une relation personnelle avec Dieu.



La Croix comme visage de l’Amour est une antinomie impossible à contempler selon nos limites humaines, mais avec la grâce divine, le Christ nous invite à renoncer à ce qui est limité, afin d’acquérir la plénitude des Dons de l’Esprit de Dieu. La Croix bénit toutes les dimensions de l’être et de la vie, de l’orient à l’occident, du nord au sud, de la profondeur à la hauteur, et sème ainsi le germe de la Résurrection dans l’humanité.


Dieu seul aime parfaitement, puisque l’Amour est sa nature même, alors comment faire pour apprendre à aimer comme le Christ ? Renoncer au péché qui empoisonne notre âme, nous détourner des illusions et mirages mortifères qui jamais ne pourront engendrer la moindre résurrection. C’est pourquoi le Seigneur nous dit « que sert à l’homme de gagner le monde entier, s’il y perd son âme », l’âme est une création divine et non une œuvre humaine, elle porte l’éternel et non la finitude, elle est crée pour exhaler le parfum de la vie céleste et non la mauvaise odeur momifiée du péché.


Nous savons que la sainte Eglise orthodoxe est le lieu spirituel au cœur duquel nous apprenons à connaître la « hauteur, la profondeur et la largeur » de l’Amour de Dieu pour l’humanité et dont la Croix est le symbole dans toute sa plénitude. Cette croix qui plantée au centre de l’Autel du sacrifice non sanglant, est le trône spirituel sur lequel la Divine Trinité assiste à la célébration de la Divine Liturgie et des Saints Mystères du Christ. Notre sainte et splendide Eglise orthodoxe est l’icône qui unit l’Arbre de vie paradisiaque et la Croix, une seule et même réalité spirituelle et liturgique.


Le Christ nous avertit : « qui veut sauver sa vie la perdra…» quelqu’un parmi nous peut-il se sauver lui-même ? La seule manière de ne pas perdre sa vie, c’est de la vivre dans toute sa plénitude, par la communion avec Dieu en Jésus-Christ, par la célébration de la Divine Liturgie, qui est le resplendissement de la gloire divine et la transfiguration de l’homme. Ce cheminement religieux nous est révélé peu à peu au sein de notre présence vivante dans l’Eglise qui représente elle-même les portes royales par lesquelles l’homme prodigue et racheté, se jette dans les bras du Père Céleste que sont le Verbe et l’Esprit. N’est-ce pas ce que nous révèle l’icône du fils prodigue ?


Le monde est ensanglanté et couronné d’épines depuis la chute adamique, tout comme le Seigneur sera couronné d’épines, mais c’est par la sainte épine spirituelle, c’est à dire la Croix, que Dieu va restaurer l’humanité et la création dans la plénitude de la vie, de la vérité et de la beauté céleste du Royaume de Dieu. La conscience endormie de l’homme sans Dieu, devient le tombeau des « âmes mortes » dont parle Gogol, la paresse spirituelle rend l’homme insensible à l’essentiel qui est « la présence très sainte et sacrée de l’Esprit Saint Consolateur ». L’homme sans Dieu perd sa véritable humanité et finit par s’étioler au sein d’une existence privée de ses racines et vidée de sa sève spirituelle, il devient comme inexistant, en perte d’humanité et sans relation créatrice avec et dans le réel.


La Croix du Seigneur de gloire, n’est pas pour l’humanité un instrument de torture, mais l’arbre de vie qui porte des grappes de fruits savoureux, pour nourrir d’amour, de vérité et de beauté l’humaine condition. Mais il appartient à ma liberté de cueillir le raisin de la grâce qui m’est proposée et d’en faire ma nourriture et ma boisson et ainsi de me restaurer peu à peu, et devenir un «être vivant en mouvement vers le Royaume de Dieu ».


Au Père qui a planté l’Arbre de Vie dans le Paradis, au Fils qui l’a planté par la Croix dans l’Eglise et à l’Esprit Saint qui l’a planté transfigurée dans le Royaume de Dieu, soit la Gloire dans les siècles des siècles. Amen.


+ Syméon




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