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samedi 11 octobre 2025

La Cananéenne.

 


(Matthieu 5, 1 à 1)

AU NOM DU PÈRE, DU FILS ET DU SAIN ESPRIT, AMEN.

 

  

 

Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à travers l’exemple d’une femme païenne à ne pas nous laisser dépouiller de l’héritage spirituel et matériel que Dieu créateur a déposé dans l’être dès l’origine du monde. De quoi s’agit-il ? D’une histoire d’amour et de souffrance qui unit une mère à sa fille possédée par un démon qui rend son existence invivable, mais ne tombons pas dans le piège inhumain d’un jugement du genre, si elle est possédée, elle doit bien y être pour quelque chose, ce sont des païens donc quoi d’étonnant si leur vie est remplie de ténèbres.

 

Dieu aurait-il créé les uns bons et d’autres mauvais ? Qui peut vouloir adorer un tel Dieu ? Que lisons-nous dans le livre de la Genèse 1, 27 « Dieu créa l’homme à son image, homme et  femme IL les créa » avec toute la sagesse, la beauté, la grâce et la liberté de devenir une personne divino-humaine accomplie par la pratique volontaire d’une ascèse spirituelle et religieuse, qui pour nous est la voie et la vie orthodoxe.

 

Cette femme Cananéenne qui est une païenne méprisée par les biens pensants dont le nom signifie en hébreu « pleine d’ardeur » est l’image même d’une mère qui aime son enfant et dont l’âme est toute bouleversée mais aussi remplie d’ardeur pour soulager la souffrance de son enfant, au point d’aller supplier le saint Rabbi Jésus de guérir sa fille, elle sait du fond de sa propre âme que ce Jésus peut la guérir.

 

Mais nous pouvons contempler aussi « notre âme » comme notre enfant spirituel intérieur qui se meurt de ne pas pouvoir accomplir sa vocation qui consiste à louer Dieu, parce que nous l’éteignons sous le poids de nos désirs et passions contraires à notre vocation orthodoxe. L’âme tout comme le corps ou l’esprit doit grandir avec la divine grâce dans l’Eglise et dans la vie concrète, et donc nous devons la nourrir avec la nourriture qui lui convient qui est la louange de Dieu et l’amour du prochain et pour cela célébrer la Divine Liturgie et prier aussi chez nous et partout où nous le pouvons.

 

Marie, Mère du Seigneur s’écrie dans l’allégresse intérieure « mon âme magnifie le Seigneur et mon esprit exulte de joie en Dieu mon Sauveur », si donc nous voulons savoir dans quel état est notre âme, il nous suffira de discerner si nous sommes dans un état de corruption par des désirs et pensées de ténèbres ou dans un état de vraie communion spirituelle avec la source divino-humaine de notre existence à l’image de Marie.

 

Ne cherchons pas à localiser l’âme en nous, c’est stérile et inutile mais voyons dans quel état nous sommes dans notre relation à nous-mêmes, à Dieu, à l’Eglise et à notre prochain, car là se trouve la clé de l’ascèse que nous devons mettre en œuvre pour guérir notre âme blessée par notre « cœur encore trop souvent endurci » qui nous empêche de trouver la communion avec Dieu en nous, cessons de penser que nous avons toujours raison car cela nous empêche de changer en profondeur. Veillons avec

amour sur notre âme que Dieu nous a confiée et qui est notre médiatrice en nous pour aller vers la vérité et la beauté divino-humaine qui nous habite.

 

Au Père créateur de l’âme, au Fils dont l’âme est louange perpétuelle envers son Père et à l’Esprit-Saint consolateur de notre âme, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

 

 

 

 

mardi 23 septembre 2025

Le plus grand commandement.

 


(Matthieu 22, 34 à 46)

                          Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 

 



Aujourd’hui l’Eglise nous invite à la suite des sadducéens et des Pharisiens à demander nous aussi à notre Seigneur et Maître Jésus quel est le plus grand commandement donné dans l’Evangile de vie, mais nous demandons cela en toute humilité pour être édifié dans notre foi et notre pratique spirituelle orthodoxe et non pour embarrasser ou chercher à prendre en défaut par pure vanité le saint Rabbi Jésus.

 

Jésus répond que le plus grand commandement de la loi mosaïque est d’aimer en premier « Dieu de tout son cœur, de toute son âme et de tout son esprit...et il ajoute que le second commandement consiste à « aimer son prochain comme soi même », Jésus pose une réelle identité et même une unité spirituelle entre ces deux commandements, l’un sans l’autre n’aurait aucun sens.

 

Ce qui précède nous incite à rechercher comment réaliser une telle œuvre d’amour divino-humaine dans notre existence concrète ici et maintenant au cœur de notre condition humaine. Ce ne sont pas les « savoirs mondains » ni les « gurus auto-proclamés » qui pourront nous éclairer et nous guider dans notre désir d’accomplir les commandements divins, il nous faudra par une ascèse persévérante œuvrer à la purification de notre cœur afin d’en exclure tout ce qui est contraire à l’amour.

 

Le Seigneur lui-même nous révèle ce que signifie un « cœur impur » et pourquoi il ne peut nous aider à aimer Dieu, soi-même ou l’autre, que dit-il en Mat.15, 18-19 « ce qui sort de la bouche, voilà ce qui souille l’homme...car...c’est du cœur que procèdent les mauvais dessins, meurtres, adultères, débauches, vols, faux témoignages, diffamations », qui parmi nous peut penser qu’un cœur dans cet état chaotique peut aimer Dieu, soi-même ou son prochain ?

 

Ce qui est vrai du cœur, l’est également de l’âme ou de l’esprit, mais nous limitons ici notre commentaire au cœur, il nous faut donc passer par l’ascèse indispensable de la purification de notre cœur et la clef nécessaire pour cela réside d’une part dans la confession de nos péchés et passions contraires à la dignité de l’homme créé à l’image et à la ressemblance de Dieu et d’autre part à notre participation régulière à la Divine Liturgie afin de recevoir le très saint don du Corps et du Sang de notre Seigneur qui nous donne la grâce et la force de nous convertir à la volonté divine.

 

La parole du Seigneur de « s’aimer soi-même » ne consiste pas à être auto-satisfait et encore moins à « s’auto-idolâtrer », mais à accomplir les divins commandements évangéliques qui sont la véritable thérapeutique de l’homme en recherche de la guérison de son cœur, de son âme et de son esprit. Chacun et chacune pourra méditer en soi ce que signifie spirituellement « meurtres, vols, etc ... », pour avancer en esprit et en vérité dans la voie et la vie orthodoxe.   

 

Dieu sait dans quel état spirituel et réel nous sommes, c’est pourquoi il nous dit « sans Moi, vous ne pouvez rien faire », il nous faut donc d’abord et toujours demander la communion avec Dieu pour transformer notre marasme intérieur en vie harmonieuse avec et selon Dieu, avec nous-mêmes et avec notre prochain, et cette œuvre salutaire ne pourra pas se réaliser sans la prière liturgique unie avec la prière personnelle.

 

Au Père plein d’amour pour l’homme son bien-aimé, au Fils incarnation de l’amour divin et à L’Esprit donateur de l’amour par sa consolation, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen

 

+ Syméon   

 

 

 

samedi 13 septembre 2025

Le Festin Nuptial.

(Matthieu 22, 2 à 14)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 

 

Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à venir festoyer à la table royale, sainte et sacrée du Royaume des Cieux pour nous nourrir non par des aliments périssables, mais de la nourriture essentielle qui est Dieu lui-même dans le « Don de son Corps et de son Sang ».

 

L’Evangile dit « un roi fît un festin de noces pour son fils », les noces signifient ici une invitation donnée par un père qui voulait témoigner de son amour pour son fils et partager cet amour avec tous ceux et celles qui étaient conviés au banquet nuptial...mais les invités ne voulurent pas venir.

 

Ce roi terrestre peut être vu comme une icône du Roi céleste qui nous invite sans cesse lui aussi à venir au festin nuptial et liturgique, et combien sommes-nous à décliner l’invitation pour des motifs futiles et si souvent mondains, le fameux « je n’ai pas le temps », j’ai tant de choses à faire comment pourrais-je être disponible et surtout le dimanche, le « seul jour où je ne travaille pas ».

 

A qui est donc promis le Royaume des Cieux ? Aux « pauvres en esprit et aux persécutés pour la justice », ceux dont l’esprit est riche des pensées et œuvres mondaines se ferment donc eux-mêmes le Royaume tout comme ceux qui cultivent l’injustice. De quelle injustice est-il question ici ? De celle qui consiste à persécuter et à laisser persécuter les « croyants qui viennent librement au festin liturgique », et de tous les actes contraires à la liberté religieuse.  

 

Comment ceux et celles qui refusent les invitations aux festins liturgiques et qui empêchent y compris par la force ceux qui veulent y aller, comment pourraient-ils être parmi ceux dont l’Apocalypse en 19,9 dit « heureux les invités au festin de l’Agneau », comment pourraient-ils se rallier à la parole de l’Ange du Seigneur qui en Apocalypse 19, 17 crie « venez, ralliez le grand festin de Dieu » ? Malheurs donc à tous les faux prophètes qui enseignent à se nourrir des hérésies indigestes véhiculées dans les savoirs partiels et partiaux du monde.

 

Mais Dieu a préparé un festin spirituel qui peut restaurer tout homme ou femme dans sa dignité originelle, c’est ce que nous montre la parabole du « Fils prodigue », là aussi, c’est un « père » plein d’amour qui a toujours espéré le retour de son « fils » et que fait-il après la conversion intérieure de son fils, sinon un » grand festin » pour celui qui était en proie à la mort par le péché et qui aujourd’hui ressuscite dans les bras de son père, « mettez-lui une robe blanche et un anneau d’or au doigt, venez et festoyons, car mon fils qui était mort est vivant ».

 

Cette conversion indispensable et permanente de tout prodigue que nous sommes tous plus ou moins nous prépare à participer avec « crainte de Dieu, foi et amour » à la sainte Cène qui elle-même nous prépare à la communion spirituelle du banquet céleste dans le Royaume des Cieux où nous serons nourris d’Esprit à esprit, car alors « Dieu sera tout en tous », ce « tous » étant le « petit troupeau » qui aura suivi l’Agneau de Dieu tel que prophétisé en Luc 12, 32 qui dit avec force « sois sans crainte, petit troupeau, car votre Père s’est plu à vous donner le saint Royaume ».

 

L’Evangile poursuit « le roi entra...aperçut là un homme qui ne portait pas la tenue de noces et lui dit, mon ami, comment es-tu entré ici sans avoir une tenue de noces ? L’homme resta muet », il existe un autre passage de l’Ecriture dans lequel le Christ lui-même interpelle un homme en l’appelant « mon ami, fais ce que tu as à faire », « mon ami » parole extraordinaire d’amour du Dieu-Homme adressée à Juda. Le Seigneur ne dit pas à Juda, va me trahir, non, il lui dit « « fais ce que tu as à faire », c’est à dire, fais en esprit de vérité ce qui est justice pour ton salut, Juda avait donc le choix de choisir entre la vie et la mort. Épreuve redoutable que celle du mystère de l’iniquité qui montre à quelle hauteur spirituelle de grâce l’homme uni à Dieu est appelé à s’élever pour ne pas succomber à la tentation.

L’Evangile poursuit « les serviteurs s’en allèrent par les chemins, ramassèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, les mauvais comme les bons, et la salle des noces fut remplie de convives », voici donc là devant nous, « l’Eglise, salle des noces » dans laquelle sont invités les bons et les mauvais pour festoyer allègrement dans l’Eglise, nous y trouvons différentes sortes de nourritures, par exemple, l’enseignement du Seigneur « Chemin, Vérité et Vie », rien n’empêche un « mauvais » d’être touché par la grâce ou un « bon » d’être déchu de la même grâce, oui, l’ascèse est une nécessité, nous savons que le « Royaume appartient à ceux qui se font violence pour y entrer ».

 

La « tenue de noces » est en relation directe avec l’amour de l’homme pour Dieu et l’amour de l’homme pour son frère, car, il n‘est possible de vivre dans le Royaume que par ce qui dure éternellement, et saint Paul nous enseigne que « l’amour est ce qui reste », ni les savoirs, ni les langues ne resterons, ce qui passe est éphémère et ne peut prétendre à la qualité de « tenue de noces », le Royaume de Dieu n’est pas le royaume du monde des apparences passagères, c’est pourtant paradoxalement « dans le monde sans être du monde » que nous sommes invités à mener le bon combat de la vie spirituelle.

 

Voici que le Roi et Père céleste nous invite à travers les saints, les prophètes et les anges sans cesse au festin eucharistique, mais tout comme la prière personnelle est incomplète sans la prière liturgique, le Seigneur lui-même nous invite à nous rendre dans cette autre salle où nous pourrons participer au festin qui est la communion personnelle avec la Divine Trinité, que nous dit-il ? « si tu veux prier, retire-toi dans ta chambre, c’est à dire rentre en toi-même et reste uni avec toi-même et non désuni, ferme la porte, c’est à dire sois silencieux, veille, vois et écoute, alors prie ton Père dans le secret de ton cœur et dit Lui « notre Père ».

 

La prière du Notre Père donnée par le Seigneur est la réponse parfaite à notre désir de vivre en Dieu, avons-nous vraiment expérimenté que le Fils a sertie Marie sa Mère comme la pierre précieuse la plus désirable au cœur même du Notre Père, où donc ? Dans le verset « que Ta volonté soit faite », ne partage-t-elle pas ainsi avec son Fils Jésus l’obéissance parfaite au Père. Le Seigneur et Fils unique dit « non pas ma volonté, mais la tienne Père » et l’humble Marie dit à l’Archange Gabriel « qu’il me soit fait selon la volonté du Père », humilité indicible du Fils et de sa Mère. Si Marie est ainsi sertie au cœur du « notre Père », c’est pour que nous allions vers son Fils et notre Dieu et Père par sa médiation, elle qui unit le ciel et la terre dans ses saintes entrailles en la personne de Jésus.

 

Que dirons-nous maintenant devant le mystère des deux festins spirituels qui en vérité ne font qu’un ? Nous pouvons dire, « Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi pécheur », non pas dans une sorte d’auto-flagellation morbide et masochiste dont Dieu ne veut pas, mais avec la prise de conscience de cette parole immense de saint Paul « il est grand, le mystère du Christ et de l’Eglise », nous pouvons même paraphraser cette parole et dire « il est grand, le mystère du Christ et de l’homme », la pleine révélation de ce mystère est le trésor de grâce déposé par l’Esprit Consolateur au cœur de l’Eglise, lieu saint et sacré du festin ecclésial et personnel.

 

Au Père qui nous invite au festin des noces spirituelles de son Fils unique, au Fils qui est la véritable Manne vivifiante et à l’Esprit qui gémit en nous de manière ineffable, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon


samedi 30 août 2025

Le jeune homme riche.

 

(Math. 19, 16 à 26)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 


Aujourd’hui, l’Église nous transmet cette parole vivifiante du Seigneur « si tu veux la vie, observe les commandements divins », puisque ces commandements nous sont donnés par Dieu, rencontrer Dieu à travers eux devrait devenir notre priorité existentielle, selon cette autre parole du Christ « vends tout ce que tu possèdes et suis-moi », entendant cela, le jeune homme riche s’en alla attristé, car il avait de grands biens, cette attitude est à l’opposé de celle qui est utile pour suivre le Christ, à savoir « le renoncement », renoncer n’ayant rien à voir avec se renier ou se dépouiller de manière irréfléchie, mais à instaurer une relation d’humanité à travers les biens, tant matériels que spirituels.

 

L’attitude du jeune homme riche est un témoignage qui confirme la parole du Seigneur disant « que sert-il à un homme de posséder le monde entier, s’il y perd son âme », même si, ce jeune homme dit lui-même que depuis son enfance, il met en œuvre la loi mosaïque, qu’il est un Juif pieux et pratiquant, oui, nous pouvons nous aussi comme lui, nous illusionner totalement si nous pensons que la seule pratique extérieure des rites et des savoirs purement intellectuels suffisent pour vivre selon l’évangile de vie et être sauvé.

 

L’Évangile de ce jour, souligne qu’en vérité ce n’est pas la seule « quantité des biens » qui nous freine ou nous empêche de suivre le Christ, mais la qualité de notre relation au Christ et à nous-mêmes, on peut être attaché très fortement aussi bien à peu qu’à beaucoup de biens. La majorité des humains ne roule pas sur l’or, comme dit le dicton populaire, et pour autant ne suivent pas le Christ, ni la grande richesse, ni la petite richesse, ni même la pauvreté matérielle, ne sont un obstacle pour celui ou celle qui désire et qui décide de suivre avec ténacité notre Seigneur. En réalité, le mur de séparation entre Dieu et l’homme, n’est autre que l’homme lui-même, selon le désir profond et le sens qu’il veut donner à son existence, si par exemple, une voie religieuse claire est choisie, il sera possible de se donner les moyens matériels et spirituels de la réaliser.

 

L’Église a reçu de Dieu cette vocation à donner au croyant l’aide spirituelle sans laquelle, il est impossible de cheminer avec le Christ, cette aide fondamentale est basée en premier sur la célébration liturgique qui donne la communion au très saint Corps et Sang du Seigneur. Cette communion essentielle et substantielle est accompagnée par l’enseignement évangélique nécessaire à la compréhension des saints mystères que célèbre l’Église orthodoxe, compréhension qui demande l’union de la lettre et de l’esprit. Saint Paul dans 2 Cor, 3-6 rappelle que la « lettre tue, mais l’esprit vivifie », il ne dit pas que la lettre est meurtrière par nature, mais elle peut le devenir à chaque fois que l’homme se radicalise dans une attitude non purifiée par la lumière de l’esprit.

Pour proposer au jeune homme riche des outils de discernement, le Seigneur lui ouvre un chemin spirituel possible en nommant les causes principales à la source des conflits intérieurs et extérieurs, que dit-il ? « Tu ne tueras pas, tu ne commettras pas d’adultère, tu ne voleras pas, tu ne porteras pas de témoignages mensongers, aime ton père et ta mère et ton prochain comme toi-même ».

 

« Tu ne tueras pas » est le premier commandement cité, tuer est la négation de la vie, c’est une aberration et une perversion de la nature humaine, c’est une réalité irréversible qui ne peut trouver de pardon qu’en Dieu le créateur de la vie, par une conversion intérieure profonde à l’image du fils prodigue, car ce que l’homme a tué comment pourrait-il le restaurer ? Ce drame presque absolu au sein de l’humaine condition, trouve un écho dans le meurtre d’Abel par son frère Caïn, tragédie indicible qui marque comme au fer rouge l’âme et s’incarne au cœur même de la mémoire collective et inconsciente de l’humanité, car l’homme oublie que Dieu ne demande « ni holocauste ni sacrifice humain ».

 

Unir la lettre avec l’esprit, c’est apprendre à unir l’intelligence avec le cœur, et construire ainsi l’harmonie de l’être vivant selon la sagesse divino-humaine, cette quête de l’équilibre est inaccessible à la seule pensée ou aux paroles non suivies d’actes spirituels. L’apôtre Jacques en son épître 5, 6 écrit « vous avez tué le Juste, qui ne vous a pas résisté », ce juste est le Christ, victime innocente de la désunion quasi totale entre la lettre et l’esprit, de la rupture entre le cœur et l’intelligence, qui amplifie les ténèbres de l’homme sans foi ni loi.  

 

Arrêtons-nous un peu sur le dernier commandement que le Christ recommande au jeune homme riche « tu aimeras ton prochain comme toi-même », cette parole est le début, le milieu et la fin de toute l’ascèse orthodoxe, seule la culture de l’amour divino-humain du Seigneur, peut empêcher de tuer, voler, mentir, il ne  s’agit pas ici d’un amour philosophique, pétri par l’argile périssable des sentiments émotifs, des belles paroles superficielles et sans avenir, dont nous savons qu’il ne peuvent pas survivre dans la réalité de la vie concrète.

 

L’amour dont le Seigneur parle trouve son expression qualitative dans le chant du Cantique des cantiques, chant des fiançailles entre l’âme et Dieu, entre l’homme et la femme, écoutons-le qui chante « où es-tu ma bien-aimée, ma colombe, mon unique beauté » ou encore « où es-tu mon bien-aimé, mets-moi comme un sceau sur ton cœur, mets-moi comme un sceau sur ton bras, car l’amour est plus fort que la mort ».

 

En vérité, un tel amour est celui que nos saints Pères et saintes Mères ont vécu dans leur relation aimante avec Dieu, un tel amour est proposé à tout homme ou femme dans l’Église qui est par vocation d’essence nuptiale. N’est-ce pas cet amour divino-humain qui seul est en mesure d’éradiquer le mur de séparation de l’homme avec Dieu, de l’homme avec la femme, de l’homme avec l’homme, de l’homme avec la création divine.

Dieu proposerait-il un amour qui serait incompatible et hors de portée de la nature humaine, lui qui nous dit « aimez-vous les uns les autres comme Je vous ai aimé » ?  Nous voici à la croisée du chemin de l’existence, qui choisirons-nous de suivre, le Christ amour absolu qui peut et veut vivifier notre vie entière ou les chemins hasardeux de l’errance entre la multitude des tentations incapables de nourrir notre désir d’une vie qui vaille la peine d’être vécue.

 

Nous n’ignorons pas que le Seigneur nous dit « sans Moi, vous ne pouvez rien faire », certainement l’acquisition de l’état de christ aimant, saint, humble et sage, est hors de portée par nos seules forces humaines, mais nous croyons qu’il est tout à fait possible d’y travailler et de trouver pour une telle ascèse toutes les grâces et aides utiles au sein de l’Église orthodoxe.

 

Au Père, source de l’Amour, au Fils amour incarné et à l’Esprit d’amour, soit la gloire, dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

 

 

 

dimanche 27 juillet 2025

Qu'est-ce que j'ai appris de la vie ?
"J'ai appris qu'une bougie peut allumer mille bougies. Un homme peut changer une génération.
J'ai appris quel est le plus grand péché : ne pas réaliser que vous vivez dans le péché. Faire le mal en pensant que tu fais le bien.
J'ai appris que quand l'orgueil brille trop fort, toute sagesse devient sombre. Et là où la sagesse manque, la stupidité prévaut.
J'ai appris que le cœur n'est pas vivant s'il ne bat que le sang. Mais si ça pulse l'amour aussi !
J'ai appris que le monde n'est pas conquis par l'épée ou la force. Mais avec amour.
J'ai appris que pointer du doigt peut tuer. Pas seulement celui qui est montré...
J'ai appris que si tu veux que quelque chose soit fait, tu trouveras un moyen. Sinon tu trouveras une excuse
J'ai appris que les bons parents donnent à leurs enfants des racines et des ailes. Des racines pour qu'ils n'oublient pas où se trouve leur maison, et des ailes pour qu'ils n'oublient pas où est le ciel.
J'ai appris que les gens autour de moi peuvent être égoïstes, méchants, jaloux et méchants. Mais de toute façon, il va falloir vivre magnifiquement !
J'ai appris que Dieu ne choisit pas les personnes parfaites, mais il perfectionne les élus.
Ce que j'ai appris jusqu'à présent parce que j'ai encore beaucoup à apprendre ! "

dimanche 20 juillet 2025

La Guérison du Paralytique de Capharnaüm (Mt 9,1-8).

 Homélie du P. Jean Breck


Sixième dimanche après la Pentecôte 2024

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.
Le récit de la guérison du paralytique de Capharnaüm se trouve
dans les trois Évangiles synoptiques, Matthieu, Marc et Luc.
Chaque évangéliste l’a reçu d’une source orale commune, mais
chacun l’a légèrement modifiée, pour accentuer un aspect qui lui
paraissait particulièrement important.
Dans chacune des versions de l’histoire, les évangélistes
mettent un accent crucial sur la réponse de Jésus à l’action des hommes qui ont apporté
le paralytique : « Voyant leur foi, Jésus dit, ‘Tes péchés sont pardonnés’ ».
Il s’agit de la foi, non pas du malade, mais de celle des quatre amis qui l’ont porté sur
une civière pour le placer devant Jésus. L’effort de ces hommes est bien accentué par
saint Marc. Celui-ci raconte en détail la manière dont les quatre amis ont apporté le
paralytique. Trouvant l’entrée de la maison bloquée par la foule, ils sont montés sur le
toit duquel ils ont enlevé quelques tuiles, et par le trou ils ont fait descendre le malade,
le posant devant le Maître-thaumaturge. C’est cet effort, signe d’une profonde amitié
entre le paralytique et les quatre assistants, qui amena Jésus à annoncer à l’homme que
ses péchés ont été pardonnés.
Le paralytique ne dit rien ; il ne demande rien.
C’est par la foi de ses amis qu’il a été guéri, voire sauvé.
Ceci a une immense importance dans nos relations avec autrui. Tous nous sommes
malades, tous nous sommes, dans un certain sens, paralysés. Tous nous sommes
dépendants d’autres personnes, pour nous faire sortir de nous-mêmes et trouver la
guérison dont nous avons besoin. Il arrive assez souvent soit que nous soyons ignorants
de notre maladie spirituelle, de nos fautes et de nos manquements, soit que nous soyons
handicapés par une souffrance personnelle, au point où nous sommes incapables d’en
imaginer une issue, la possibilité d’une véritable guérison.
Une mère vient se confesser à son prêtre et ne peut parler que de son fils, un
adolescent qui s’adonne à des stupéfiants. Une autre femme se présente en larmes
AU SERVICE DES ORTHODOXES DE LANGUE FRANÇAISE
FEUILLET DE ST SYMÉON
N°299 SIXIÈME DIMANCHE APRÈS LA PENTECÔTE COMPLÉMENT 2025
devant l’Évangile et la croix. Son mari, depuis longtemps aliéné de l’Église, souffre d’une
maladie incurable et refuse d’en parler avec l’aumônier de l’hôpital. Puis, un jeune
homme subit un grave accident de voiture. Sachant qu’il sera handicapé toute sa vie, il
tombe dans une dépression si profonde que personne ne peut le consoler. À la
suggestion qu’il prie et demande un rétablissement définitif, il répond par des injures et
sombre dans l’apitoiement de soi-même.
De tels exemples concernent les personnes – et il y’en a beaucoup – qui pour une
raison ou une autre, ne peuvent pas ou ne veulent pas se tourner vers Dieu. Elles sont
comme le paralytique qui est gravement malade, mais qui n’a aucun moyen de sortir
seul de son mauvais pas.
La promesse de l’Évangile, c’est que nous pouvons prier les uns pour les autres, et le
Christ écoutera.
Comme les quatre amis du paralytique, nous pouvons apporter une autre personne
au Christ par notre intercession, et cela sera accordé, la guérison sera accomplie.
« Si vous demeurez en moi, dit Jésus, … vous demanderez ce que vous voudrez et cela
vous arrivera» » (Jean 15,7).
« Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai », dit-Il (Jean 14,13).
Cependant, notre expérience personnelle nous donne l’impression que Dieu n’écoute
pas toujours notre prière. Je prie pour moi-même ou pour un être bien-aimé, et Dieu
semble faire la sourde oreille. Une maladie ou une autre situation de crise se poursuit, et
l’intercession, parait-il, ne sert à rien…
Ceci, pourtant, est une illusion, fondée sur la conviction que la vie terrestre est tout ce
qui existe. En réalité, nous somme nés et nous vivons pour une seule raison. En bonne
santé ou en mauvaise, l’essentiel est de tout remettre à Dieu, dans la ferme conviction
que toute prière sera exaucée, soit dans le présent, soit dans la vie à venir. Il faut se
rappeler que notre existence ici-bas n’est que des prémices, un avant-gout d’une
existence comblée de joie et de gloire, l’espoir d’une existence bénie par une
participation personnelle et éternelle à la gloire du Christ ressuscité.
Le paralytique était béni par la guérison de son corps et de son âme lorsqu’il était
« dans la chair ». Et cela pour que Jésus puisse manifester son autorité de pardonner les
péchés. La vraie guérison de notre âme et de notre coeur, pourtant, aura lieu lorsque
nous, et tous ceux pour qui nous prions, aurons fait le grand passage pascal, de la mort à
la vie, pour vivre « sans honte et sans douleur » dans la lumière resplendissante de la
Face du Christ.
Amen.

samedi 12 juillet 2025

Deux possédés Gadaréniens

 

(Math. 8, 28 à 9,1)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 

 

Aujourd’hui, l’Eglise nous emmène à la rencontre de deux possédés qui vivaient au milieu des tombeaux et d’aspect si sauvage que tous les redoutaient et les évitaient, leur apparence était inhumaine et pourtant ils sont poussés par les démons à la rencontre de Jésus et crient « que nous veux-tu, Fils de Dieu, es-tu venu ici pour nous tourmenter avant le temps » ?

 

Voici donc là, devant nous, deux démoniaques et non pas deux démons mais deux êtres humains qui sont possédés par une horde de démons et rendus incapables par eux-mêmes de demander l’aide du Seigneur, quel paradoxe, ce sont les démons qui reconnaissent Jésus comme le Fils de Dieu et qui viennent le supplier de ne pas les tourmenter avant l’heure, mais de les envoyer dans un troupeau de porcs. Quelle est donc l’heure que les démons eux-mêmes craignent, sinon celle du « Jugement ». « Allez » leur dit le Christ qui par sa seule parole chasse les démons et libère les deux possédés de l’emprise démoniaque qui les maintenaient dans une servitude inhumaine.

 

L’Ecriture ne dit mot sur ce que sont devenus les deux hommes libérés ni sur comment comprendre l’attitude du Christ qui exauce la demande des démons, nous sommes invités ici à prendre conscience du sens des œuvres du Seigneur pour en tirer un enseignement vivifiant pour notre vie spirituelle. Le Seigneur n’exauce pas les démons terrifiants pour eux-mêmes, mais pour l’amour qu’il porte à l’homme quelque soit son état de chute dans lequel il est tombé. Nous voyons avec étonnement et le cœur serré qu’une fois de plus les « gens » avertis du miracle puissant que vient d’accomplir Jésus ne ressentent qu’un sentiment de peur voire de terreur qui engendre le refus d’accueillir Jésus parmi eux.   

 

« Que nous veux-tu Fils de Dieu ? », les démons par cette parole ne se soumettent pas au Christ dans un esprit de repentir, mais ils sont épouvantés par la puissance de la présence divino-humaine de Jésus, ils savent qu’ils ne sont rien devant lui et qu’ils ne peuvent rien contre lui. Les démons ont une nature qui leur est commune et donc, ils savent que Satan a essayé de tenter le Seigneur Jésus à trois reprises sans succès, d’où leur terreur incontrôlable devant le Fils de Dieu. Si donc, nous ne comprenons pas la profondeur de l’œuvre du Seigneur, c’est que le Seigneur selon saint Jean Chrysostome « veille sur chacun et chacune d’entre nous selon l’état spirituel dans lequel nous sommes » et donne avec discernement à chacun et chacune ce qui est le meilleur en tout temps et en tout lieu pour notre salut personnel.

 

En Marc, 1, 24 nous lisons un témoignage similaire qui confirme l’unité consubstantielle de la nature démoniaque, là aussi il s’agit aussi d’un homme possédé d’un esprit impur et qui se trouvait dans la Synagogue, le démon crie dans l’homme possédé vers Jésus « que nous veux-tu, Jésus le Nazaréen, es-tu venu pour nous perdre, je sais que tu es le Saint de Dieu », ainsi la clique diabolique ne peut s’empêcher de reconnaitre la divinité ou la sainteté du Rabbi Jésus, mais que voyons-nous dans la réaction sans intelligence des gens de Gadara comme des Juifs qui étaient présents dans la Synagogue, les premiers supplient le Christ de s’en aller et les Juifs furent « tous effrayés » de la puissance de Jésus, ce « Prophète puissant en œuvres et en paroles » qui parcours Israël et qui montre que le Royaume de Dieu est déjà là avec lui.

 

Si donc, les témoins directs des miracles et de l’enseignement spirituel vivifiant du saint Rabbi Jésus ne suffisaient pas à convertir les hommes et les femmes présents, c’est que comme nous l’annonce le Psalmiste en Ps. 135 « les idoles des nations sont faites d’argent et d’or, elles ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas, ils leurs ressemblent tous ceux qui les fabriquent et qui se confient en elles, etc ... », l’idolâtrie du monde sans Dieu, dénoncée par le Psalmiste est la voie perverse dans laquelle les démons cherchent à entrainer l’humanité.

Si nous rapprochons l’expérience dramatique des deux possédés Gadaréniens avec le possédé Gérasénien, nous voyons la grande similitude des actions et des effets de la possession par les « esprits sous ciel » dont parle saint Paul. Les tentations et attaques pratiquées par les anges des ténèbres se poursuivent aujourd’hui, mais comme le souligne le Père Boris Bobrinskoy dans une homélie de 2005 « elles sont plus perfides, cachées, et se faufilent volontiers dans le brouhaha des médias et dans les scénographies séductrices d’internet » qui déversent nombres « d’infos » au service des idoles frelatées et faussement compatissantes qui vous assomment avec leurs minuscules petits conseils pour vous guérir du passé douloureux, vous protéger du présent et vous assurer un avenir radieux.

 

L’Ecriture sainte nous rappelle que tout ce méli-mélo chaotique décrit plus haut n’est que « vanité, rien que vanité, il n’y a en tout cela rien de nouveau sous le soleil », le monde mondain préfère se détourner du Maitre divino-humain de la sagesse et continuer à s’extasier devant les ridicules séances du Net. Saint Pierre dans son épître affirme que « le démon est comme un lion rugissant qui rôde, cherchant qui dévorer », c’est pourquoi, dans le rite du saint Baptême orthodoxe le prêtre chasse les démons par le Nom du Christ et demande avec insistance au futur baptisé « renonces-tu à Satan, à ses anges et à toute sa pompe » ?

 

Les deux possédés Gadaréniens et le possédé Gérasénien vivent une expérience similaire, dans les deux situations les possédés sont dépouillés de leur « humanité » et « animalisés » leur aspect terrorise ceux qui les croisent, leur solitude est extrême, leur misère est totale, ils sont mis au ban de la religion et de la société, et ne trouvent de lieu habitable que dans les déserts ou les cimetières parmi les morts qui eux aussi sont plus ou moins des oubliés. Ces lieux où aucun être humain vivant ne devrait habiter, ni dans la vie sauvage du désert ni dans la proximité des tombeaux.

 

En Marc 9, 18 nous lisons qu’un père s’est adressé à Jésus pour lui dire « j’ai demandé à tes disciples d’expulser l’esprit muet qui a pris possession de mon fils, mais ils n’ont pas pu », le Seigneur répond que ce démon ne peut être chassé que par le « jeûne et la prière », cela est vrai de beaucoup de cas de possession diabolique, le monde sans Dieu dit que tout cela ce sont des vieilles lunes auxquelles, ne peuvent croire que les naïfs ou des religieux attardés liés par leur obscurantisme d’un autre temps.

 

Ne sommes-nous pas, plus ou moins tentés à temps et à contre temps par toutes sortes de désirs qui nous travaillent en nous et autour de nous, le Seigneur lui-même nous appelle à la vigilance, n’est-ce pas cette veille qui est au cœur de la prière du Notre Père où nous prions Dieu de « ne pas nous laisser succomber à la tentation...mais de nous délivrer du Malin », c’est donc bien Dieu seul qui peut nous sauver et nous délivrer de l’assaut récurrent contre celui que nos Pères saints nomment « le Malin, menteur et père du mensonge », la possession est le signe manifeste du mensonge mortifère qui voile notre « discernement des esprits »pour nous entraîner dans les ténèbres du péché.

 

Les démons crient au Seigneur « es-tu venu ici pour nous tourmenter avant le temps », de quel tourment parlent-ils ? De celui de la « Vérité qui libère l’homme » qui réduit à néant toutes les apparences et toutes les illusions diaboliques, qui découvre la nudité misérable et la faiblesse des démons qui en vérité ne sont rien et ne peuvent rien, car nous savons avec certitude par la foi orthodoxe que « pas un seul cheveu ne tombera de notre tête sans la volonté du Père ».

 

 

Satan est non seulement « menteur et père du mensonge », il est aussi le grand hérétique parmi les anges, celui qui susurre que l’homme étant comme Dieu tout lui est permis sans Dieu, avec de telles pensées empoisonnées il œuvre dans le but de séduire les âmes et instiller le poison  du doute afin que disparaisse toute religiosité et spiritualité tournée vers Dieu.

 

Le Christ est la «  Vérité » et il propose à l’homme de se nourrir de cette vérité pour acquérir la parfaite sagesse créatrice, qui lui permettra d’être une personne libre et spirituelle, une personne nouvelle engendrée par l’amour, la grâce et la lumière divine. Satan est le grand hérétique, l’Anti-Christ, celui qui essaye sans cesse d’inoculer le poison mortel du péché dans le cœur des hommes, il ne cesse de tenter l’humanité depuis les jours d’Adam jusqu’à aujourd’hui.

 

Le Christ est la « Vie » et il propose à l’homme cette vie en plénitude non seulement dans ce monde mais pour l’éternité, car comme le dit saint Irénée de Lyon « la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant ». Satan est la puissance maléfique et mortifère, qui pour nous tromper n’hésite pas à mettre les masques de la séduction ténébreuse, et là où Dieu nous donne la vie, Satan veut nous entrainer vers la mort.

 

Le Seigneur s’adresse aux possédés comme à des hommes et non comme à des possédés, il voit à quelle profondeur de souffrance, de solitude et de désespérance sont réduits ces « hommes créés à son image et à sa ressemblance », Dieu n’est pas absent de la vie humaine et de ses réalités, ces hommes possédés ont pourtant trouvé dans leur malheur extrême, malgré la possession démoniaque un passage sûr et providentiel qui les a mené au Seigneur.

 

Le mystère de l’homme est un abîme que seul l’esprit unit à l’Esprit peut sonder et connaître, les démons déchus n’ont aucune conscience de la « profondeur, de la largeur, de la hauteur et de la longueur de l’amour de Dieu pour l’homme », la vie liturgique ecclésiale et la voie de la prière personnelle suivie et pratiquée avec persévérance est la meilleure des défenses contre les ennemis de Dieu, de L’Eglise et de l’homme ou de la femme de bonne volonté.

 

Au Père qui a expulsé Satan du Paradis, au Fils qui l’a vaincu et à l’Esprit qui veille sur nous, soit la gloire, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

 

 

 

 

 

 

 

 

dimanche 6 juillet 2025

La Foi du Centurion.

 

(Matthieu 8 : 5 à 13)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen.

 

 

Aujourd’hui, notre sainte Eglise s’émerveille avec le Seigneur de la Foi cordiale et simple dont témoigne un  centurion romain hétérodoxe et païen, qui s’adresse au Rabbin Jésus pour lui demander la guérison de son fils. Cela se passe à Capharnaüm, qui signifie la ville de Nahum, Nahum est aussi le nom d’un grand prophète qui annonce avec beaucoup de vigueur la volonté divine, qui appelle à la repentance du cœur en profondeur et à la conversion de l’esprit, à l’humaine métanoïa nécessaire de notre existence sans laquelle aucune vie religieuse ni guérison spirituelle ne sont possibles. 

 

Dans Proverbe 12, 18 nous lisons « la langue des sages apporte la guérison », mais qui est donc un tel sage aux yeux de Dieu ? C’est ici ce centurion qui fait figure de sage, pourquoi ? Parce que comme le dit encore Proverbe en 9, 8 et 9 « reprends le sage  il t’aimera » et « donne au sage, il deviendra plus sage », les sages sont à l’opposé des insensés dont Mathieu en 11, 25 dit « tu as caché ces choses aux sages », c’est à dire aux sages auto-proclamés, ces « choses » ce sont les œuvres divines accomplies depuis le commencement de la Création et dont la guérison aujourd’hui devant nous du fils du centurion est un témoignage. Quelle est la sagesse du centurion ? C’est de s’adresser avec foi et simplicité, au Rabbi Jésus auquel il se remet en toute humilité et confiance pour son fils malade.

 

Dans Proverbe 3, 7 nous lisons encore « ne sois pas sage à tes propres yeux » et saint Paul nous enseigne

dans l’esprit du Seigneur à méditer cette parole « se vantant d’être sages, ils dont devenus fous », et de plus en 1 Corinthiens. 4, 10 « vous êtes sages en Christ », n’est-ce pas ici même ce que nous voyons par l’attitude du centurion ! Si les sages le sont par la grâce efficiente du Christ et de la sève spirituelle de l’Ecriture, qui donc s’étonnera de ce que peut accomplir en plénitude la parole du « Verbe source de la sagesse des sages », selon cette autre parole à « Dieu appartient d’accomplir même l’impossible ».

 

« Je vais aller le guérir » dit le Seigneur au centurion, le Seigneur n’est mû que par l’amour pour cet homme et son fils souffrant, il ne cherche pas à savoir pourquoi le fils est paralysé. Simplement, « Jésus aime le centurion et son enfant paralysé, tout comme il aime chacun et chacune d’entre nous ». Aimer est pour le Seigneur, le cœur de toute son œuvre pour sauver l’homme. Le Christ est dans « l’intelligence du cœur », à l’écoute du centurion et de sa prière, comme il est à l’écoute de chacun d’entre nous, si nous décidons dans notre liberté personnelle de faire appel à Lui. Le Seigneur ne se livre pas à une discussion philosophico-théologique au sens universitaire qui se limite à une approche ratio-intellectuelle, il laisse se dire la « foi » du centurion qui permet d’engendrer le processus et le miracle de la guérison.

 

Nous pouvons voir dans ce fils malade, une métaphore de notre propre souffrance qui engendre notre paralysie spirituelle, le «vieil homme » en nous ne cesse de s’opposer à notre désir de guérison, et tout comme ce centurion nous savons que sans la grâce divine, il nous est impossible de convertir notre cœur blessé par nos épreuves existentielles. Le vieil homme en nous est né avec la chute d’Adam dans le Paradis, il est en nous la « cristallisation du péché » qui s’oppose à la vie et à l’être en plénitude. Le vieil homme est pétrifié dans ses habitudes et ne supporte aucune nouveauté, il reste bloqué dans son inertie et s’interdit ainsi à lui-même de faire l’expérience véritable du « mouvement, de la vie et de l’être » telle que proposée par Dieu dans l’Eglise et dans notre vie personnelle au cœur même du monde.

 

L’Ecriture sainte nous dit que le centurion est allé vers le Christ pour lui dire : « Seigneur, j’ai à la maison mon fils atteint de paralysie, et qui souffre beaucoup ». Le Seigneur l’accueille, le regarde et l’écoute, mais reste libre du poids inutile de l’émotivité psychique qui empêche habituellement les hommes d’agir de manière juste et avec discernement. Le Seigneur est pleinement présent et ressent de l’intérieur la compassion du centurion pour son fils ainsi que la souffrance silencieuse du fils paralysé. Le Seigneur s’émerveille de la foi du centurion et décide d’y répondre, en disant : « Je vais aller le guérir ». Ici, le centurion intercède pour son fils, mais Dieu ne nous a t-il pas faits « centurions spirituels » pour intercéder les uns pour les autres dans l’Eglise pour notre guérison et celle du monde.

L’Eglise nous remémore aujourd’hui l’exemple vivifiant de ce centurion, afin que nous puissions nous en inspirer, car nous avons vocation à intercéder auprès de Dieu avec « foi, espérance et amour » pour que l’humanité puisse se libérer de ce qui la paralyse dans son « corps, son âme et son esprit ». Les malheurs du monde, le chaos des dictatures, les failles et blessures provoquées par les attitudes inhumaines, ne peuvent trouver leur guérison véritable sans vie spirituelle personnelle et ecclésiale, pour irriguer et vivifier le cœur des hommes à travers la prière et l’intercession des uns pour les autres.

 

Devant la proposition du Christ de venir guérir le paralytique chez lui, le centurion répond : « Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole, et mon fils sera guéri ». Pourquoi se dit-il indigne d’accueillir le Seigneur sous son toit ? Parce que en tant que « païen », il ignore qu’il a été crée à l’image et à la ressemblance d’un Dieu, qui est Créateur et Père de l’humanité, mais sa foi en Jésus ce prophète charismatique va lui permettre d’entrer peu à peu en lui-même, pour accueillir  avec confiance la grâce divine.

 

Ce centurion avant de rencontrer celui qu’il appelle « Seigneur », avait entendu parler de lui, il a alors « cherché et il a trouvé, il a demandé et il a reçu, il a frappé et Dieu lui-même lui a ouvert ». Il a ainsi pu expérimenter en esprit et en vérité que « prier, c’est ne plus être seul », ce centurion a été béni et guidé par la divine providence. La réputation de Jésus, comme prophète-guérisseur était arrivée jusqu’à lui, le centurion croyait sans hésiter que celui qu’il appelle là devant nous « Seigneur », peut accomplir même l’impossible et d’une seule parole guérir son fils, qui gît-là paralysé sous nos yeux, n’est-ce pas ce qui est arrivé ! 

 

L’Evangile nous dit encore : « A ces mots, du centurion, Jésus fut dans l’admiration et il dit à ceux qui étaient là : en vérité, je vous le dis, chez personne en Israël je n’ai trouvé pareille foi », et IL ajoute : « c’est pourquoi, beaucoup prendront place au festin du Royaume des cieux avec Abraham, Isaac et Jacob, alors que ceux qui étaient les fils naturels du Royaume des cieux seront jetés dehors ». Cette affirmation du Christ devrait nous faire méditer, comme Marie « toutes ces choses dans notre cœur », nous, qui sommes d’après saint Paul, « les enfants lumineux de l’Eglise ».

 

L’Eglise est la maison divino-humaine, dans laquelle se rencontrent la Cour Céleste, c’est à dire la Divine Trinité, la Mère de Dieu, les Saints et les Anges, et la cour terrestre, c’est-à-dire chacun et chacune d’entre nous. L’Eglise est ce lieu béni par Dieu et par les croyants, dans lequel à travers la célébration de la Divine Liturgie et des saints Offices religieux, nous pouvons acquérir l’expérience concrète, de la « foi, de l’espérance et de l’amour », envers Dieu et au service de l’homme.

 

Qui parmi nous, n’a pas à eu à un moment ou un autre besoin dans son existence, de la présence aimante et de la prière d’un « centurion spirituel », lorsque les épreuves de la vie sont trop fortes pour s’en sortir tout seul ? Seuls les vaniteux imbus d’eux-mêmes, pensent qu’ils n’ont besoin de rien ni de personne, mais l’homme humble sait qu’il ne peut rien pour se sauver lui-même. C’est pourquoi en tant que   « chrétien orthodoxe » je suis par vocation un « intercesseur » pour toute l’humanité, et l’apôtre Paul nous rappelle « que la foi est agissante par l’amour et la compassion ». Dans l’esprit de Paul, l’amour parfait, c’est de ne rien exiger pour soi-même, ceci devrait être le véritable visage de l’Eglise. C’est pourquoi, la prière liturgique commune, qui nous réunit ici aujourd’hui, ne peut être qu’un don spirituel libre des uns pour les autres, des uns avec les autres, afin que nous puissions bénir ensemble, l’humanité et toute la création.

 

Alors que veut donc nous enseigner le Christ, en magnifiant et en louant ainsi la foi du centurion ? Sinon nous encourager à cultiver en nous avec humilité, la confiance absolue en Lui, le médecin de nos âmes et de nos corps. Il désire transformer nos doutes, nos peurs en foi inébranlable en Lui, en foi capable de déplacer les montagnes psychiques, intérieures ou extérieures qui paralysent notre quotidien. La « foi comme Don de Dieu est universelle », ce qui la différencie d’une personne à l’autre, c’est la relation personnelle que chacun met en œuvre envers et avec Dieu pour qu’elle puisse se révéler avec le maximum de plénitude.

Acquérir la « foi qui peut transporter et transformer nos montagnes intérieures », peut être reçue comme un don dans l’Eglise, par la participation liturgique régulière, à travers laquelle, nous pouvons apprendre à contempler notre Seigneur à l’œuvre au service de l’homme, son bien-aimé. La « foi » est un Don de l’Esprit Saint et l’Esprit de Dieu est à l’œuvre dans l’Eglise du Christ, la foi ne se donne pas au monde des apparences où règne la corruption, elle ne peut être reçue que par celui qui désire vraiment vivre le mystère spirituel de l’Eglise et qui croit en Dieu.

 

Le mystère de la foi et de la guérison spirituelles, ont tous deux comme source, l’Amour de Dieu envers l’humanité, nous croyons que la guérison essentielle est premièrement spirituelle, mais rien n’empêche le Seigneur de donner aussi la guérison corporelle, comme en témoigne l’évangile de ce jour. C’est pourquoi L’Eglise, qui est le corps du Christ et le temple de l’Esprit Saint, a vocation d’être d’abord « l’humble servante » de l’humanité. Le chrétien orthodoxe est donc celui qui intercède dans l’Eglise, afin que Dieu accueille toute personne qui crie vers Lui et espère entendre : « Je vais te guérir ».

 

Puis le Seigneur dit au centurion : « va, et qu’il t’advienne selon ta foi ! Et à l’instant même le serviteur fût guéri ». La foi du centurion est telle qu’il n’y a pas de distance entre sa demande de guérison pour son fils et l’accomplissement de cette guérison. Que Dieu nous accorde une telle « foi » par sa divine grâce et la prière de « notre ami », le centurion évangélique.

 

Le fou juge, punit et détruit et cela sans réfléchir, le fou est celui qui se croit sage à ses propres yeux, mais le sage accueille, regarde et écoute dans le silence et l’intelligence du cœur avant d’agir selon Dieu et avec Dieu pour restaurer l’homme dans sa dimension divino-humaine. Qui est ici le fou ? C’est l’homme sans Dieu et sans l’Eglise, l’homme sans Dieu et sage à ses propres yeux, devient aussi un homme aveugle et sourd, une caricature déformée de sa beauté originelle crée par Dieu. Et qui est pour nous l’homme de Dieu me direz-vous peut-être ? C’est « l’homme ou la femme » dont la vie et l’existence est tournée vers Dieu, n’est-ce pas cela devenir orthodoxe pour nous, prenons-nous conscience de ce que signifie « être orthodoxe » ? Pour nous, orthodoxes, il « n’existe qu’un seul et unique Sage qui est notre Seigneur Jésus-Christ ».

 

Si nous croyons cela, alors le Christ se révèlera à nous et nous aurons le désir naturel de lui ressembler, en partant de notre humanité, oui, tels que nous sommes, pour nous sanctifier avec l’aide de l’Eglise et croire que nous sommes concernés par cette parole qui affirme que  « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne dieu », apprendre peu à peu à vivre selon l’ascèse évangélique. Si donc, nous désirons la sagesse en « esprit et en vérité », nous devons demander pour recevoir, chercher pour trouver, frapper pour que s’ouvre la porte de la communion avec l’Esprit Saint qui nous donnera comme nous l’enseigne le Christ, lui-même  « la connaissance de la vérité qui nous rendra libre ».

 

L’Evangile n’est pas un manifeste en faveur du chaos des esprits, ni un roman à l’eau de rose dans lequel se noient les discussions de comptoirs ou une émission téléguidée pour tirer l’humanité vers le bas. La vie et la voie orthodoxe ne béniront jamais les faux-prophètes qui agissent dans les ténèbres de leurs âmes, et cela au sein même parfois de notre très sainte Eglise. L’Evangile est le livre de la « vie divino-humaine qui peut et veut engendrer l’homme dans l’amour spirituel, dans la beauté lumineuse qui transfigure et dans la sainteté qui sont l’accomplissement et le couronnement de notre vocation orthodoxe ».

 

Au Père qui nous fait Don de la Foi, au Fils qui nous guérit par Amour et à l’Esprit Saint qui nous garde dans l’Espérance, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

 

 

 

 

 

 

 

vendredi 27 juin 2025

Les lys des champs

 

Homélie du Père André Jacquemot
Troisième dimanche après la Pentecôte


Homélie sur Rm 5,1-10 ; Mt 6,22-33
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit,
Nous sommes aujourd'hui le troisième dimanche après la
Pentecôte. Les deux dimanches précédents, nous n'avons pas
célébré la liturgie dans cette communauté : notre dernière liturgie était celle de la Pentecôte. Entre-temps, il y a eu le premier dimanche, qui était la fête de tous les Saints, et le deuxième dimanche où l'on fêtait encore les Saints, mais plus spécialement les Saints locaux, c'est-à-dire les Saints de la terre russe pour ceux qui sont liés à la Russie, les Saints qui ont brillé sur la Sainte Montagne pour ceux qui sont moines au Mont Athos, et plus généralement les Saints de la terre ou l'on vit.
Nous sommes donc entrés dans le temps après la Pentecôte qui est, on peut dire, le temps de l'Église, le temps dans lequel nous faisons fructifier les dons reçus pendant cette période unique de Pâques et de la Pentecôte, cette période où les principaux
mystères de Dieu ont été accomplis. Maintenant nous en recueillons la grâce, et il nous appartient de la faire fructifier. Le temps après la Pentecôte est le temps pour faire fructifier la grâce.
C'est pourquoi aujourd'hui, dans l'Épitre aux Romains, saint Paul nous dit : « Frères, étant donc justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, à qui nous devons d'avoir eu, par la foi, accès à cette grâce, dans laquelle nous demeurons fermes » (Rm 5,1-2). L'une des grâces que mentionne ici saint Paul est d'être réconciliés, d'être en paix avec Dieu, et cela nous est acquis par le Seigneur Jésus-Christ. Car c'est par Lui seul, il faut toujours le rappeler, et saint Paul le précise bien, que nous avons accès à cette grâce. C'est par Jésus-Christ que nous avons accès à Dieu, c'est par Lui que nous pouvons même prier et nous adresser au Père.
Et Paul ajoute : « Cette grâce dans laquelle nous demeurons fermes ». II nous appartient de garder la fermeté de la foi, pour vivre dans la perspective du Royaume, le Royaume qui est annoncé et qui s'actualise déjà, qui est déjà présent parmi nous, déjà présent dans notre coeur. Le Royaume qui est l'objet principal de la prédication du Seigneur. Le Seigneur a souvent prêché le Royaume, et tout particulièrement dans le Sermon sur la Montagne.
L'Évangile d'aujourd'hui est justement tiré du Sermon sur la Montagne. Nous venons d'entendre ce passage que tout le monde connait bien : « Ne vous inquiétez pas pour votre vie, de ce que vous mangerez ; ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus, La vie n'est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ? » (Mt 6,25). Dans un autre passage de l'Épitre aux Romains, saint Paul dit aussi : « Le Royaume de Dieu n'est
pas dans le manger et le boire : il est Justice, Paix et Joie dans l'Esprit-Saint » (Rm 14,17). II ne faudrait pas en conclure trop rapidement que l'on peut vivre sans se préoccuper de ces considérations matérielles. Ce serait aller un peu vite de dire que l'on peut vivre sans nourriture et que l'on peut se passer de vêtement. Mais le Seigneur remet les choses à leur juste place : « Cherchez premièrement le Royaume de Dieu et sa Justice, et
toutes ces choses vous seront données par surcroit »(Mt 6,33). Toutes ces choses, bien sûr, sont nécessaires. Allez dire à ceux qui n'ont rien, qui sont démunis, qui n'ont pas de quoi manger, qui n'ont pas de quoi se loger, allez leur dire que tout cela ne sert à rien : c'est impossible. Ces besoins matériels vitaux doivent être pris au sérieux, nous en avons la responsabilité pour nous-mêmes, et aussi pour les autres. Dieu sait que cela est
nécessaire, et Il nous donne beaucoup, et nous avons à gérer tout ce qu'Il nous donne.
Mais notre première préoccupation doit être le Royaume de Dieu et sa Justice. Le Seigneur précise bien : Cherchez premièrement. Cela ne veut pas dire que rien d'autre n'a d'importance, mais la quête du Royaume de Dieu et de sa Justice doit venir en premier.
Alors, pour entrer dans cette perspective, il convient de nous convertir, de changer notre regard, de réorienter notre regard. C'est pourquoi, dans l'Évangile d'aujourd'hui, le Seigneur commence par dire : « L'oeil est la lampe du corps » (Mt 6,22). II parle ici de l'oeil corporel, de l'organe de la vue, mais il s'agit aussi d'autre chose. Car qu'est-ce qui est notre lampe, qu'est-ce qui éclaire notre vie, qu'est-ce qui nous donne le discernement ? C'est la foi.
En effet, selon saint Paul : « La foi c'est d'avoir le regard tourne vers les choses invisibles qui sont le fondement des choses visibles » (He 11,3). Savoir tourner son regard, voir ce que l'on n'a pas l'habitude de voir, ce qui ne tombe pas sous nos sens immédiats, mais qui pourtant soutient tout ce qui existe. Saint Paul dit encore dans l'Épitre aux Hébreux : « Rejetons tout fardeau et le péché, et courons avec persévérance dans la carrière qui nous est ouverte, ayant le regard sur Jésus, le chef et le consommateur de la foi (ou l'aboutissement de la foi) » (He 12,1-2). La foi oriente notre regard vers le Seigneur, le Christ.
Dans cette perspective, le vêtement n'est plus seulement une nécessité pour se protéger du froid, ou de la chaleur, ou pour la protection de la pudeur, qui est un autre aspect important du vêtement. Le vêtement est aussi un symbole, il a une signification. D'ailleurs, ceux qui font la mode savent bien que le vêtement est moins conçu pour protéger des effets du climat que pour paraitre. Certes, dans la mode il y a beaucoup de
vanité et de futilité. Mais malgré tout, le vêtement a aussi cette fonction de représenter, de signifier. C'est pourquoi le Seigneur nous dit : « Considère comment croissent les lys des champs: ils ne travaillent ni ne filent ; cependant je vous dis que Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n'a pas été vêtu comme l'un d'eux » (Mt 6,28-29). Le Seigneur parle de la beauté des fleurs comme d'un vêtement. Ce vêtement de beauté a donc une signification : il est une image de la Gloire de Dieu.
Pour le roi, c'est clair, le vêtement est un symbole de sa fonction, de son autorité, de son prestige et de sa gloire. Mais la gloire de Salomon n'est rien à côté de la gloire de Dieu. Or, pour nous aussi, le vêtement doit être un signe. Lorsque nous sommes baptisés, on nous revêt d'une robe blanche : c'est pour signifier qu'à l'origine, l'homme était revêtu de lumière, et que le vêtement qui lui est destiné dans le Royaume est un vêtement de lumière. Les Pères, notamment saint Grégoire Palamas, disent que dans le paradis Adam n'était pas nu : il était revêtu de lumière, de la lumière incréée. « Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu le Christ », dit saint Paul (Ga 3,27). Et dans la parabole des invités aux noces, pour entrer dans la salle du banquet, qui est une image du Royaume, il faut avoir le vêtement qui convient (Mt 22,11). De même, si les célébrants portent des vêtements liturgiques somptueux, ce n'est pas pour en tirer une gloire personnelle, c'est une image du vêtement de lumière.
Ce vêtement est aussi signe de gloire car, comme il est dit dans l'Épitre d'aujourd'hui : « Nous nous glorifions dans l'espérance de la Gloire de Dieu » (Rm 5,2). Dans ces quelques mots, saint Paul dit cette chose importante : la Gloire de Dieu est un motif d'espérance pour nous. Cependant, cette espérance ne nous met pas a l'abri des afflictions, mais même les afflictions concourent à cette espérance, comme le souligne saint Paul : « Bien plus, nous nous glorifions même des afflictions, sachant que l'affliction produit la persévérance, la persévérance la victoire dans l'épreuve, et cette victoire produit l'espérance. Et l'espérance ne trompe pas, car elle est fondée sur l'amour de Dieu qui a été mis dans nos coeurs par le don du Saint-Esprit » (Rm 5,3-5).
Voilà, j'ai voulu parler de ces choses qui concernent le Royaume de Dieu, un Royaume déjà rendu présent par le Seigneur. Mais, encore une fois, ce qui nous est donné par le Seigneur, il nous appartient de le désirer, il nous appartient de désirer que ces dons produisent leur effet. Que le Royaume de Dieu, sa Justice et sa Gloire soient donc notre première préoccupation. Avec saint Paul, attachons-nous, « non aux choses visibles qui
sont éphémères, mais aux invisibles qui sont éternelles » (2 Co 4,18). Cela ne supprime pas la nécessité de travailler, mais si nous travaillons pour la gloire de Dieu, nous y participons déjà.
Amen.