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lundi 14 avril 2025

Dimanche des Rameaux.

 

(Jean 12, 1 à 18)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 


Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à nous joindre à la foule pour venir à la rencontre de Celui que nous confessons comme le Messie d’Israël et le Sauveur du monde, la foule est bigarrée et chaque individu est là, juif ou païen, avec ses propres pensées, paroles et actes devant Celui dont les œuvres et l’enseignement se sont répandues en Israël et dans toute la Palestine.

 

La foule prit « des rameaux de palmier et sortit à la rencontre de Jésus en criant : Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le Dieu d’Israël », toujours curieuse et même avide de toute nouveauté elle se presse autour de Jésus, le saint Rabbi et Prophète, en criant de toute son âme l’inspiration qui l’habite par ces paroles pleines de sens religieux et spirituel connues comme l’acclamation pour la venue du Messie, Fils de la maison royale de David.

 

Notre être entier ne se resserre t-il pas d’une intense émotion religieuse lorsque nous lisons « voici que Je viens, assis sur un ânon, le petit d’une ânesse », cet ânon porte le Seigneur de gloire qui lui-même « doux et humble de cœur », accepte de voyager ainsi dans une totale et sainte modestie. Cet ânon est aussi la métaphore de l’homme, le petit de l’ânesse c’est à dire de notre sainte et précieuse Eglise, qui a vocation à faire de tout homme ou femme de bonne volonté une « personne porteuse du Christ ».

 

Voici encore cette foule tour à tour ordonnée ou anarchique, enjouée ou révoltée qui se presse autour de Jésus, ce Rabbi puissant en œuvres et en paroles devant Dieu et parmi les hommes, un spectacle ou l’espérance vivante incarnée dans cette humanité rencontre l’étonnement plus ou moins incrédule qui perce à travers les regards et les cris. Le Seigneur vit dans son âme les drames qui habitent tous ces gens, lui qui est là justement pour les délivrer de toutes leurs aliénations mortifères par la grâce toute puissante de la Passion.

 

N’est-ce pas aussi de cette foule que parle saint Pierre en 1P. 2, 9 lorsqu’il enseigne que « vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis pour proclamer les louanges de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière, vous qui n’étiez pas un peuple et qui êtes maintenant le Peuple de Dieu, vous qui n’obteniez pas miséricorde et qui aujourd’hui avez obtenu miséricorde ». Ce que proclame saint Pierre, n’est pas réservé au seul peuple d’Israël, mais s’adresse à toute l’humanité autant que celle-ci a le désir de demander une telle bénédiction au Seigneur et de s’engager dans la voie qui commence dans les ténèbres de l’âme et traverse l’existence, icône de la passion inévitable pour l’homme tombé dans les ténèbres du péché qui mène à la mort, cette conversion est le sens même du saint et grand Carême à l’issue duquel l’homme espère la Résurrection avec le Seigneur et Sauveur.

 

Le peuple de Dieu, c’est l’humanité dès sa création originelle, l’effraction par le péché d’Adam et Eve n’invalide en rien cette réalité, et l’incarnation est le signe même qu’il sera toujours possible d’être sauvé, c’est le sens même de toute l’œuvre accomplie par l’Incarnation et la Passion du Seigneur Jésus. C’est aussi pourquoi, le Christ dit « J’ai encore d’autres brebis à visiter », c’est à dire, tout être où qu’il soit et qui se tourne librement vers moi, « Je le sauverais et Je le glorifierais », selon la promesse que l’Esprit a inspiré au Psalmiste.

 

Sans pouvoir développer ici le message de l’Apocalypse 7,9 à12, cette foule à Jérusalem est une préfigure terrestre de la « foule immense, rameaux à la main et de toute nation, race, peuple et langue qui crient : le salut à notre Dieu, qui siège sur le trône ainsi qu’à l’Agneau »,

vision donnée au voyant de Patmos pour la consolation de l’homme et la gloire de Dieu.

« Vous êtes une race élue », parce que, moi votre Dieu, je vous ai crées dans l’amour, la beauté et la vérité et je vous ai revêtu de toutes mes grâces spirituelles dès l’origine de la Création, afin que dans votre liberté vous puissiez choisir de réaliser votre vocation de « fils et de filles de Dieu », cela nous est rappelé dans Actes 17,28 et 29 « c’est dans la liberté que vous avez la vie, le mouvement et l’être...car nous sommes de sa race », puisque nous sommes créés à l’image et à la ressemblance de Dieu.

 

« Vous êtes un sacerdoce royal », c’est à dire que notre manière de vivre dans le quotidien doit être une icône de la célébration liturgique, au sens d’une prise de conscience que Dieu a créé tous les êtres vivants, n’est-ce pas ce que proclame le Psalmiste en chantant » que tout ce qui vie et respire loue le Seigneur », et que donc, il nous appartient de nous approcher du vivant comme des célébrants pour louer la sainteté et la sacralité de l’œuvre divine.

 

« Vous êtes une nation sainte », au sens du Paume 33,12 « heureuses les nations, dont l’Eternel est le Dieu », ceci confirme la qualité d’universalité du message évangélique exprimée dans cette autre parole du Seigneur « allez enseignez et baptisez toutes les nations au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit », ce qui est manifesté à Israël aujourd’hui a vocation à être répandu comme une semence vivifiante dans le monde entier. Combien parmi cette foule croiront que le Seigneur de gloire est là devant leurs yeux « assis sur un ânon le petit d’une ânesse », qui parmi les religieux et les notables pourront croire que la Thora et la loi mosaïque sont ici incarnées et parfaitement accomplies par ce Jésus à l’apparence si humaine qui vient « doux et humble de cœur » au Nom du Dieu d’Israël.

 

« Vous êtes un peuple acquis, c’est à dire, vous avez un prix inestimable à mes yeux et moi votre Père céleste, je n’ai pas hésité à vous envoyer mon Fils Unique pour vous donner à nouveau votre dignité originelle et cela même par le sacrifice inhumain de la Croix. C’est ce qui nous est rappelé en Actes 20,28 « l’Eglise du Seigneur qu’il s’est acquise par son sang », ce sang répandu sur la Croix de la Passion pour le salut du monde et encore en Ephésiens. 1, 13 à 14 « c’est en lui, le Christ que vous aussi, après avoir entendu la Parole de vérité, l’Evangile de votre salut et y avoir cru, que vous avez été marqués d’un sceau par l’Esprit de la Promesse, cet Esprit Saint qui constitue les arrhes de notre héritage et qui prépare la rédemption du Peuple que Dieu s’est acquis pour la louange de sa gloire ». Si nous le désirons, nous pourrons méditer sur le sens de ces citations évangéliques et Dieu bénissant y trouver les perles précieuses de la nourriture spirituelle.

 

Nous sommes donc par vocation des élus, des rois, des saints et notre valeur réside dans notre être spirituel créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, le « salut » de l’homme dans son  mystère divino-humain échappe à la seule imagination ou seule compréhension rationnelle, mais nous pouvons choisir de croire au « Sauveur » et laisser l’Esprit de toute grâce nous guider à travers « Celui qui est la voie, la vérité et la vie ». L’Eglise est la grotte de la Nativité, l’icône du Jourdain et du Baptême de Jésus, la montagne des Béatitudes sur laquelle nous est transmis l’essence de la sagesse divine, le lieu vivant qui nous donne de vivre la sainte Cène, elle est le Jardin de Gethsémani, le tombeau du Seigneur, le Golgotha, et le témoignage de la glorieuse Résurrection, cette expérience de vie est proposée par « l’Eglise, Corps du Christ dont Il est la Tête » à la liberté de tout homme et de toute femme de bonne volonté.

 

L’Église orthodoxe connaît par expérience combien l’ascèse et l’épreuve sont utiles pour convertir le vieil homme à l’homme nouveau, elle sait aussi que ni l’ascèse ni l’épreuve en soi ne suffisent pour sauver l’homme, car, comme le chante le Psalmiste: « en vain te lèves-tu tôt et te couches-tu tard, en vain manges-tu le pain des douleurs, alors que le Seigneur comble son bien-aimé pendant qu’il dort ».

 

« Voici que ton Roi vient à toi, humble et monté sur un ânon, le petit d’une ânesse ». La véritable royauté est la sainte humilité du Christ, qui de tout-puissant qu’il est dans l’éternité, se rend semblable à la créature humiliée et tourmentée par le péché. Jérusalem est l’icône du Royaume à venir, et Jésus nous invite à le suivre pour renouer le dialogue avec le Père Céleste en acceptant de passer par la Croix, par la Pâque du Seigneur dans la foi, l’espérance et le vrai repentir du cœur.

 

Le Dimanche des Rameaux, inaugure le cheminement ascétique proposé à chaque chrétien orthodoxe pour se préparer à vivre avec le Christ sa propre pâque, sa résurrection et sa vie au nom de la Divine Trinité. Cette liturgie du salut présidée par le Christ lui-même est, ce que l’Eglise orthodoxe appelle « l’ascèse de l’amour », seule indispensable pour entrer dans la métanoïa pascale qui fait passer de la mort au monde et aux modes, à la Résurrection pour la vie éternelle.

 

Le monde ne peut pénétrer dans le mystère de la Résurrection, ce n’est pas le regard du monde sur nous qui doit changer, c’est nous qui devons regarder le monde avec l’esprit du Seigneur, Lui seul, peut nous libérer de l’aliénation de ce monde. Dans Matthieu 21, 10-11, quand Jésus entra dans Jérusalem, toute la ville fût en émoi: « qui est-ce ? », disait-on et les foules répondaient: « c’est le prophète Jésus, de Nazareth en Galilée ». Combien dans cette foule, ont eu un désir véritable de connaître celui qui est vu comme un prophète, et recevoir par la grâce de l’Esprit la certitude que  ce Jésus, est le Messie d’Israël espéré ?

 

La foule anonyme ne peut confesser la divinité du Christ, seule la foi de ceux dont le Christ dit « bienheureux ceux qui auront cru sans voir », peuvent le reconnaître intérieurement en esprit et en vérité. Le père C. Andronikof écrit « le Christ meurt et l’Eglise naît », cette naissance engendre  l’Eglise comme unique source qui transmet la sagesse qui dansait devant la Face de Dieu et dont Dieu se réjouissait.

 

Gloire au Père inengendré, au Fils engendré et à l’Esprit Saint illuminateur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

mardi 8 avril 2025

Sainte Marie L’Egyptienne.

 


(Luc 7, 36 à 50)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen.

 

 

 

Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à suivre le Christ chez Simon le Pharisien, pour y découvrir à travers la femme pécheresse, que la grâce divine ne fait pas la discrimination des personnes, là où les hommes inféodés à la dureté de la Loi religieuse sont prompts à juger, lui notre Seigneur ne juge pas, mais élève la personne et le pardon au-dessus du péché. La trame de ce passage évangélique est fondée sur la manière de regarder, d’écouter et de parler ou non avec l’autre. Ce récit nous met en relation directe avec le regard et la parole de Dieu notre Créateur dans le livre de la Genèse où nous lisons : « Dieu vit et dit que cela était bon » en parlant de la création et « Dieu vit et dit que cela était très bon »en parlant de la création de l’homme. 

 

Simon le Pharisien fin connaisseur de la Thora, enferme cette femme dans ses actes contraires à la morale religieuse de son temps, il ne voit pas en elle une personne et donc ne lui adresse aucune parole. Mais pour comprendre l’attitude de Simon, et éviter nous-mêmes de le juger, nous devons nous souvenir que la Loi est accueillie par Israël comme l’expression absolue de la volonté divine, elle est vécue comme « parole et alliance qui vient de Dieu et mène à Lui, elle est sa voix et la voie ». Mais le Seigneur éclaire le sens de la Loi en soulignant « qu’il n’est pas venu abolir la Loi mais l’accomplir », il déclare donc la Loi bonne mais inachevée, elle dit la vérité divine mais elle doit aussi donner l’amour divin, l’œuvre du Messie par l’incarnation est de réaliser « l’union de la vérité et de l’amour ». Simon le Pharisien n’invite pas le Rabbin Jésus parce qu’il l’aime, mais parce qu’il a entendu parler de lui et que cela a suscité chez lui une sorte de stupeur mentale devant les œuvres accomplies par ce Rabbin au milieu d’Israël.

 

Et nous les enfants de l’Eglise orthodoxe, invités non par des hommes fussent-ils des religieux, mais par Dieu lui-même, pourquoi n’imiterions-nous pas avec simplicité et confiance cette femme pécheresse, en déposant aux pieds du Seigneur, notre demande de pardon pour nos péchés ? A chaque fois que nous osons juger un homme ou une femme, nous devenons des pharisiens durs de cœur et sans esprit, nous rendant indignes de communier à la table spirituelle qui nous propose de goûter combien le « Seigneur est bon et doux ».

 

Ainsi Simon le Pharisien juge t-il cette pécheresse comme perdue et indigne de pardon, car pour lui, la Loi mosaïque est au-dessus de tout et de tous, elle est pour lui la sagesse spirituelle absolue, à laquelle ce Rabbin Jésus devrait lui aussi se plier, c’est pourquoi prisonnier de la Loi, il est sans compassion envers la femme pécheresse et sans justesse envers Jésus et ose se dire en lui-même « si cet homme était un prophète, il saurait qui est cette femme qui le touche ». Là où la femme pécheresse reconnaît Jésus comme un Prophète de Dieu, Simon lui doute de Jésus, et le rabaisse au niveau d’un individu sans discernement. Malheur donc à nous, si sous prétexte que nous sommes « orthodoxes », nous jugeons le monde comme corrompu, en nous autorisant à mépriser les autres, sur la seule foi de notre ressenti non purifié par l’amour et la vérité divines. L’Ecriture sainte nous invite au contraire à imiter cette femme, et à venir nous prosterner aux pieds du Christ, pour y verser les larmes d’un repentir sincère.

 

Que nos prières liturgiques et personnelles soient comme une huile parfumée et sainte répandue sur la tête du Christ, que notre attitude entière soit une louange à la Divine Trinité, que notre présence dans l’Eglise soit une icône fidèle et un témoignage véridique de notre désir d’aimer le Seigneur. Si avec la grâce divine nous essayons vraiment avec modestie d’imiter cette femme, en nous prosternant aux pieds du Christ de manière orthodoxe, c’est à dire, avec la dignité que nous devons à notre Seigneur, alors nous aussi, nous entendrons le Seigneur nous dire « tes péchés te sont remis, ta foi t’a sauvée, va en paix ».

 

Ni l’Eglise ni le croyant ne doivent se laisser impressionner par les illusions du monde déchu ou par les minuscules pouvoirs des soit disant « maîtres du monde », que ceux-ci soient des religieux ou des non religieux. Si le Christ libère cette femme, est-ce pour qu’elle se retrouve aliénée, sous de nouveaux commandements élaborés par telle ou telle communauté religieuse.

 

Notre sainte Eglise orthodoxe a reçu en plénitude le trésor inaliénable de la sagesse divine, afin que tout homme et toute femme de bonne volonté puisse se libérer de l’esclavage du péché, et se restaurer à nouveau dans la beauté et la vérité divines. Avez-vous remarqué que ni Simon ni le Christ n’invite cette femme à la table pour partager le repas ? Le Seigneur accomplit ce que lui-même enseigne dans le saint Evangile, lorsqu’IL appelle à « ne scandaliser personne ». C’est pourquoi pour ne pas scandaliser cette femme qui vient vers lui, il la laisse exprimer son amour et son désir de conversion en se laissant « toucher » par elle, selon le reproche de Simon le Pharisien. Mais le Seigneur discerne aussi « l’état spirituel de Simon » et il sait que celui-ci n’aurait pu supporter que cette femme soit invitée pour partager le repas avec eux, ainsi le Seigneur ne s’impose ni à l’un ni à l’autre.

 

Cette parabole fait écho à cette autre rencontre du Seigneur avec une femme adultère, ici, Simon le Pharisien toise et juge durement cette femme, là où le Christ baisse les yeux devant la femme adultère et écrit avec son doigt dans le sable, ce que faisant, le Seigneur rappelle à tous ceux qui étaient présents et prêts à lapider la femme, qu’ils « sont tous tirés de la terre et qu’ils retourneront à la terre ». Qui sommes-nous donc pour asséner un jugement à partir d’un simple ressenti, « poussière et cendre », éphémère au sein d’un univers qui survit à des nuées d’êtres humains, prions notre Seigneur de nous accorder la grâce d’unir en nous la vérité avec l‘amour, pour la seule gloire de Dieu, notre Père et Créateur.

 

Voici donc que cette femme pécheresse a reçu le pardon divin parce que comme le dit notre  Seigneur « elle a beaucoup aimé », alors que Simon malgré son respect obsessionnel de la Loi, reste prisonnier de la lettre qui étouffe son esprit, l’enferme et l’empêche en vérité de connaitre le retournement intérieur et d’engendrer des fruits pour la vie éternelle. Le Christ ne juge ni Simon ni la pécheresse, il donne à l’un et à l’autre la possibilité d’accéder à la grâce qui peut ouvrir leur être à la vie en Dieu, dans l’Eglise et dans le monde. Le charismatique, saint et divin Rabbin Jésus ne bénit ni le péché de la femme ni le jugement de Simon, mais les invite à le suivre en Dieu pour aller vers leur seule véritable vocation qui est spirituelle et divino-humaine.

 

Dieu ne bénit jamais le péché mais il accueille toujours le pécheur ou la pécheresse selon cette parole que le prêtre dit après la confession au moment de l’absolution « Dieu ne veut pas la mort du pécheur ou de la pécheresse, mais qu’ils se convertissent et qu’il vivent ». C’est pourquoi, nous croyons avec une pleine confiance que « Dieu aimera toujours infiniment plus le plus grand des pécheurs, que le plus grand des saint ne pourra aimer Dieu », méditons cette parole de profonde consolation.

 

Au Père donateur du Festin divin, au Fils notre nourriture éternelle, à l’Esprit Saint qui nous

guide vers la table divino-humaine, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen.  

 

+Syméon

 

 

 

samedi 29 mars 2025

Dimanche de saint Jean Climaque.

 

Dimanche, 30 mars 2025.


(Marc - 9, 17 à 31).

Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen

 


 

Aujourd’hui, notre sainte Eglise orthodoxe nous invite à contempler notre Seigneur comme le Médecin de notre âme et de notre corps, et cette thérapie divino-humaine prend source dans notre foi envers la Divine Trinité. Nous savons tous que le lieu providentiel dans lequel se manifeste avec grande puissance l’œuvre divine du salut de l’humaine condition est l’Eglise, dont chacun d’entre nous est une pierre vivante pour accueillir Dieu et notre frère. Nos saints Pères témoignent tous sans exception du mystère que représente « l’Eglise qui est au cœur du monde, de l’homme qui est au cœur de l’Eglise, et de la Divine Trinité qui est au cœur de l’homme ».

 

L’Ecriture dit : un homme s’approcha de Jésus et lui dit : « Maître, je t’ai amené mon fils possédé par un esprit sourd et muet », que signifie pour chacun d’entre nous cette expérience existentielle ? Il nous est dit «  un homme » sans autre précision, ceci veux dire que tout homme peut se tourner librement vers Jésus pour implorer son aide, non seulement pour lui-même mais surtout pour son prochain, mais pour que tout homme puisse se tourner vers Jésus, nous Chrétiens orthodoxes, nous devons être des témoins vivants et vivifiants de l’Evangile du Seigneur.

 

Nous savons que l’œuvre maudite de Satan qui est le père du mensonge et nulle œuvre n’est pire que le mensonge qui entraine avec lui des multitudes de souffrances tant personnelles que dans la vie de l’Eglise, oui le mensonge est banni par Dieu et ceux qui s’y prêtent s‘amassent des charbons ardents sur leur tête et sur celle de leurs proches. Que cherche donc ici à faire Satan qui est un dictateur impitoyable et un destructeur acharné de l’humanité, « il veut établir une dictature faussement spirituelle qui est la plus redoutable des hérésies », parce qu’elle a pour but de déposséder l’homme de lui-même, de le rendre comme le souligne l’Evangile de ce jour, « sourd et muet envers Dieu son Père et Créateur ».  Ne sommes-nous pas les disciples du Verbe créateur, notre vocation s’enracine dans la parole créatrice partagée et vécue dans l’Eglise pour la vie du monde, notre témoignage est véridique si à « l’image du Seigneur, notre existence réelle est une célébration liturgique nourrie par la sève évangélique ».

 

La sève évangélique, est la « foi sans laquelle aucune vie religieuse et encore moins spirituelle n’est possible », il ne s’agit pas de la foi pour soulever les montagnes extérieures, mais de la foi qui peut nous élever et nous transporter à la rencontre de Dieu, du prochain et de l’Eglise. La foi nous est indispensable lorsque nous sommes attaqués par les « brûlures de la dépression spirituelle », c’est à dire cet état psychique destructeur qui nous fait penser « à quoi bon aller à l’Eglise ». La foi est notre lumière, lorsque nous sommes envahis par les pensées psychiques qui enténèbrent notre esprit et parasitent notre discernement, la foi est notre énergie spirituelle lorsque les forces physiques nous manquent ou lorsque nous sommes éprouvés dans notre chair. Notre croyance aussi faible et fragile qu’elle soit, peut devenir une foi source de vie qui nous engendre à notre véritable vocation orthodoxe, si nous cultivons la simplicité de venir vers Celui qui nous a dit : « venez et voyez ».

 

Nous savons que chaque célébration de la Divine Liturgie présidée invisiblement par le « Christ, Grand-Prêtre éternel selon l’ordre de Melchisédek », est une blessure mortelle pour Satan et sa clique démoniaque. C’est pourquoi notre responsabilité, doit être notre enracinement fidèle dans la vie de l’Eglise, qui nous transmet la vie divino-humaine. Nous y recevons la grâce inestimable qui est la communion au « Corps et au Sang du Seigneur », ne laissons pas Satan nous dépouiller de ces richesses spirituelles en écoutant le vieil homme, nous distiller son venin psychique et charnel avec son hypocrisie habituelle.

 

 

 

Ainsi, tout comme pour cet enfant, « l’esprit immonde » ne cesse de tenter chacun d’entre nous, d’essayer de jeter les croyants dans le feu de la haine envers Dieu et le frère, de nous noyer et submerger dans l’eau morbide des pensées psychiques, sagesse mondaine qui n’est rien devant Dieu. Oui, l’esprit de tout malheur persévère avec acharnement à essayer de détruire la foi des croyants, mais nous sommes les enfants lumineux de l’Eglise nous dit saint Paul, et c’est par la « Lumière du Christ et par la puissance des saints mystères et sacrements de l’Eglise », que nous devons œuvrer à la construction de notre vie et de notre être en Dieu.

 

« La foi est la sagesse orthodoxe donnée par le Seigneur à ceux qui croient librement en Lui », à la foi doit s’associer le jeûne et la prière, jeûne de l’esprit et prière de l’âme, qui nous feront expérimenter l’ascèse bénie qui est la célébration de la Divine Liturgie au nom du Seigneur. Nous pouvons entrer comme cet enfant dans l’Eglise dans un état chaotique et être désorienté, être plus mort que vif, peu importe, l’essentiel est d’être là où le Père céleste nous espère. L’Eglise où nous sommes les très bienvenus, nous accueille par le Fils et L’Esprit, pour nous convertir à la vraie vie selon Dieu. Sans ce désir de nous conformer au Christ, notre présence dans l’Eglise ne porte aucun fruit digne de la noblesse divino-humaine de la personne. Si nous avons choisi le « Seigneur comme notre Maitre absolu et unique », alors tous ses trésors spirituels deviennent pour nous des puissances de vie, et nous pourrons espérer trouver par Lui la guérison de notre être entier.

 

Si l’esprit impur, sourd et muet jette l’enfant dans le feu extérieur qui brûle et détruit, le Christ nous propose le feu divin qui purifie et qui donne la vie, et ce feu c’est « l’amour de la Divine Trinité pour l’homme son bien-aimé ». Si l’esprit impur cherche à se faire adorer par les hommes en leur demandant de se prosterner devant lui, le Christ « doux et humble de cœur » propose de servir l’homme et de l’élever jusqu’au Royaume de Dieu.

 

« Je ne suis pas venu pour être servi mais pour servir » dit le Christ, le service de Dieu est une immense miséricorde, le service dans l’Eglise est une grâce à jamais imméritée, connaissons-nous un seul saint qui se soit déclaré digne d’être élevé à telle ou telle fonction dans l’Eglise ? Les saints dans leur vie en ce monde méditaient sans cesse l’Evangile de toute grâce, ils savaient que le Christ a dit : « lorsque tu auras fait ce que tu avais à faire, retire-toi et dit en toi-même, j’ai fait ce qui m’a été demandé, je ne suis qu’un serviteur inutile », ne sommes-nous pas débiteurs à vie non seulement envers Dieu mais aussi envers Sa sainte Eglise ?

 

Au nom du Christ, « bénissons-nous les uns les autres, prions les uns avec les autres, prions les uns pour les autres », soyons les uns envers les autres selon cette parole du Seigneur « à cela, vous serez reconnus comme mes disciples, si vous vous aimez les uns les autres, comme je vous ai aimé ». Si nous donnons la priorité au monde qui passe, plutôt qu’à notre « Dieu et à l’Eglise-Corps et Tête du Christ », nous réitèrerons l’esprit de la chute originelle de nos ancêtres Adam et Eve.

 

La foi est unie à l’humilité et cette union engendre les œuvres d’amour envers Dieu, le frère et  l’Eglise, car comme dit saint Paul : « qu’avons-nous que nous n’ayons reçu, et si nous l’avons reçu, pourquoi faire comme si nous ne l’avions pas reçu ? », voici la pauvreté bénie par laquelle, nous confessons que nous recevons les biens véritables de Dieu seul. L’Eglise est le mystère de la rencontre entre Dieu et chaque personne qui le désire, le langage utilisé dans cette communion divino-humaine est celui de la « Divine Liturgie », et qui parmi nous voudrait renoncer, à cette nourriture spirituelle qui lui donne le corps, l’âme et l’esprit de la vie orthodoxe.

 

Le père de l’enfant possédé dit au Seigneur : « j’ai demandé à tes disciples de l’expulser, mais ils n’en ont pas eu le pouvoir » et le Seigneur de répondre : « engeance incrédule, jusques à quand, serai-je parmi vous ? Jusques à quand devrai-je vous supporter ? Amenez-le moi » ! Ces paroles s’adressent aux disciples du Christ qui vivaient avec Lui, qui étaient témoins directs des œuvres du Seigneur, et pourtant leur impuissance est dénoncée par le Maître lui-même.

Cette impuissance des disciples, nous montre qu’il ne suffit pas d’avoir vécu auprès du Seigneur pour accomplir un miracle, tout comme il ne suffit pas de venir à l’Eglise pour être sauvé. Pourquoi ? Le Seigneur donne la réponse « engeance incrédule », l’incrédulité, voilà ce qui nous empêche d’accéder à la grâce divine qui seule peut faire de nous et avec nous un christ, c’est à dire, une personne selon le cœur de Dieu.

 

Jésus poursuit en disant : « le pouvoir, c’est la foi, tout est possible à celui qui croit » ! Aussitôt le père de l’enfant s’écria en pleurant : « je crois, Seigneur, viens au secours de mon manque de foi » ! De quoi notre présence ici est-elle le signe ? Ne sommes-nous pas nous aussi, encore faibles et fragiles dans notre foi envers le Christ et son Eglise ? Alors n’ayons ni honte ni crainte de crier avec larmes et de toutes nos entrailles vers notre Père céleste, par le Christ dans l’Esprit Saint.

 

L’Evangile témoigne ensuite que : « Jésus, ayant pris l’enfant par la main, le fit lever, et il se tint debout », ne sommes-nous pas encore tour à tour incrédule ou immature, et pourtant qui parmi nous, ne désire pas la « vie et l’être en plénitude » ? Qui parmi nous se complait dans les passions et les péchés, qui ne désire ressembler au « Seigneur doux et humble de cœur » ? Alors, laissons-nous comme un enfant, prendre par la main du Verbe et de l’Esprit, Ils nous feront lever de la terre au ciel, en illuminant notre esprit par une vie spirituelle bienheureuse.

 

Au Père créateur de l’humanité, au Fils qui s’est fait homme parmi nous, à L’Esprit qui déifie l’homme, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

 

 

mercredi 26 mars 2025

Vénération de la Sainte Croix

 

(Marc, 8, 34 à 9, 1)

                              Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 

 

Aujourd’hui, c'est-à-dire toujours, puisque nous savons que chaque jour est une icône de l’éternité, notre sainte Eglise orthodoxe nous invite à faire librement l’expérience du renoncement. Renoncer à ce qui passe et trépasse, c'est-à-dire nous-mêmes pour acquérir ce qui demeure pour toujours, encore nous-mêmes mais dans notre réalité éternelle divino-humaine.

 

Pour acquérir par la grâce divine notre véritable vocation à la vie divino-humaine, nous devons apprendre à renoncer à rester des individus coupés de leur dimension spirituelle. Si nous nous détournons de Dieu et de l’Eglise, il nous sera impossible de renoncer à tout ce qui en nous et autour de nous, ne cesse de nous harceler pour nous faire abandonner notre vie et notre voie orthodoxe. Pourquoi trouvons-nous si difficile voire impossible de renoncer à ce qui de toute façon ne nous appartient absolument pas, à savoir nous-mêmes, nos proches et nos biens ? Parce que notre foi est encore faible, nous nous laissons séduire par les tentations du monde déchu, alors qu’en vérité notre cœur profond désire la vie divino-humaine.

 

Pour un chrétien orthodoxe, la source de son être et de sa vie est la Divine Trinité, qui n’est accessible que par la médiation de notre Seigneur de gloire éternelle qui est notre modèle absolu. C’est Lui qui le premier a renoncé totalement à rester dans l’immuable sérénité au sein de la Divinité, et le signe parfait de ce renoncement est son « Incarnation » parmi nous.

 

La sainte Croix que nous vénérons aujourd’hui dans l’Eglise, est le signe par excellence de l’accomplissement par le Fils de Dieu Lui-même, de son propre enseignement, à savoir : « tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée et de toutes tes forces…et ton prochain comme toi-même ». La Croix est le visage paradoxal de l’Amour de Dieu pour son prochain qui est l’humanité, l’amour peut-il donner plus que sa propre vie, le Christ n’a t-Il pas donné sa vie pour nous ? Mais là où, cette même Croix n’est pas accueillie, l’errance humaine sans Dieu, va perpétuer le visage tourmenté et défiguré de l’humanité déchue.

 

Le renoncement à soi-même n’est pas le reniement de soi-même, mais si je ne renonce pas au vieil homme, l’homme nouveau ne pourra pas être engendré. Ce que Dieu propose à la liberté de l’homme, c’est de renoncer à ce qui l’aliène, de renoncer à porter des masques mensongers sur des scènes imaginaires, pour que puisse rayonner le visage de l’être humain véritable. Le Seigneur dit « celui qui me voit, voit mon Père », de même l’homme en qui habite Dieu, à l’image de saint Paul peut dire « ce n’est plus moi, mais Christ qui vit en moi ». Renoncer à cultiver toutes sortes de personnages plus ou moins artificiels au détriment de la personne, de l’hypostase au sens des Pères de l’Eglise, seule la personne est icône de la Divine Trinité.

Renoncer à croire à l’éphémère et au superficiel, témoigner que notre vocation est la vie éternelle, en baptisant par nos œuvres spirituelles et religieuses, l’humanité et la Création entière, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

 

La Croix comme visage de l’Amour est une antinomie impossible à contempler selon nos limites humaines, mais avec la grâce divine, le Christ nous invite à renoncer à ce qui est limité, afin d’acquérir la plénitude des Dons de l’Esprit de Dieu. La Croix bénit toutes les dimensions de l’être et de la vie, de l’orient à l’occident, du nord au sud, de la profondeur à la hauteur, et sème ainsi le germe de la Résurrection dans l’humanité.

 

Dieu seul aime parfaitement, puisque l’Amour est sa nature même, alors comment faire pour apprendre à aimer comme le Christ ? Renoncer au péché qui empoisonne notre âme, nous détourner des illusions et mirages qui sentent la mort et qui jamais ne pourront engendrer la moindre résurrection. C’est pourquoi le Seigneur nous dit « que sert à l’homme de gagner le monde entier, s’il y perd son âme », l’âme est une création divine et non une œuvre humaine, elle porte l’éternel et non la finitude, elle est crée pour exhaler le parfum de la vie céleste et non la mauvaise odeur du péché.

 

Nous savons que la sainte Eglise orthodoxe est le lieu spirituel au cœur duquel nous apprenons à connaître la « hauteur, la profondeur et la largeur » de l’Amour de Dieu pour l’humanité et dont la Croix est le symbole dans toute sa plénitude. Cette croix qui  plantée au centre de l’Autel du sacrifice non sanglant, est le trône spirituel sur lequel la Divine Trinité assiste à la célébration de la Divine Liturgie et des Saints Mystères du Christ. Notre sainte et splendide Eglise orthodoxe est l’icône qui unit l’Arbre de vie paradisiaque et la Croix, une seule et même réalité spirituelle et liturgique.

 

Le Christ nous avertit : « qui veut sauver sa vie la perdra… » quelqu’un parmi nous peut-il se sauver lui-même ? La seule manière de ne pas perdre sa vie, c’est de la vivre dans toute sa plénitude, par la communion avec Dieu en Jésus-Christ, par la célébration de la Divine Liturgie, qui est le resplendissement de la gloire divine et la transfiguration de l’homme.  

 

La Croix est la voie sur laquelle nous expérimentons la « douloureuse joie » dont témoignent les saints et qui aboutit au temps fixé pour chacun par la providence divine à la béatitude éternelle dans le Royaume de Dieu. Ce chemin nous est révélé peu à peu au sein de notre présence vivante dans l’Eglise qui représente elle-même les portes royales par lesquelles l’homme prodigue et racheté, se jette dans les bras du Père Céleste que sont le Verbe et l’Esprit. N’est-ce pas ce que nous révèle l’icône du fils prodigue ?

 

Le monde a été ensanglanté et couronné d’épines dès la chute adamique, tout comme le Seigneur sera couronné d’épines, mais c’est par la sainte épine spirituelle, c’est à dire la Croix, que Dieu va restaurer l’humanité et la création dans la plénitude de la vie, de la vérité et de la beauté céleste du Royaume de Dieu.

 

Les hommes accumulent des savoirs et pensent ainsi devenir des êtres vivants et entiers, mais c’est tout le contraire qui leur arrive, ils se dispersent, s’affaiblissent et finissent trop souvent par mourir sans espérance. La conscience endormie de l’homme sans Dieu, devient le tombeau des « âmes mortes » dont parle Gogol, la paresse spirituelle rend l’homme insensible à l’essentiel qui est « la présence très sainte et sacrée de l’Esprit Saint Consolateur ». L’homme sans Dieu perd sa véritable humanité et finit par s’étioler au sein d’une existence privée de ses racines et vidée de sa sève spirituelle. Il devient comme inexistant, en perte d’humanité et sans relation créatrice avec et dans le réel.

 

Saint Jean nous dit « vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas du monde » tout comme le Seigneur est venu dans le monde sans être du monde, c’est pourquoi, L’Esprit de Dieu nous donne aujourd’hui, la connaissance de la voie royale qui mène à la vie éternelle et qui est tout simplement la Croix de notre Seigneur Jésus-Christ. La Croix du Seigneur de gloire, n’est pas pour l’humanité un instrument de torture, mais l’arbre de vie qui porte des grappes de fruits savoureux, pour nourrir d’amour, de vérité et de beauté l’humaine condition. Mais il appartient à ma liberté de cueillir le raisin de la grâce qui m’est proposée et d’en faire ma nourriture et ma boisson et ainsi de me restaurer peu à peu, et devenir un « être vivant ».

 

L’expérience et le fruit béni de notre croix personnelle, nous amènera en son temps de l’extérieur vers l’intérieur, alors nous connaitrons que la célébration de la Divine Liturgie, est l’expression même de la puissance sanctifiante, libératrice et salvifique de la Croix du Christ, qui nous fait passer de la mort à la vie éternelle.

 

Au Père qui a planté l’Arbre de Vie dans le Paradis, au Fils qui l’a planté par la Croix dans l’Eglise et dans le monde entier et à l’Esprit Saint qui l’a planté transfigurée dans le Royaume de Dieu, soit la Gloire dans les siècles des siècles. Amen.

 

+ Syméon

 

dimanche 16 mars 2025

Dimanche de saint Grégoire Palamas

                                                                                                         

(Marc 2, 1-12)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 

 

Aujourd’hui, au milieu de nous et pour chacun et chacune d’entre nous, s’accomplit le miracle de la guérison du paralytique. Nous aussi, de diverses manières, avons été transportés dans l’Eglise pour y rencontrer le Médecin des âmes et des corps. Etrange guérison de cet homme sans nom, qui n’exprime apparemment aucune demande précise et qui se trouve soudain en Présence du Dieu vivant en la Personne de Jésus. Etrange cortège de ceux dont le Christ loue la Foi, eux aussi sans nom ou plutôt avec le même nom que celui avec lequel  Jésus lui-même se présente aux scribes et autres, à savoir « Fils de l’Homme » foi grâce à laquelle Il accorde la pleine guérison au paralytique. Etrange procession qui vient d’on ne sait où, qui traverse la foule et qui se retrouve sur un toit du haut duquel, ils font descendre le paralytique jusqu’à Jésus, quelque chose comme une préfigure d’une épiclèse à venir, prophétisée et mise en œuvre par la foi qui habite l’humanité en quête de sens. Jésus aussi traversera bientôt cette même foule, tour à tour enthousiaste, incrédule, hostile ou conquise selon ses états d’âme.

 

Certes, le paralytique est l’image de l’humanité souffrante, et dans ce sens, il personnifie chacun d’entre nous et de manière plus précise le vieil homme en nous, qui ne sait, ne peut ou ne veut pas aller de lui-même, ni se laisser accompagner par l’autre à la rencontre de Jésus. Si le salut est personnel, on ne se sauve pas tout seul, et cette péricope évangélique le montre à merveille : oui, nous avons besoin de l’Eglise pour nous porter les uns et les autres jusqu’à Dieu, et cela quelquefois par des cheminements tout à fait inattendus. Que faire, comment faire pour participer à notre salut ? Nous ne pouvons contourner l’indispensable métanoia qui doit nous permettre d’édifier notre être en Dieu, si nous nous abandonnons nous-mêmes, si nous ne comprenons pas que ces porteurs que sont notre corps, notre âme, notre esprit et notre cœur, sont aussi les supports de notre «  personne-hypostase », et que nous devons les amener à Jésus pour qu’Il les délivre de ce qui les paralyse et les empêche d’accomplir le bon combat de la vie spirituelle, alors comme dit saint Paul « notre foi est vaine ».

 

N’est-il pas étrange de voir Jésus pardonner au paralytique des péchés qu’il n’a pas confessé ? D’ailleurs, ni celui-ci ni ses porteurs n’ont confessé Jésus comme Dieu, et pourtant le miracle est là dans toute sa puissante réalité. C’est encore et toujours le péché Adamique que le Christ remet sans se lasser en la personne du paralytique, car la Chute a rendu l’humanité profondément apathique et incapable de se porter d’elle-même vers Dieu, de vivre spirituellement les Promesses divines. Seul le Messie-Christ annoncé par l’ancienne Alliance, peut remettre en mouvement l’humanité paralysée par la solitude spirituelle dans laquelle les âmes sont plus ou moins pétrifiées. 

 

Mais le Christ met aussi clairement en relation la paralysie qui frappe cet homme avec ses propres péchés, il souligne ainsi notre responsabilité personnelle dans notre existence quotidienne, et il insiste sur le fait que nous devons nous aider mutuellement, en intercédant les uns pour les autres, pas en discussions pseudo-spirituelles voire en disputes soit disant théologiques, mais en agissant concrètement dans l’Eglise pour que la vie selon Dieu puisse y circuler et nous désaliéner de toutes nos paralysies existentielles. Comment alors nous porter nous-mêmes jusqu’à Jésus, comprenons que ces quatre hommes qui transportent le paralytique, représentent diverses ascèses possibles que chacun et chacune d’entre nous peut mettre en œuvre pour être sauvé, par ex. la prière personnelle et liturgique, la confession et la recherche de l’hésychia.

La libération de notre paralysie par le Seigneur ne nous impose absolument rien ; Jésus n’a pas cherché un seul instant à retenir auprès de lui, celui qu’il vient de rendre à sa liberté personnelle. Le paralytique ressort et traverse cette foule anonyme qui entérine le miracle sans le comprendre, cette foule qui ne sait dire que « nous n’avons jamais rien vu de pareil », et qui pourtant rend gloire à Dieu.

 

Et nous les témoins de l’Avènement de Dieu parmis nous, nous qui ne sommes pas portés par des hommes anonymes, mais par la Divine Trinité, nous qui sommes portés par la médiation de Marie-Théotokos, nous qui sommes portés par les prières des Saints et accompagnés par les Anges de Dieu, nous qui sommes nourris par le Corps et le Sang de Dieu, nous qui sommes bénis et rénovés sans cesse par la grâce des Sacrements de l’Eglise, oui comment vivons nous notre rencontre avec Jésus ?   

 

A l’image de cette foule, nous les enfants de notre sainte Eglise orthodoxe, nous les bien-aimés du Père Céleste, réjouissons-nous et soyons humbles dans le Seigneur, rendons gloire à notre Dieu, ne tenons pas de discours inutiles et stériles dans notre cœur comme les scribes et les pharisiens, mais agissons selon la bonne ascèse du salut qui est la vie selon l’Evangile et la sagesse de l’Eglise.

 

Soyons des christs pour nous-mêmes et intercédons avec ardeur et ferveur pour que Jésus  guérisse et sauve le vieil homme paralytique en nous, intercédons pour l’humanité entière, en célébrant et en fêtant ensemble les saints mystères du Christ et de son Eglise, et que nos bonnes œuvres rayonnent dans toute la Création pour la Gloire de Dieu.

 

Demandons, supplions et prions le Christ de donner sa bénédiction éternelle à l’humanité, qu’Il la renouvelle et la fasse resplendir de grâce et de beauté et que cela commence, ici et maintenant dans la sainte Eglise et dans ce temps propice au retournement et à l’élévation vers Dieu qu’est le saint Carême.

 

Au Père Céleste qui bénit, au Fils éternel qui nous transmet cette bénédiction et à l’Esprit qui l’accomplit dans toute sa plénitude, soit la Gloire et l’Adoration dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon 

 

 

 

 

 


samedi 8 mars 2025

Triomphe de l’Orthodoxie

   

 (Jean  1, 43 – 51)

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

 

 

Aujourd’hui, l’Eglise Orthodoxe célèbre le « Triomphe de l’Orthodoxie », elle nous transmet le témoignage de ceux et celles qui étaient autour du Christ, qui ont accueilli  son enseignement, l’ont mis en pratique et ont parfois donné leur vie par le Martyre dans leur certitude intérieure que le Christ était la Vérité Absolue incarnée. Cette vérité de la « foi, de l’espérance et de la charité » est venue jusqu’à nous à partir des Apôtres, de leurs successeurs les Evêques et de nos saints Pères et nos saintes Mères en Dieu. Cette vérité divino-humaine est conservée précieusement avec amour et dans toute sa beauté théologique, liturgique et spirituelle dans notre sainte Eglise orthodoxe. La Tradition iconographique que nous célébrons aujourd’hui, témoigne de la grâce engendrée par sa présence vivifiante qui illumine de lumière céleste l’Eglise, notre âme et le monde. Je nous propose avec la grâce du Saint-Esprit de méditer ensemble sur ce que signifie, pour chacun et chacune d’entre nous, le fait d’être orthodoxe, d’apprendre à devenir une icône pascale et véridique par l’ascèse orthodoxe qui a vocation d’unir la personne humaine avec les Personnes divines.

 

Pour contempler cet « être orthodoxe », il nous faut garder à l’esprit : « que Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne dieu », existe t-il dans ce monde éphémère un projet plus désirable ou plus digne pour l’être humain aimé de Dieu ? Si par la grâce divine et l’intelligence du cœur, nous accueillons avec foi notre vocation à être déifié en accomplissant Dieu bénissant les œuvres évangéliques, nous serons des témoins réels de la vocation divino-humaine de l’Eglise.

 

Si être orthodoxe, c’est glorifier et louer Dieu dans la justesse, alors en vérité, seul est orthodoxe dans toute sa plénitude divino-humaine, Celui qui a dit : « Père du ciel et de la terre, Je te loue de ce que tu as caché cela aux yeux des sages et des intelligents de ce monde, et que tu l’ai révélé aux petits ». Chacun d’entre nous est invité, à devenir un de ces petits que l’Eglise du Christ engendre et doit faire croître spirituellement en « taille, en grâce et en sagesse devant Dieu et parmi les hommes ».

 

Nous voilà invités à acquérir la sainteté et à devenir dieu par la « grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, l’amour de Dieu le Père et la communion du Saint Esprit », pourquoi ? Pour  offrir à notre tour, sur le modèle unique du Seigneur Jésus, personnellement et ecclésialement la louange juste à la Divine Trinité. Etre orthodoxe, c’est croire que l’Eglise est cette terre sainte et sacrée dont je suis une pierre précieuse, ciselée par l’humilité, l’amour et la vérité à travers la célébration liturgique. Croire qu’au cœur de l’Eglise se trouve la personne et qu’au cœur de la personne habite la Divine Trinité, contempler l’Eglise comme l’icône véritable et parfaite qui contient toutes les icônes particulières.

 

L’Eglise orthodoxe est la maison de l’être orthodoxe, son lieu de vie, où le croyant fidèle et de bonne volonté, reçoit toutes les grâces et bénédictions utiles pour accomplir son existence de chrétien orthodoxe au cœur même du monde. L’Eglise seule peut tenir sa promesse au Nom de Dieu et donner à tout homme et à toute femme qui le désire vraiment, la certitude et la plénitude du salut dans l’amour, la vérité et la sainteté.

 

Si j’aime quelqu’un, alors je suis prêt à faire tout ce que je peux pour cette personne, je veux être avec elle le plus et le mieux possible, il en est de même pour la sainte Eglise, si je l’aime ou si j’ai le désir d’apprendre à l’aimer, alors je vais tout faire pour la connaître, je la considère comme ma bien-aimée et je veux savoir qui elle est, ce qu’elle fait, en un mot vivre avec elle. Je me prépare à cette rencontre divino-humaine, je ne viens pas au rendez-vous au dernier moment où pire en retard, je viens m’imprégner tout entier de l’ambiance spirituelle du lieu saint et vivifiant, je suis tourné tout entier vers le Bien-Aimé Seigneur Jésus que mon cœur désire, appelle et espère.

Pour accéder à la sainteté, nous devons avec notre Bien-Aimé Seigneur, désirer devenir saint, croire que c’est notre vocation, si nous la pensons inaccessible, elle le devient effectivement et nous rend incapable de cultiver le vie et la voie orthodoxe. Cultiver la sainteté, la goûter, la toucher, la sentir, la regarder et l’entendre et cela très concrètement par l’expérience personnelle, ici et maintenant. Où direz-vous peut-être ? Dans ce lieu saint et béni qu’est l’Eglise, comment ? Par la pratique assidue, religieuse et spirituelle de la Divine Liturgie qui nous donne « ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme, mais que Dieu révèle à ceux qui l’aiment et qui croient de tout leur cœur en lui ».

 

Nous sommes tous ici l’Eglise et aussi les dépositaires de ce que nous lisons dans les Actes des Apôtres : « L’Esprit Saint et nous avons décidé que … ». Cette décision commune et unanime est le trésor spirituel toujours vivant et vivifiant qui nous est confié dans la Sainte Eglise orthodoxe. Chacun et chacune d’entre nous est invité à témoigner par sa vie de cette réalité spirituelle qui est le fondement de l’être personnel et de l’Eglise, et cette expérience peut nous donner, peu à peu, le discernement intérieur en vue de la louange juste de Dieu.

 

L’hérésie est ce qui est partiel et partial. C’est ce qui veut imposer, même dans l’Eglise, y compris par la force, la partie comme étant le tout de la vérité révélée. C’est pourquoi, lorsque nous sommes tentés de vouloir imposer notre vision individuelle de l’Orthodoxie, nous devons nous souvenir avec humilité que l’Eglise est le visage lumineux de Dieu dans notre monde, et par là même opposée aux masques grimaçants des ténèbres inhumaines. L’Eglise est éternelle en Dieu, pourquoi ? Parce qu’elle est le Corps et la Tête du Christ, le Corps Ressuscité, elle est le Corps religieux, mystique et spirituel du Seigneur Jésus, elle est aussi notre corps par la grâce divine, ne sommes-nous pas comme dit l’apôtre Paul « temple de l’Esprit Saint ».

 

Confessons et accueillons humblement la Foi orthodoxe, reçue comme un héritage divin, vivons là afin de nous garder avec la bénédiction divine, de toute « chute », à l’image de celle qu’ont connu nos ancêtres, Adam et Eve. Tant que prédomine en nous l’esprit du monde et l’individualisme, nous resterons aliénés et aucune liberté réelle ne pourra exister, car seule la dimension de « personne est icône des Personnes Divines ». C’est pourquoi confesser la Foi orthodoxe par l’être orthodoxe consiste à prendre comme « Guide unique le Christ » et non les séducteurs hypocrites qui veulent nous transformer en objet. Prions l’Esprit Saint de nous configurer à l’image de Dieu en nous pour réaliser, le retour progressif à la ressemblance de Dieu.

 

Etre orthodoxe, c’est apprendre à « aimer sans conditions imposées à l’autre », fussent-elles spirituelles, semer, cultiver et vivre en nous l’enseignement évangélique. Mais pour aimer sans condition, je dois apprendre auprès de l’Amour qui est Dieu comment L’aimer « de tout mon cœur, de toute mon âme, de tout mon esprit et de toutes mes forces…», afin d’espérer un jour « aimer mon prochain comme moi-même ». Le Seigneur nous a clairement montré comment lui témoigner réellement notre amour, en disant : « celui qui m’aime, c’est celui qui garde Mes commandements et les mets en pratique », celui qui croit aimer sans Dieu ne serre dans ses bras que ses illusions et se prépare une existence de déceptions amères.

 

L’un des commandements pour un orthodoxe, c’est sa présence dans l’Eglise, selon cette parole du Christ « venez et voyez », pour apprendre à connaître comment Dieu se révèle à nous, selon la réalité de notre foi en lui, selon la qualité de notre désir de le connaître et de l’aimer. Ne pas venir avec régularité et persévérance dans la sainte maison de Dieu, est incompatible avec être orthodoxe. Sans l’Eglise, nous les orthodoxes nous nous dépouillons nous-mêmes de l’essentiel, et nous privons nos enfants de leur identité religieuse profonde, le Christ ne dit-il pas « laisser venir à moi les enfants, ne les empêchez pas », alors comment justifierons-nous notre absence ?

 

Etre orthodoxe, c’est « apprendre à se réjouir de notre vie en Dieu » en demandant à Dieu la Joie dont le Christ nous dit « que nul ne pourra nous la ravir ». Comprenons que, dans l’espérance de ce Don, nous ne devons pas désespérer de voir les fluctuations de nos états d’âme, mais apprendre à convertir toute tristesse malsaine et persévérer tranquillement en Dieu.

 

Etre orthodoxe, c’est « apprendre à être paisible dans notre existence » en demandant à Dieu la Paix dont le Christ nous dit : «  qu’elle dépasse toute intelligence », pacifier nos impatiences et nos irritations, ne pas faire de discours pseudo spirituels. La paix du Seigneur n’est pas un objet de discussion voire de dispute, au milieu d’un « aéropage de soit disant sages mondains auto-satisfaits et qui auraient l’esprit tellement plus ouvert, que notre Eglise orthodoxe ».

 

Etre orthodoxe, c’est « apprendre à imiter sans cesse » ce que le Christ dit de lui-même : « apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur », œuvrer encore et encore, pour transformer notre cœur de pierre en cœur de chair, nous humaniser, ne pas s’inquiéter outre mesure de nos échecs, un temps viendra où Dieu nous donnera Lui-même sa douceur et son humilité.

 

Etre orthodoxe, c’est « apprendre la patience par la maîtrise de soi », apprendre à accepter ce que Dieu permet, avec la certitude que le Christ réalisera en nous toutes Ses Promesses, même si rien ne semble aller comme nous le souhaiterions. Etre orthodoxe, c’est « apprendre à devenir un témoin vivant » de la Divine Trinité, c’est œuvrer sans cesse pour engendrer en soi l’union de l’image et de la ressemblance à Dieu, être orthodoxe relève fondamentalement de la « personne » qui naît de Dieu, par Dieu et pour Dieu.

 

Etre hérétique, c’est ne pas croire que ce qui précède est consubstantiel à la nature humaine, et donc de générer des caricatures d’individus plus ou moins malades spirituellement, au lieu d’engendrer des icônes de la Divine Trinité. L’hérétique regarde le monde avec les yeux du monde, l’orthodoxe regarde le monde et l’humanité avec le regard de Dieu, l’hérétique divise le monde en savoirs partiels pour dominer l’humanité, l’orthodoxe unifie l’homme et le monde dans la sagesse créatrice, pour servir cette même humanité.

 

Etre orthodoxe, c’est « confesser que notre sainte Eglise orthodoxe » est vraiment ce mystère unique et universel qui invite l’humanité entière à y pénétrer, car « le Royaume de Dieu est proche, il se laisse toucher », nous dit saint Paul. Alors selon la promesse du Seigneur à la fin de l’évangile que nous venons d’entendre, si nous croyons, nous verrons comme Nathanaël « en vérité, le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre au-dessus du Fils de l’Homme ». Où et comment pouvons-nous déjà voir cela ? Dans l’Eglise, par la présence réelle de Dieu qui illumine l’intelligence par la médiation de la grâce liturgique, et nous fait concélébrant des très saints mystères du Seigneur.

 

Toute pensée, parole ou acte qui ne devient pas prière en nous pour s’enraciner en Dieu, rend caduque notre désir à incarner la vie orthodoxe. Demandons, prions et supplions Dieu de nous unifier et de faire de chacun et chacune d’entre nous une « personne orthodoxe, c’est à dire, un christ », c'est là notre vocation depuis l’origine et pour l’éternité.

 

Au Père Source unique de l’Amour, au Fils qui a donné Sa vie par Amour et à l’Esprit qui nous garde dans l’Amour, soit la Gloire dans les siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon

jeudi 27 février 2025

L'ascese bienheureuse

Le livre « l’ascèse bienheureuse » écrit par Père Syméon Bender est disponible pour les personnes qui le souhaitent et peut être acheté chez l’auteur au prix de 28 euros + frais de transport selon la destination. Pour toute commande, merci de me contacter par message privé.                                         Ce livre peut servir de méditation en ce saint temps de Carême pour se préparer à la montée vers Pâques.



 

dimanche 23 février 2025

Le Jugement dernier

 


(Matthieu 25, 31 – 46)

 

 

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.

Aujourd’hui, s’accomplit pour chacun et chacune d’entre nous ce que l’Evangile vient d’annoncer, à savoir la venue du Roi de Gloire et notre jugement, c'est-à-dire que l’Esprit de Dieu nous inspire de discerner dans quel état spirituel nous sommes, afin de ne pas communier au Corps et au Sang du Christ pour notre condamnation, mais pour la guérison de notre âme et de notre corps.

 

Vous savez que ce Jugement de Dieu a commencé dès la Chute dans le Paradis et que depuis, l’humanité est devenue ce grand corps souffrant dont chacun d’entre nous est porteur. Depuis la Chute, nous portons les signes de notre séparation d’avec Dieu et voici que chacun d’entre nous se retrouve spirituellement nu, malade, affamé, assoiffé, emprisonné,  étranger à lui-même et éloigné de la communion avec Dieu ; et l’ennemi du genre humain continue de se servir du vieil homme en nous pour perpétuer notre aliénation psychosomatique. L’Eglise orthodoxe continue à témoigner de la Présence de la Divine Trinité qui sonde les reins et les cœurs, non pour nous punir mais pour nous purifier et nous sanctifier. Entrer dans l’Eglise, c’est pénétrer spirituellement dans le Saint des saints, et nous inviter à prendre conscience de l’état de notre robe nuptiale, c’est à dire de notre préparation spirituelle avant de participer au Banquet eucharistique.

 

Symboliquement, nous pouvons considérer qu’il y a une unité spirituelle entre notre corps-temple de l’Esprit-Saint, l’Eglise corps du Christ et le Royaume de Dieu ; cette unité signifie qu’il y a lien religieux toujours possible entre Dieu et l’homme mais aussi entre l’homme et l’homme. Le Royaume de Dieu est la véritable patrie de l’humanité rachetée par le Christ et l’Eglise représente les portes royales par lesquelles nous apprenons à voyager vers Celui qui ne cesse d’espérer le retour de l’humanité prodigue. C’est pourquoi le Seigneur Christ nous dit cette parole : « En vérité, je vous le dis, ce que vous aurez fait à l’un de ces petits, c’est à moi que vous l’avez fait » ? Cela veut dire que tout être humain est un de ces « petits » et un « christ » en puissance et qu’il porte en lui toute la sagesse théologique par laquelle il peut devenir « un vivant », se détourner de l’un de ces petits que sont nos frères et sœurs en humanité, c’est comme s’abandonner soi-même et rompre l’humaine condition qui nous est consubstantielle. Ces petits ne sont pas seulement l’autre, ils sont icones et métaphores dans l’homme de son corps, de son âme, de son esprit et de son cœur qui a vocation d’unifier l’être par l’amour et la vérité.

 

Un de ces petits est donc le « corps », qui se retrouve nu si nous oublions qu’il a permis à Dieu lui-même de s’incarner et de naître parmi nous, tout comme il nous permet d’incarner notre dimension spirituelle, il est une pierre vivante pour édifier en lui notre vie extérieure et intérieure. Etre nu, c’est cultiver en nous des modèles psychiques sans consistance qui ne sont que des idoles caricaturales et vides d’où l’homme réel est absent et comme englouti dans le marasme des pensées stériles incapables d’accueillir la présence divine, et qui comme pour Adam et Eve nous obligent à nous cacher devant la Face du Seigneur à cause des tourments qu’inflige à notre âme désorientée le vieil homme et la vacuité des fantasmes du monde.

 

Un autre de ces petits est notre « âme » qui s’étiole si elle n’est pas vivifiée par la louange divine qui seule peut cultiver en nous le goût de la vie en Dieu, avec Dieu et pour Dieu, elle a vocation d’aimer et d’être aimée, car dit le Psalmiste : « Qu’il est doux, qu’il est bon pour des frères et des sœurs de vivre ensemble ». Le monde peut-il donner ce qu’il n’est pas et ce  qu’il n’a pas ? Peut-il rassasier et désaltérer les affamés et assoiffés de l’essentiel qui est ce désir spirituel naturel qui habite l’être crée par Dieu.

 

Un autre de ces petits est notre « esprit », qui est malade si nous laissons la vaine sagesse du monde et des modes spiritualistes nous envahir et en faire un infirme spirituel aveugle et sourd, au lieu de lui apprendre à contempler notre Seigneur. Nous pouvons chacun et chacune trouver en nous ce qui nous mérite le reproche de dénuder, affamer, assoiffer, rendre malade et emprisonner le Christ en nous et dans notre prochain. La thérapie ici, c’est l’accomplissement  avec l’aide de Dieu, de l’Eglise et des uns avec les autres de l’enseignement du Christ : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu… et ton prochain comme toi- même ».

 

Peut-être demanderez-vous, comment convertir en moi ce qui me persécute et m’empêche de bénir le Christ, et sauver avec sa grâce ces petits qui m’implorent du fond de mes entrailles ? L’ascèse qui convient ici, c’est de mettre en œuvre les « Béatitudes », demander sans se décourager à Dieu la grâce de cultiver en nous la triade spirituelle donnée à l’humanité en Adam, c'est-à-dire, « apprendre à vivre en roi, en prêtre et en prophète ». Apprendre à gouverner ma vie à l’image du Roi des rois, c'est-à-dire par l’humilité, ne pas asservir l’autre ni servir ma volonté propre mais servir la sainte Eglise du Christ et faire l’unique volonté du Père Céleste. Prêtre, pour nous bénir les uns les autres, intercéder les uns pour les autres, concélébrer les uns avec les autres, afin que notre vie devienne peu à peu une icône de la vie des Personnes Divines. Prophète, pour ne pas oublier que notre vie en ce monde devrait devenir une sainte Pâque, notre passage spirituel vers le Royaume de Dieu, pour nous annoncer sans nous lasser la Bonne Nouvelle de l’Evangile de Vie, pour refuser enfin de nous laisser aliéner par les pensées, les paroles et les actes psychiques infusées en nous par la voracité du monde.

Maintenant, si je prends pleinement conscience de ce que je suis en vérité dans le cœur du Père, alors je peux pressentir quelque chose de la sainteté de la Divine Liturgie et de l’Eglise, de la Sainteté de Dieu et de ma propre vocation à la sainteté, je pressens que je ne peux répondre à une telle réalité spirituelle que si je désire avec ardeur et ferveur, être non pas juste une individualité revendicatrice, mais une personne qui veut librement vivre une véritable communion avec Dieu et avec l’autre. Comment Dieu connaissant mes faiblesses psychiques et charnelles, veut-Il m’aider à devenir une telle personne spirituelle ? En me revêtant de splendeur et de majesté, afin que je sois par grâce ce que Lui Dieu est par Nature, c'est-à-dire, en me faisant participant de Ses Energies divines. Où et comment ? Par la concélébration de la Divine Liturgie des Saints Mystères du Christ.

 

Pour que je puisse grandir comme notre « saint Christ en grâce, en beauté et en sagesse devant Dieu et parmi les hommes », dans l’Eglise et dans la vie quotidienne, Dieu vient personnellement, Lui, doux et humble de cœur, vers chacun et chacune d’entre nous, pour demander si « je » veux Lui accorder l’hospitalité intérieure. Et tout comme les rois mages étaient venus s’agenouiller devant l’Enfant Divin pour lui offrir l’or, l’encens et la myrrhe, voici que notre saint Christ, si j’ose dire, se met à genoux devant chacun et chacune d’entre nous, certes non pas pour nous adorer, mais pour déposer à nos pieds, les dons du Saint-Esprit. Nous les goûterons si nous apprenons à mettre en pratique : « l’amour, la joie, la paix, la douceur, la patience, la maîtrise de soi », qui sont les saints et spirituels ornements sacerdotaux et la matière spirituelle de la sainte robe nuptiale de la « foi » pour aller célébrer et communier aux saints Mystères de l’Eglise et du Royaume du Christ.

 

Que Dieu notre Père et Roi Eternel, nous bénisse par notre Christ l’unique et seul Grand Prêtre et par l’Esprit prophète qui nous annonce que l’Amour ne passera pas, à la Divine Trinité soit la Gloire dans siècles des siècles, amen.

 

+ Syméon