EGLISE ORTHODOXE, SERBE, LILLE Metropole
La paroisse SAINT MILUTIN, des Hauts de France rassemble les orthodoxes serbes et de toutes nationalités et les personnes de bonne volonté. Voici les dates des célébrations, les homélies, les enseignements, les articles, les liens, l'actualité de la paroisse etc....
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dimanche 27 juillet 2025
dimanche 20 juillet 2025
La Guérison du Paralytique de Capharnaüm (Mt 9,1-8).
Homélie du P. Jean Breck
Sixième dimanche après la Pentecôte 2024
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.
Le récit de la guérison du paralytique de Capharnaüm se trouve
dans les trois Évangiles synoptiques, Matthieu, Marc et Luc.
Chaque évangéliste l’a reçu d’une source orale commune, mais
chacun l’a légèrement modifiée, pour accentuer un aspect qui lui
paraissait particulièrement important.
Dans chacune des versions de l’histoire, les évangélistes
mettent un accent crucial sur la réponse de Jésus à l’action des hommes qui ont apporté
le paralytique : « Voyant leur foi, Jésus dit, ‘Tes péchés sont pardonnés’ ».
Il s’agit de la foi, non pas du malade, mais de celle des quatre amis qui l’ont porté sur
une civière pour le placer devant Jésus. L’effort de ces hommes est bien accentué par
saint Marc. Celui-ci raconte en détail la manière dont les quatre amis ont apporté le
paralytique. Trouvant l’entrée de la maison bloquée par la foule, ils sont montés sur le
toit duquel ils ont enlevé quelques tuiles, et par le trou ils ont fait descendre le malade,
le posant devant le Maître-thaumaturge. C’est cet effort, signe d’une profonde amitié
entre le paralytique et les quatre assistants, qui amena Jésus à annoncer à l’homme que
ses péchés ont été pardonnés.
Le paralytique ne dit rien ; il ne demande rien.
C’est par la foi de ses amis qu’il a été guéri, voire sauvé.
Ceci a une immense importance dans nos relations avec autrui. Tous nous sommes
malades, tous nous sommes, dans un certain sens, paralysés. Tous nous sommes
dépendants d’autres personnes, pour nous faire sortir de nous-mêmes et trouver la
guérison dont nous avons besoin. Il arrive assez souvent soit que nous soyons ignorants
de notre maladie spirituelle, de nos fautes et de nos manquements, soit que nous soyons
handicapés par une souffrance personnelle, au point où nous sommes incapables d’en
imaginer une issue, la possibilité d’une véritable guérison.
Une mère vient se confesser à son prêtre et ne peut parler que de son fils, un
adolescent qui s’adonne à des stupéfiants. Une autre femme se présente en larmes
AU SERVICE DES ORTHODOXES DE LANGUE FRANÇAISE
FEUILLET DE ST SYMÉON
N°299 SIXIÈME DIMANCHE APRÈS LA PENTECÔTE COMPLÉMENT 2025
devant l’Évangile et la croix. Son mari, depuis longtemps aliéné de l’Église, souffre d’une
maladie incurable et refuse d’en parler avec l’aumônier de l’hôpital. Puis, un jeune
homme subit un grave accident de voiture. Sachant qu’il sera handicapé toute sa vie, il
tombe dans une dépression si profonde que personne ne peut le consoler. À la
suggestion qu’il prie et demande un rétablissement définitif, il répond par des injures et
sombre dans l’apitoiement de soi-même.
De tels exemples concernent les personnes – et il y’en a beaucoup – qui pour une
raison ou une autre, ne peuvent pas ou ne veulent pas se tourner vers Dieu. Elles sont
comme le paralytique qui est gravement malade, mais qui n’a aucun moyen de sortir
seul de son mauvais pas.
La promesse de l’Évangile, c’est que nous pouvons prier les uns pour les autres, et le
Christ écoutera.
Comme les quatre amis du paralytique, nous pouvons apporter une autre personne
au Christ par notre intercession, et cela sera accordé, la guérison sera accomplie.
« Si vous demeurez en moi, dit Jésus, … vous demanderez ce que vous voudrez et cela
vous arrivera» » (Jean 15,7).
« Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai », dit-Il (Jean 14,13).
Cependant, notre expérience personnelle nous donne l’impression que Dieu n’écoute
pas toujours notre prière. Je prie pour moi-même ou pour un être bien-aimé, et Dieu
semble faire la sourde oreille. Une maladie ou une autre situation de crise se poursuit, et
l’intercession, parait-il, ne sert à rien…
Ceci, pourtant, est une illusion, fondée sur la conviction que la vie terrestre est tout ce
qui existe. En réalité, nous somme nés et nous vivons pour une seule raison. En bonne
santé ou en mauvaise, l’essentiel est de tout remettre à Dieu, dans la ferme conviction
que toute prière sera exaucée, soit dans le présent, soit dans la vie à venir. Il faut se
rappeler que notre existence ici-bas n’est que des prémices, un avant-gout d’une
existence comblée de joie et de gloire, l’espoir d’une existence bénie par une
participation personnelle et éternelle à la gloire du Christ ressuscité.
Le paralytique était béni par la guérison de son corps et de son âme lorsqu’il était
« dans la chair ». Et cela pour que Jésus puisse manifester son autorité de pardonner les
péchés. La vraie guérison de notre âme et de notre coeur, pourtant, aura lieu lorsque
nous, et tous ceux pour qui nous prions, aurons fait le grand passage pascal, de la mort à
la vie, pour vivre « sans honte et sans douleur » dans la lumière resplendissante de la
Face du Christ.
Amen.
samedi 12 juillet 2025
Deux possédés Gadaréniens
(Math. 8, 28 à 9,1)
Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, amen.
Aujourd’hui, l’Eglise nous emmène à la rencontre de deux possédés qui vivaient au milieu des tombeaux et d’aspect si sauvage que tous les redoutaient et les évitaient, leur apparence était inhumaine et pourtant ils sont poussés par les démons à la rencontre de Jésus et crient « que nous veux-tu, Fils de Dieu, es-tu venu ici pour nous tourmenter avant le temps » ?
Voici donc là, devant nous, deux démoniaques et non pas deux démons mais deux êtres humains qui sont possédés par une horde de démons et rendus incapables par eux-mêmes de demander l’aide du Seigneur, quel paradoxe, ce sont les démons qui reconnaissent Jésus comme le Fils de Dieu et qui viennent le supplier de ne pas les tourmenter avant l’heure, mais de les envoyer dans un troupeau de porcs. Quelle est donc l’heure que les démons eux-mêmes craignent, sinon celle du « Jugement ». « Allez » leur dit le Christ qui par sa seule parole chasse les démons et libère les deux possédés de l’emprise démoniaque qui les maintenaient dans une servitude inhumaine.
L’Ecriture ne dit mot sur ce que sont devenus les deux hommes libérés ni sur comment comprendre l’attitude du Christ qui exauce la demande des démons, nous sommes invités ici à prendre conscience du sens des œuvres du Seigneur pour en tirer un enseignement vivifiant pour notre vie spirituelle. Le Seigneur n’exauce pas les démons terrifiants pour eux-mêmes, mais pour l’amour qu’il porte à l’homme quelque soit son état de chute dans lequel il est tombé. Nous voyons avec étonnement et le cœur serré qu’une fois de plus les « gens » avertis du miracle puissant que vient d’accomplir Jésus ne ressentent qu’un sentiment de peur voire de terreur qui engendre le refus d’accueillir Jésus parmi eux.
« Que nous veux-tu Fils de Dieu ? », les démons par cette parole ne se soumettent pas au Christ dans un esprit de repentir, mais ils sont épouvantés par la puissance de la présence divino-humaine de Jésus, ils savent qu’ils ne sont rien devant lui et qu’ils ne peuvent rien contre lui. Les démons ont une nature qui leur est commune et donc, ils savent que Satan a essayé de tenter le Seigneur Jésus à trois reprises sans succès, d’où leur terreur incontrôlable devant le Fils de Dieu. Si donc, nous ne comprenons pas la profondeur de l’œuvre du Seigneur, c’est que le Seigneur selon saint Jean Chrysostome « veille sur chacun et chacune d’entre nous selon l’état spirituel dans lequel nous sommes » et donne avec discernement à chacun et chacune ce qui est le meilleur en tout temps et en tout lieu pour notre salut personnel.
En Marc, 1, 24 nous lisons un témoignage similaire qui confirme l’unité consubstantielle de la nature démoniaque, là aussi il s’agit aussi d’un homme possédé d’un esprit impur et qui se trouvait dans la Synagogue, le démon crie dans l’homme possédé vers Jésus « que nous veux-tu, Jésus le Nazaréen, es-tu venu pour nous perdre, je sais que tu es le Saint de Dieu », ainsi la clique diabolique ne peut s’empêcher de reconnaitre la divinité ou la sainteté du Rabbi Jésus, mais que voyons-nous dans la réaction sans intelligence des gens de Gadara comme des Juifs qui étaient présents dans la Synagogue, les premiers supplient le Christ de s’en aller et les Juifs furent « tous effrayés » de la puissance de Jésus, ce « Prophète puissant en œuvres et en paroles » qui parcours Israël et qui montre que le Royaume de Dieu est déjà là avec lui.
Si donc, les témoins directs des miracles et de l’enseignement spirituel vivifiant du saint Rabbi Jésus ne suffisaient pas à convertir les hommes et les femmes présents, c’est que comme nous l’annonce le Psalmiste en Ps. 135 « les idoles des nations sont faites d’argent et d’or, elles ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas, ils leurs ressemblent tous ceux qui les fabriquent et qui se confient en elles, etc ... », l’idolâtrie du monde sans Dieu, dénoncée par le Psalmiste est la voie perverse dans laquelle les démons cherchent à entrainer l’humanité.
Si nous rapprochons l’expérience dramatique des deux possédés Gadaréniens avec le possédé Gérasénien, nous voyons la grande similitude des actions et des effets de la possession par les « esprits sous ciel » dont parle saint Paul. Les tentations et attaques pratiquées par les anges des ténèbres se poursuivent aujourd’hui, mais comme le souligne le Père Boris Bobrinskoy dans une homélie de 2005 « elles sont plus perfides, cachées, et se faufilent volontiers dans le brouhaha des médias et dans les scénographies séductrices d’internet » qui déversent nombres « d’infos » au service des idoles frelatées et faussement compatissantes qui vous assomment avec leurs minuscules petits conseils pour vous guérir du passé douloureux, vous protéger du présent et vous assurer un avenir radieux.
L’Ecriture sainte nous rappelle que tout ce méli-mélo chaotique décrit plus haut n’est que « vanité, rien que vanité, il n’y a en tout cela rien de nouveau sous le soleil », le monde mondain préfère se détourner du Maitre divino-humain de la sagesse et continuer à s’extasier devant les ridicules séances du Net. Saint Pierre dans son épître affirme que « le démon est comme un lion rugissant qui rôde, cherchant qui dévorer », c’est pourquoi, dans le rite du saint Baptême orthodoxe le prêtre chasse les démons par le Nom du Christ et demande avec insistance au futur baptisé « renonces-tu à Satan, à ses anges et à toute sa pompe » ?
Les deux possédés Gadaréniens et le possédé Gérasénien vivent une expérience similaire, dans les deux situations les possédés sont dépouillés de leur « humanité » et « animalisés » leur aspect terrorise ceux qui les croisent, leur solitude est extrême, leur misère est totale, ils sont mis au ban de la religion et de la société, et ne trouvent de lieu habitable que dans les déserts ou les cimetières parmi les morts qui eux aussi sont plus ou moins des oubliés. Ces lieux où aucun être humain vivant ne devrait habiter, ni dans la vie sauvage du désert ni dans la proximité des tombeaux.
En Marc 9, 18 nous lisons qu’un père s’est adressé à Jésus pour lui dire « j’ai demandé à tes disciples d’expulser l’esprit muet qui a pris possession de mon fils, mais ils n’ont pas pu », le Seigneur répond que ce démon ne peut être chassé que par le « jeûne et la prière », cela est vrai de beaucoup de cas de possession diabolique, le monde sans Dieu dit que tout cela ce sont des vieilles lunes auxquelles, ne peuvent croire que les naïfs ou des religieux attardés liés par leur obscurantisme d’un autre temps.
Ne sommes-nous pas, plus ou moins tentés à temps et à contre temps par toutes sortes de désirs qui nous travaillent en nous et autour de nous, le Seigneur lui-même nous appelle à la vigilance, n’est-ce pas cette veille qui est au cœur de la prière du Notre Père où nous prions Dieu de « ne pas nous laisser succomber à la tentation...mais de nous délivrer du Malin », c’est donc bien Dieu seul qui peut nous sauver et nous délivrer de l’assaut récurrent contre celui que nos Pères saints nomment « le Malin, menteur et père du mensonge », la possession est le signe manifeste du mensonge mortifère qui voile notre « discernement des esprits »pour nous entraîner dans les ténèbres du péché.
Les démons crient au Seigneur « es-tu venu ici pour nous tourmenter avant le temps », de quel tourment parlent-ils ? De celui de la « Vérité qui libère l’homme » qui réduit à néant toutes les apparences et toutes les illusions diaboliques, qui découvre la nudité misérable et la faiblesse des démons qui en vérité ne sont rien et ne peuvent rien, car nous savons avec certitude par la foi orthodoxe que « pas un seul cheveu ne tombera de notre tête sans la volonté du Père ».
Satan est non seulement « menteur et père du mensonge », il est aussi le grand hérétique parmi les anges, celui qui susurre que l’homme étant comme Dieu tout lui est permis sans Dieu, avec de telles pensées empoisonnées il œuvre dans le but de séduire les âmes et instiller le poison du doute afin que disparaisse toute religiosité et spiritualité tournée vers Dieu.
Le Christ est la « Vérité » et il propose à l’homme de se nourrir de cette vérité pour acquérir la parfaite sagesse créatrice, qui lui permettra d’être une personne libre et spirituelle, une personne nouvelle engendrée par l’amour, la grâce et la lumière divine. Satan est le grand hérétique, l’Anti-Christ, celui qui essaye sans cesse d’inoculer le poison mortel du péché dans le cœur des hommes, il ne cesse de tenter l’humanité depuis les jours d’Adam jusqu’à aujourd’hui.
Le Christ est la « Vie » et il propose à l’homme cette vie en plénitude non seulement dans ce monde mais pour l’éternité, car comme le dit saint Irénée de Lyon « la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant ». Satan est la puissance maléfique et mortifère, qui pour nous tromper n’hésite pas à mettre les masques de la séduction ténébreuse, et là où Dieu nous donne la vie, Satan veut nous entrainer vers la mort.
Le Seigneur s’adresse aux possédés comme à des hommes et non comme à des possédés, il voit à quelle profondeur de souffrance, de solitude et de désespérance sont réduits ces « hommes créés à son image et à sa ressemblance », Dieu n’est pas absent de la vie humaine et de ses réalités, ces hommes possédés ont pourtant trouvé dans leur malheur extrême, malgré la possession démoniaque un passage sûr et providentiel qui les a mené au Seigneur.
Le mystère de l’homme est un abîme que seul l’esprit unit à l’Esprit peut sonder et connaître, les démons déchus n’ont aucune conscience de la « profondeur, de la largeur, de la hauteur et de la longueur de l’amour de Dieu pour l’homme », la vie liturgique ecclésiale et la voie de la prière personnelle suivie et pratiquée avec persévérance est la meilleure des défenses contre les ennemis de Dieu, de L’Eglise et de l’homme ou de la femme de bonne volonté.
Au Père qui a expulsé Satan du Paradis, au Fils qui l’a vaincu et à l’Esprit qui veille sur nous, soit la gloire, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles, amen.
+ Syméon
dimanche 6 juillet 2025
La Foi du Centurion.
(Matthieu 8 : 5 à 13)
Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen.
Aujourd’hui, notre sainte Eglise s’émerveille avec le Seigneur de la Foi cordiale et simple dont témoigne un centurion romain hétérodoxe et païen, qui s’adresse au Rabbin Jésus pour lui demander la guérison de son fils. Cela se passe à Capharnaüm, qui signifie la ville de Nahum, Nahum est aussi le nom d’un grand prophète qui annonce avec beaucoup de vigueur la volonté divine, qui appelle à la repentance du cœur en profondeur et à la conversion de l’esprit, à l’humaine métanoïa nécessaire de notre existence sans laquelle aucune vie religieuse ni guérison spirituelle ne sont possibles.
Dans Proverbe 12, 18 nous lisons « la langue des sages apporte la guérison », mais qui est donc un tel sage aux yeux de Dieu ? C’est ici ce centurion qui fait figure de sage, pourquoi ? Parce que comme le dit encore Proverbe en 9, 8 et 9 « reprends le sage il t’aimera » et « donne au sage, il deviendra plus sage », les sages sont à l’opposé des insensés dont Mathieu en 11, 25 dit « tu as caché ces choses aux sages », c’est à dire aux sages auto-proclamés, ces « choses » ce sont les œuvres divines accomplies depuis le commencement de la Création et dont la guérison aujourd’hui devant nous du fils du centurion est un témoignage. Quelle est la sagesse du centurion ? C’est de s’adresser avec foi et simplicité, au Rabbi Jésus auquel il se remet en toute humilité et confiance pour son fils malade.
Dans Proverbe 3, 7 nous lisons encore « ne sois pas sage à tes propres yeux » et saint Paul nous enseigne
dans l’esprit du Seigneur à méditer cette parole « se vantant d’être sages, ils dont devenus fous », et de plus en 1 Corinthiens. 4, 10 « vous êtes sages en Christ », n’est-ce pas ici même ce que nous voyons par l’attitude du centurion ! Si les sages le sont par la grâce efficiente du Christ et de la sève spirituelle de l’Ecriture, qui donc s’étonnera de ce que peut accomplir en plénitude la parole du « Verbe source de la sagesse des sages », selon cette autre parole à « Dieu appartient d’accomplir même l’impossible ».
« Je vais aller le guérir » dit le Seigneur au centurion, le Seigneur n’est mû que par l’amour pour cet homme et son fils souffrant, il ne cherche pas à savoir pourquoi le fils est paralysé. Simplement, « Jésus aime le centurion et son enfant paralysé, tout comme il aime chacun et chacune d’entre nous ». Aimer est pour le Seigneur, le cœur de toute son œuvre pour sauver l’homme. Le Christ est dans « l’intelligence du cœur », à l’écoute du centurion et de sa prière, comme il est à l’écoute de chacun d’entre nous, si nous décidons dans notre liberté personnelle de faire appel à Lui. Le Seigneur ne se livre pas à une discussion philosophico-théologique au sens universitaire qui se limite à une approche ratio-intellectuelle, il laisse se dire la « foi » du centurion qui permet d’engendrer le processus et le miracle de la guérison.
Nous pouvons voir dans ce fils malade, une métaphore de notre propre souffrance qui engendre notre paralysie spirituelle, le «vieil homme » en nous ne cesse de s’opposer à notre désir de guérison, et tout comme ce centurion nous savons que sans la grâce divine, il nous est impossible de convertir notre cœur blessé par nos épreuves existentielles. Le vieil homme en nous est né avec la chute d’Adam dans le Paradis, il est en nous la « cristallisation du péché » qui s’oppose à la vie et à l’être en plénitude. Le vieil homme est pétrifié dans ses habitudes et ne supporte aucune nouveauté, il reste bloqué dans son inertie et s’interdit ainsi à lui-même de faire l’expérience véritable du « mouvement, de la vie et de l’être » telle que proposée par Dieu dans l’Eglise et dans notre vie personnelle au cœur même du monde.
L’Ecriture sainte nous dit que le centurion est allé vers le Christ pour lui dire : « Seigneur, j’ai à la maison mon fils atteint de paralysie, et qui souffre beaucoup ». Le Seigneur l’accueille, le regarde et l’écoute, mais reste libre du poids inutile de l’émotivité psychique qui empêche habituellement les hommes d’agir de manière juste et avec discernement. Le Seigneur est pleinement présent et ressent de l’intérieur la compassion du centurion pour son fils ainsi que la souffrance silencieuse du fils paralysé. Le Seigneur s’émerveille de la foi du centurion et décide d’y répondre, en disant : « Je vais aller le guérir ». Ici, le centurion intercède pour son fils, mais Dieu ne nous a t-il pas faits « centurions spirituels » pour intercéder les uns pour les autres dans l’Eglise pour notre guérison et celle du monde.
L’Eglise nous remémore aujourd’hui l’exemple vivifiant de ce centurion, afin que nous puissions nous en inspirer, car nous avons vocation à intercéder auprès de Dieu avec « foi, espérance et amour » pour que l’humanité puisse se libérer de ce qui la paralyse dans son « corps, son âme et son esprit ». Les malheurs du monde, le chaos des dictatures, les failles et blessures provoquées par les attitudes inhumaines, ne peuvent trouver leur guérison véritable sans vie spirituelle personnelle et ecclésiale, pour irriguer et vivifier le cœur des hommes à travers la prière et l’intercession des uns pour les autres.
Devant la proposition du Christ de venir guérir le paralytique chez lui, le centurion répond : « Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole, et mon fils sera guéri ». Pourquoi se dit-il indigne d’accueillir le Seigneur sous son toit ? Parce que en tant que « païen », il ignore qu’il a été crée à l’image et à la ressemblance d’un Dieu, qui est Créateur et Père de l’humanité, mais sa foi en Jésus ce prophète charismatique va lui permettre d’entrer peu à peu en lui-même, pour accueillir avec confiance la grâce divine.
Ce centurion avant de rencontrer celui qu’il appelle « Seigneur », avait entendu parler de lui, il a alors « cherché et il a trouvé, il a demandé et il a reçu, il a frappé et Dieu lui-même lui a ouvert ». Il a ainsi pu expérimenter en esprit et en vérité que « prier, c’est ne plus être seul », ce centurion a été béni et guidé par la divine providence. La réputation de Jésus, comme prophète-guérisseur était arrivée jusqu’à lui, le centurion croyait sans hésiter que celui qu’il appelle là devant nous « Seigneur », peut accomplir même l’impossible et d’une seule parole guérir son fils, qui gît-là paralysé sous nos yeux, n’est-ce pas ce qui est arrivé !
L’Evangile nous dit encore : « A ces mots, du centurion, Jésus fut dans l’admiration et il dit à ceux qui étaient là : en vérité, je vous le dis, chez personne en Israël je n’ai trouvé pareille foi », et IL ajoute : « c’est pourquoi, beaucoup prendront place au festin du Royaume des cieux avec Abraham, Isaac et Jacob, alors que ceux qui étaient les fils naturels du Royaume des cieux seront jetés dehors ». Cette affirmation du Christ devrait nous faire méditer, comme Marie « toutes ces choses dans notre cœur », nous, qui sommes d’après saint Paul, « les enfants lumineux de l’Eglise ».
L’Eglise est la maison divino-humaine, dans laquelle se rencontrent la Cour Céleste, c’est à dire la Divine Trinité, la Mère de Dieu, les Saints et les Anges, et la cour terrestre, c’est-à-dire chacun et chacune d’entre nous. L’Eglise est ce lieu béni par Dieu et par les croyants, dans lequel à travers la célébration de la Divine Liturgie et des saints Offices religieux, nous pouvons acquérir l’expérience concrète, de la « foi, de l’espérance et de l’amour », envers Dieu et au service de l’homme.
Qui parmi nous, n’a pas à eu à un moment ou un autre besoin dans son existence, de la présence aimante et de la prière d’un « centurion spirituel », lorsque les épreuves de la vie sont trop fortes pour s’en sortir tout seul ? Seuls les vaniteux imbus d’eux-mêmes, pensent qu’ils n’ont besoin de rien ni de personne, mais l’homme humble sait qu’il ne peut rien pour se sauver lui-même. C’est pourquoi en tant que « chrétien orthodoxe » je suis par vocation un « intercesseur » pour toute l’humanité, et l’apôtre Paul nous rappelle « que la foi est agissante par l’amour et la compassion ». Dans l’esprit de Paul, l’amour parfait, c’est de ne rien exiger pour soi-même, ceci devrait être le véritable visage de l’Eglise. C’est pourquoi, la prière liturgique commune, qui nous réunit ici aujourd’hui, ne peut être qu’un don spirituel libre des uns pour les autres, des uns avec les autres, afin que nous puissions bénir ensemble, l’humanité et toute la création.
Alors que veut donc nous enseigner le Christ, en magnifiant et en louant ainsi la foi du centurion ? Sinon nous encourager à cultiver en nous avec humilité, la confiance absolue en Lui, le médecin de nos âmes et de nos corps. Il désire transformer nos doutes, nos peurs en foi inébranlable en Lui, en foi capable de déplacer les montagnes psychiques, intérieures ou extérieures qui paralysent notre quotidien. La « foi comme Don de Dieu est universelle », ce qui la différencie d’une personne à l’autre, c’est la relation personnelle que chacun met en œuvre envers et avec Dieu pour qu’elle puisse se révéler avec le maximum de plénitude.
Acquérir la « foi qui peut transporter et transformer nos montagnes intérieures », peut être reçue comme un don dans l’Eglise, par la participation liturgique régulière, à travers laquelle, nous pouvons apprendre à contempler notre Seigneur à l’œuvre au service de l’homme, son bien-aimé. La « foi » est un Don de l’Esprit Saint et l’Esprit de Dieu est à l’œuvre dans l’Eglise du Christ, la foi ne se donne pas au monde des apparences où règne la corruption, elle ne peut être reçue que par celui qui désire vraiment vivre le mystère spirituel de l’Eglise et qui croit en Dieu.
Le mystère de la foi et de la guérison spirituelles, ont tous deux comme source, l’Amour de Dieu envers l’humanité, nous croyons que la guérison essentielle est premièrement spirituelle, mais rien n’empêche le Seigneur de donner aussi la guérison corporelle, comme en témoigne l’évangile de ce jour. C’est pourquoi L’Eglise, qui est le corps du Christ et le temple de l’Esprit Saint, a vocation d’être d’abord « l’humble servante » de l’humanité. Le chrétien orthodoxe est donc celui qui intercède dans l’Eglise, afin que Dieu accueille toute personne qui crie vers Lui et espère entendre : « Je vais te guérir ».
Puis le Seigneur dit au centurion : « va, et qu’il t’advienne selon ta foi ! Et à l’instant même le serviteur fût guéri ». La foi du centurion est telle qu’il n’y a pas de distance entre sa demande de guérison pour son fils et l’accomplissement de cette guérison. Que Dieu nous accorde une telle « foi » par sa divine grâce et la prière de « notre ami », le centurion évangélique.
Le fou juge, punit et détruit et cela sans réfléchir, le fou est celui qui se croit sage à ses propres yeux, mais le sage accueille, regarde et écoute dans le silence et l’intelligence du cœur avant d’agir selon Dieu et avec Dieu pour restaurer l’homme dans sa dimension divino-humaine. Qui est ici le fou ? C’est l’homme sans Dieu et sans l’Eglise, l’homme sans Dieu et sage à ses propres yeux, devient aussi un homme aveugle et sourd, une caricature déformée de sa beauté originelle crée par Dieu. Et qui est pour nous l’homme de Dieu me direz-vous peut-être ? C’est « l’homme ou la femme » dont la vie et l’existence est tournée vers Dieu, n’est-ce pas cela devenir orthodoxe pour nous, prenons-nous conscience de ce que signifie « être orthodoxe » ? Pour nous, orthodoxes, il « n’existe qu’un seul et unique Sage qui est notre Seigneur Jésus-Christ ».
Si nous croyons cela, alors le Christ se révèlera à nous et nous aurons le désir naturel de lui ressembler, en partant de notre humanité, oui, tels que nous sommes, pour nous sanctifier avec l’aide de l’Eglise et croire que nous sommes concernés par cette parole qui affirme que « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne dieu », apprendre peu à peu à vivre selon l’ascèse évangélique. Si donc, nous désirons la sagesse en « esprit et en vérité », nous devons demander pour recevoir, chercher pour trouver, frapper pour que s’ouvre la porte de la communion avec l’Esprit Saint qui nous donnera comme nous l’enseigne le Christ, lui-même « la connaissance de la vérité qui nous rendra libre ».
L’Evangile n’est pas un manifeste en faveur du chaos des esprits, ni un roman à l’eau de rose dans lequel se noient les discussions de comptoirs ou une émission téléguidée pour tirer l’humanité vers le bas. La vie et la voie orthodoxe ne béniront jamais les faux-prophètes qui agissent dans les ténèbres de leurs âmes, et cela au sein même parfois de notre très sainte Eglise. L’Evangile est le livre de la « vie divino-humaine qui peut et veut engendrer l’homme dans l’amour spirituel, dans la beauté lumineuse qui transfigure et dans la sainteté qui sont l’accomplissement et le couronnement de notre vocation orthodoxe ».
Au Père qui nous fait Don de la Foi, au Fils qui nous guérit par Amour et à l’Esprit Saint qui nous garde dans l’Espérance, soit la gloire dans les siècles des siècles, amen.
+ Syméon
vendredi 27 juin 2025
Les lys des champs
mercredi 25 juin 2025
Les premiers disciples
(Mat : 4, 18 à 23)
AU Nom du PÈRE, du FILS et du SAINT ESPRIT, amen.
Aujourd’hui, notre sainte et splendide Église orthodoxe qui est la barque spirituelle que la Divine Trinité a placé au cœur du monde, nous enseigne en toute beauté et humilité comment le Seigneur continue de s’approcher de chacun d’entre nous, comme IL l’avait fait pour les pêcheurs de Galilée, pour nous dire : « suis-moi !
L’Ecriture nous dit : « IL vit deux frères qui étaient pêcheurs », deux hommes qui étaient là, occupés à accomplir leurs œuvres quotidiennes, tout comme nous, des hommes au milieu d’autres hommes et voilà que le Seigneur qui se promenait, s’approcha et leur dit : « venez et je vous ferais pêcheurs d’hommes ». Nous savons que toutes les paroles que le Christ prononce, nous sont directement adressées tout comme aux personnes qui apparaissent dans l’Évangile de vie, alors écoutons pour entendre.
L’Écriture sainte, dans le livre de la Genèse nous enseigne que le Père Céleste lui aussi se promenait dans le Paradis, à la brise du soir, avec le désir de rencontrer Adam et Eve, c’est à dire l’humanité crée pour lui dire, « suis-moi », moi ton Créateur, je t’invite à être le pasteur de la création entière et de la guider avec ma grâce et ta liberté vers la plénitude de la vie dans la vérité et la beauté. Cette divine rencontre première entre Dieu et l’humanité, interrompue par la chute originelle se poursuit aujourd’hui dans notre sainte Église orthodoxe, dans laquelle le Seigneur ne cesse d’aller vers l’homme son bien-aimé.
Ne sommes-nous pas saisis de l’intérieur, nos cœurs ne sont-ils pas brûlants, en contemplant cette réalité évangélique qui nous montre le Seigneur « doux et humble de cœur », qui ne cesse depuis le Paradis de marcher à la rencontre de l’homme, pour inviter celui-ci à faire la route ensemble. Cette Voie qui est le Christ lui-même, et qui peut nous mener de la terre au Ciel se réalise dans l’œuvre commune qui nous réunit ici et maintenant, à savoir la Divine Liturgie, célébration et rencontre essentielle entre Dieu et l’homme, entre l’homme et l’homme, entre l’homme et la création, pour accomplir l’unique nécessaire, notre salut en Dieu dans l’Église et au cœur de l’humanité de notre monde.
L’Évangile de vie, nous prend par la main et nous guide dans cette promenade divino-humaine qui a commencé avec notre Père dès notre création, qui se poursuit avec le Fils, et s’accomplit par l’Esprit de toute sainteté. Écoutons encore le Seigneur nous dire jusqu’où IL désire aller pour nous rencontrer dans ce pèlerinage spirituel, que dit-Il : « voici, Je me tiens à la porte et je frappe, chez celui qui entend et qui ouvre, j’entrerai avec mon Père et nous dînerons avec lui ». A quelle porte, le Seigneur frappe t-il, sinon à celle de notre cœur, qui représente les portes saintes et royales qui nous mènent au saint des saints dans la profondeur insondable et indicible de la « personne », là où est présent spirituellement le Royaume de Dieu.
Ce dîner promis par le Christ à celui qui s’ouvre à Dieu, est la célébration très lumineuse et très pure, de la très sainte Cène spirituelle et mystique, liturgie céleste joyeuse et pacifique, communion partagée par la Divine Trinité avec l’homme. Seul celui qui se souvient qu’il a déjà entendu le « suis-moi », reconnaitra qui est Celui qui frappe et se précipitera pour lui ouvrir, non seulement sa porte, mais toute sa vie et tout son être. Mais direz-vous peut-être, qui parmi nous a déjà entendu ce fameux « suis-moi », pour le reconnaître et dire amen ? C’est en Adam et Eve, père et mère de toute l’humanité que nous avons entendu cette parole « suis-moi » qui dès l’origine, nous a été transmise comme voie de retour vers notre Père céleste.
L’Église est bien cette barque lumineuse qui contient toutes les grâces données par l’Esprit de Dieu, pour que nous soyons chacun « pêcheur d’homme, c’est à dire d’abord de nous-mêmes », plus ou moins engloutis par les eaux troubles et usées du monde, pour accomplir notre sainte vocation qui est la vie divino-humaine, selon la sagesse de la voie spirituelle de l’orthodoxie. Cette pêche miraculeuse que représente le salut d’une seule âme, est le fruit de l’ascèse de toute l’Eglise du Christ.
Mais si nous ne comprenons pas, que l’homme que nous devons pêcher en premier, c’est celui qui gît au plus profond de nous-même, alors nous allons nous précipiter dans une errance stérile et nous briser peu à peu contre le roc endurci de notre propre cœur.
L’Écriture poursuit : « Aussitôt, ils laissèrent là leurs filets et le suivirent », est-ce donc si évident pour nous que des hommes et des femmes puissent ainsi tout quitter pour suivre le Christ ? En vérité, c’est possible parce que suivre Dieu est la vocation naturelle de l’homme crée à l’image et à la ressemblance de Dieu. Cette disponibilité immédiate que nous voyons chez ces pêcheurs Galiléens, est un état spirituel potentiel suffisamment éveillé pour dire amen à l’invitation divine. Ces hommes en vérité attendaient depuis toujours la venue du saint d’Israël, ils étaient imprégnés de l’espérance du salut messianique. Si nous entrons en nous-mêmes, au cœur de notre cœur, nous découvrirons que nous possédons la même espérance. Nous pourrions même retrouver aujourd’hui ce moment crucial, où dans notre cheminement existentiel, nous avons entendu nous aussi et chacun à sa manière ce « suis-moi », auquel nous avons répondu « amen » et voir quel a été depuis notre cheminement en Christ.
Voici donc des pêcheurs, et que laissent-ils pour suivre le Christ, ils abandonnent leurs filets, c’est à dire tout ce qui nourrissait et donnait sens à leur existence terrestre au milieu de leurs familles et proches. Chaque iota de l’Écriture Sainte possède et un sens littéral et un sens spirituel, qu’est donc un filet, n’est ce pas quelque chose qui peut nous nourrir mais aussi nous emprisonner ? Il existe des filets qui rendent la vie invivable, des filets qui nous aliènent et nous enlèvent toute liberté personnelle, des filets subtils mais remplis d’illusions et que pourtant nous croyons nécessaires voire indispensables pour notre existence, et tant d’autres filets encore…Le Seigneur ne dit pas qu’il ne faut pas travailler pour gagner sa vie, non, mais IL nous dit que dans ce monde, il n’existe qu’une seule manière de se libérer du filet dans lequel nous sommes chacun plus ou moins emprisonné. Et cette libération ne peut se réaliser que si l’homme, tout homme et toute femme, et en particulier nous qui nous disons volontiers disciples du Seigneur, désire et accepte de suivre sans condition Celui qui lui dit : « suis-moi ».
Et voici que : « Jésus parcourait toute la Galilée- tout comme il parcours toute l’Église- prêchant la bonne nouvelle du royaume de Dieu, enseignant et guérissant toute maladie », le Christ ne nous propose pas de le suivre pour faire une promenade touristique, ou bien de faire ce que nous croyons nous convenir à tel ou tel moment. IL ne nous emmène pas sur les routes mondaines pour y suivre les modes éphémères et illusoires que le vieil homme voudrait nous forcer à prendre. Le Seigneur nous encourage à commencer par prêcher déjà en nous-mêmes la bonne nouvelle du Royaume de Dieu, de nous enseigner à nous-mêmes la vie évangélique, pour guérir par la communion de vie avec Lui.
Alors quelle est donc l’ascèse concrète qui est bonne pour chacun d’entre nous, pour connaître en esprit et en vérité qui est le Christ et pourquoi IL nous dit « suis-moi » ? Oui, je vous transmets toujours la même réalité, celle de nos Pères et Mères saints qui sont la sagesse de l’Église, cette ascèse vivifiante, qui est la participation à la célébration de la Divine Liturgie et la pratique du saint Évangile. L’Église dans laquelle l’Esprit Saint nous enracine dans le présent, est le lieu béni où nous recevons avec une divine générosité toutes les grâces spirituelles pour suivre Celui qui est « la Voie, la Vérité et la Vie ».
« Suis-moi », par cette parole, le Christ s’engage lui-même et en premier à nous emmener avec lui, à nous apprendre comment passer de l’état de serviteur de Dieu, de l’Homme et de l’Eglise, à celui d’ami de la Divine Trinité, selon cette parole du Christ « Je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis ». Cette œuvre ascétique passe par l’œuvre commune qui ne peut se vivre et se réaliser que par la médiation de la sainte et humble Église du Christ. La célébration de la Divine Liturgie est en vérité, l’accomplissement parfait de la pêche miraculeuse, à laquelle le Seigneur invite chacun d’entre nous à participer pleinement et cela pour le salut de toute l’humanité et la restauration de la création divine dans sa première beauté.
L’Église du Christ seule, peut nous transmettre l’humilité du Fils Unique, Lui le pêcheur céleste qui s’est fait et le Frère et le Serviteur de l’humanité désorientée et malmenée par les esprits sous ciel dont parle l’apôtre Paul.
L’Église du Christ seule, peut nous transmettre l’humilité de l’Esprit Saint, Lui si discret et qui pourtant désire ardemment nous « revêtir des habits sacerdotaux spirituels que sont l’amour, la joie, la paix, la douceur, la patience, la maîtrise de soi » et tous les autres saints dons.
L’Église du Christ seule, peut nous transmettre la très aimante nostalgie de notre Père envers l’homme son bien-aimé, le Père a voulu l’Église comme une sainte icône vivante du Paradis, pour s’y promener à la rencontre de l’humanité, comme Il le faisait avec Adam et Eve à l’origine de la Création.
L’Église du Christ ou le Monastère du Christ, dont Il est le seul et unique Grand-Prêtre et Higoumène, ne doit jamais devenir un filet qui étoufferait la « liberté glorieuse des enfants de Dieu », liberté acquise par le Saint Sang et le Saint Corps de notre Seigneur sur la Croix, qui est le trône très pur et très saint sur lequel règne éternellement notre Seigneur Jésus-Christ.
Au Père Céleste et Roi de l’Univers, au Fils Unique qui a fait de nous ses cohéritiers, à l’Esprit Saint qui nous intronise dans le Royaume de Dieu, soit la Gloire dans siècles des siècles, amen.
+ Syméon
Dimanche de tous les Saints.
(Mat. 10, 32-33 et 37-38)
Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, amen.
Aujourd’hui, l’Eglise nous invite à méditer et à suivre la voie des Saints, qui devrait devenir aussi la nôtre, pour acquérir la liberté et la maîtrise de notre existence, en mettant à leur juste place les liens humains les plus profonds, ceux qui nous unissent à notre famille, aux amis et même à nos frères et sœurs dans la Foi. La sainteté de nos pères et mères est le fruit d’un engendrement religieux et spirituel, et cette naissance à la sainteté commence par le désir réel d’aimer Dieu non seulement en premier « mais aussi de toute son âme, de tout son esprit et de toutes ses forces…et son prochain comme soi-même ». Cela signifie que ce désir de sainteté nécessite tout au long et dès le début la mise en pratique de l’ascèse évangélique, par la voie étroite vécue et décrite par nos saints Pères et Mères, qui est la recherche persévérante de la communion avec le Seigneur. Ce qui précède témoigne exactement de la promesse divine qui est de réaliser avec l’homme, cette œuvre divino-humaine que « Dieu est devenu homme, pour que l’homme devienne dieu ».
Le Seigneur dit : qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi, qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi, et la suite... », cette parole comme toute parole évangélique n’est pas accessible par le seul raisonnement intellectuel. Ce que le Seigneur enseigne ici, c’est ce qu’essayent de réaliser les moines et les moniales, qui n’ont d’autre désir que d’aimer Dieu seul d’abord, tout en étant enracinés dans leur communauté monastique. Et nous alors, qui vivons dans le monde au milieu d’une multitude d’êtres et de choses, comment ferons-nous pour accomplir cette ascèse fondamentale « être seul avec Dieu Seul » ? Eh bien nous aussi, avons vocation à aimer Dieu d’abord et notre prochain aussi et pour y arriver, nous prenons racine dans notre communauté ecclésiale. La voie religieuse de base qui permet de réaliser ce désir d’amour pour Dieu et notre frère ou notre sœur est exactement la même pour le moine que pour le fidèle dans le monde, cette voie divino-humaine s’enracine dans la célébration liturgique de notre Eglise.
Si nous regardons un peu comment vivent les moines, nous pouvons discerner que les fondements incontournables entre autres sur lequel, ils construisent leur vie et leur ascèse en Dieu sont « l’obéissance et l’humilité ». Mais, nulle part dans l’Ecriture sainte, il n’est écrit que l’obéissance et l’humilité sont un privilège monastique, obéir et cultiver l’humilité, doit être l’œuvre de tout fidèle orthodoxe, le Christ était-Il moine ? Non, mais Il s’est rendu obéissant au Père céleste jusqu’à « la mort, et à la mort sur la Croix », c’est donc au Père céleste que nous devons tous obéissance, où ? Dans notre vie entière par la grâce du Verbe et de l’Esprit. C’est pourquoi, le Seigneur ajoute « qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas, n’est pas digne de moi », est-ce à dire que nous finirons tous crucifiés, non, mais nous serons tous éprouvés par les folies du monde et les passions négatives de notre âme.
Alors que signifie « celui qui aime son père ou sa mère plus que moi, et la suite… », cela signifie qu’il n’ y a aucune commune mesure entre l’amour humain et l’amour pour Dieu, est-ce à dire, que l’amour humain serait défendu, inutile ou que sais-je encore, évidemment non. Mais à l’évidence l’amour humain non vivifié par l’amour divin, engendre une dépendance, qui elle-même engendre une multitude de conséquences sur la qualité de notre relation à Dieu et au prochain. Ainsi, ce qui est dénoncé : c’est la dépendance au monde et à ses modes, sous prétexte que nous devons ceci ou cela, par exemple à nos parents ou à nos proches, et cette exigence si elle n’est que « humaine », prend force de loi et peut nous enfermer dans une obéissance stérile ou engendrer une révolte qui finiront parasiter notre existence.
De même qu’une obéissance aveuglée peut aliéner le moine le plus volontaire, de même, une obéissance aveuglée dans l’Eglise peut engendrer un mal-être stérile et contraire à la vocation de l’Eglise qui est d’engendrer spirituellement les Fidèles comme un « peuple royal, prophétique et sacerdotal ». N’est-il pas écrit « si un aveugle guide d’autres aveugles, tous tomberont dans le trou », alors à qui obéirons-nous ?
Nous obéirons comme le Fils Unique au seul Père céleste et comment ferons-nous pour y arriver, en croyant d’abord que nous avons « reçus nous aussi l’Esprit Saint, l’Esprit de Vérité qui nous rendra libres », et comment ferons-nous pour obéir dans l’Esprit Saint au Père céleste par Jésus-Christ, nous obéirons à notre sainte Eglise orthodoxe qui est dit saint Paul « le Corps du Christ dont Il est la Tête ». Dans ce sens, l’Eglise est dépositaire de toute la Présence de notre Seigneur Jésus-Christ et de tous ses biens spirituels et matériels qui sont sans cesse répandus sur nous à travers la Divine Liturgie en particulier.
De même, que nous ne devons pas aimer nos parents et proches plus que le Christ, de même nous ne devons pas obéir à nos parents ou proches plus qu’au Christ, du coup, nous commençons par avoir le tournis, ne sachant plus que faire ni où ni comment ? Le Seigneur ne dit pas de ne pas aimer ses parents et proches ou de ne pas leur obéir, mais pas plus qu’à Dieu, parce que l’amour pour Dieu en premier est ce qui nous permet d‘apprendre à aimer notre prochain comme nous-mêmes. « Qui ne s’aime pas lui- même comment aimera t-il quelqu’un d’autre » ? Chacun peut comprendre que plus la communion avec Dieu est réelle et profonde, plus les dons divins viennent habiter et vivifier notre existence et nous rendent capables d’accomplir notre vocation à la sainteté. Ceci nous rappelle cette autre parole du Seigneur qui dit « celui qui m’aime, c’est celui qui écoute ma Parole et la garde », c’est à dire la met vraiment en pratique. Ainsi Dieu bénissant, si nous mettons en pratique l’Evangile, nous nous donnons les moyens d’aimer Dieu d’abord et par l’ouverture du cœur et de l’esprit nous aimerons aussi l’homme, tout en cultivant notre liberté personnelle de « fils et filles de Dieu ».
Tout comme les saints sont reconnus comme tel après leur naissance au ciel par l’Eglise, de même nous connaitrons après notre naissance au ciel, dans quelle mesure nous avons essayé d’aimer Dieu et notre prochain, lorsque le Seigneur nous dira « tu as été fidèle et tu as fais fructifier les talents que tu as reçu et le premier de ces talents était d’aimer, maintenant viens dans la Joie de ton Seigneur ».
Le Seigneur dit encore « qui aura trouvé sa vie la perdra et qui aura perdu sa vie pour moi la trouvera », ce qui signifie que celui ou celle qui aura été son propre maître en façonnant son existence de manière individuelle et égocentrée, est déjà compté parmi les agonisants, même si tout semble réussir sur un plan matériel. Une telle non-existence est en vérité dénoncée par le Psalmiste qui dit : « l’insensé dit dans son cœur, Dieu n’existe pas », penser et croire que je puisse me sauver tout seul sans le concours de l’homme mon semblable et pire encore sans Dieu mon Créateur, voilà la folie tapie dans la pensée humaine qui guette l’homme isolé pour le perdre.
Perdre sa vie, c’est pour le croyant, faire le constat amer et crucifiant que la vie sans Dieu, n’est en réalité qu’une caricature incapable de combler le moindre désir essentiel de l’être, que la seule issue est la mort définitive dans ce monde sans aucune espérance de vie éternelle. Ainsi l’homme sans Dieu est aussi un homme sans humanité véritable et qui s’interdit à jamais de rencontrer et de suivre « Celui qui est le Chemin, la Vérité et la Vie ». C’est pourquoi le Christ ajoute « quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, Je me déclarerai pour lui devant mon Père qui est dans les cieux…et la suite ». Mais comment l’homme séparé de Dieu, pourrait-il se déclarer pour un Dieu créateur auquel il ne croit pas et auquel il ne s’intéresse pas ?
Nous voici donc appelé par l’Esprit Saint à suivre la voie de la sainteté, qui nous est inhérente depuis notre origine paradisiaque, voie qui est le Christ lui-même, et que nous ont transmis en héritage religieux et spirituel nos pères et mères orthodoxes qui nous ont précédés dans le témoignage de la foi véritable, consistant à confesser la Divine Trinité comme notre Dieu unique. Ce vrai témoignage commence par notre désir libre de confesser le Christ comme notre Seigneur et Sauveur, Lui le Saint des saints et donc de marcher nous-mêmes comme « personne et comme église dans la voie de la sainteté », avec comme aide précieuse la prière personnelle et liturgique.
Au Père, au Fils et au Saint Esprit, un seul Dieu en trois Personnes divines sans confusion ni séparation, soit la gloire maintenant et toujours et dans les siècles des siècles, amen.
+ Syméon